Chapitre 4

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L'art de se faire pigeonner

💛💙


D'un geste las, j'insère la clé dans la serrure mais ne la tourne pas. Le trousseau pendouille et cliquette. Mon front s'écrase contre la porte. Pendant un temps indéfini, je reste là sans bouger, à méditer sur ma vie. Quand je me décide enfin à ouvrir, ce n'est qu'après avoir conclu qu'elle était misérable. Et chaotique. Surtout chaotique.

Comme toujours, j'entre dans l'appartement et le rituel commence. Je me faufile comme je peux dans le couloir minuscule, me contorsionne pour ôter mon manteau ainsi que mes chaussures. Mon dos craque. Je me masse rapidement les reins du bout des doigts puis tâtonne le mur à la recherche de l'interrupteur.

L'ampoule grésille une ou deux fois avant de se stabiliser. La lumière inonde mon salon étriqué. On ne peut pas dire que j'habite un palace ; toutes les pièces font la taille d'une cage à rongeur. Néanmoins, je ne m'y sens pas si mal que ça. C'est chez moi. Et c'est calme.

Peut-être un peu trop.

Dans le silence, je me rends dans la cuisine pour me préparer un sachet de nouilles instantanées et fais le tour de mes réseaux sociaux pour m'occuper le temps qu'elles cuisent. Il ne s'y passe pas grand-chose, là-bas. Je n'ai que quelques membres de ma famille, une paire de potes du lycée et mes collègues dans mes abonnés. C'est rare que je reçoive un message privé ou une notification qui m'est destinée.

Quand mon dîner est prêt, j'attrape mon bol et m'installe devant la télé. Je mets une chaîne au hasard et tombe sur un documentaire sur le règne animal. C'est marrant, on dirait un peu le monde d'IKEA.

Pendant un instant, je m'amuse à comparer les différentes espèces à mes camarades de boulot en me marrant. Puis je décroche et termine de manger sans plus réagir aux araignées qui dansent ou aux paons qui paradent. Je ne regarde jamais vraiment la télé, c'est juste pour me faire un bruit de fond. C'est plus sympa vu que je n'ai personne avec qui discuter.

En vérité, je n'aime pas beaucoup le silence et le calme. On pourrait penser que ça me soulagerait après les journées mouvementées et assourdissantes que je passe au magasin, mais ce n'est pas le cas. Au contraire, je crois que ça me donne comme une sensation de vide. J'imagine que c'est comme ça pour tous ceux qui vivent seuls.

Je soupire et tente de me changer les idées. Sans succès. Je ne sais pas quoi faire de moi. C'est mon éternel problème. Alors je me lève et nettoie ma vaisselle, sonde à nouveau les divers objets qui pourraient me divertir dans mon appart', avant d'abandonner.

Un groupe de personnes rit aux éclats en bas de ma fenêtre. Des rires aux notes enivrées. La motivation m'élance tout à coup. J'envoie un message aux gars pour leur proposer de sortir, le cœur plein d'anticipation.

Les réponses tombent les unes après les autres : Hoseok est indisponible, Yoongi prévoit de se coucher tôt, Seokjin ne répond pas (il est sûrement aux bras d'une nana à l'heure qu'il est), et Namjoon me dit qu'il a la flemme. Jimin, lui, aurait été tenté, mais ses parents ne veulent pas qu'il quitte la maison aussi tard en pleine semaine.

Je suis un peu déçu, mais je retrouve bien vite mon engouement.

Tant pis ! J'irai boire seul. Ça me fera une occupation, et surtout, un peu de compagnie.

Quand j'arrive ce matin au travail, la mauvaise humeur me terrasse. Ma virée de la veille a été un vrai désastre, et je ne fais qu'y repenser.

Släkt・ᵛᵏOù les histoires vivent. Découvrez maintenant