Un homme revenu des enfers

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Ce n'était que le début de la semaine, mais Blaise savait que sa femme était déjà épuisée. Le mardi était toujours sa journée la plus chargée, et qu'elle réservait généralement aux patients les plus en difficulté. Blaise connaissait l'emploi du temps de sa femme par cœur. Le lundi, Giulia formait son équipe de psychologues. Les matinées étaient souvent réservées à des réunions d'équipe lors desquelles chacun pouvait rapporter des difficultés et demander conseil à propos de patients, et les après-midis étaient réservées aux enseignements tirés de la pratique de Giulia. Les mardis étaient donc réservés aux patients les plus compliqués de sa femme, qu'elle recevait de 7h30 à 20h30. Le mercredi était chargé de consultations lambdas, bien que parfois elle organisait des ateliers de groupe le mercredi soir pour les traumatisés de guerre. Giulia réservait ensuite tous ses jeudis matin à la recherche et l'apprentissage : elle lisait à peu près tout ce qui avait été écrit sur tout ce qui pouvait toucher de près ou de loin la psychologie humaine. Oui, sa femme était incroyablement brillante. Le reste de sa semaine était dédiée aux consultations, bien que parfois elle menait des conférences temporairement. Alors, sachant parfaitement l'heure à laquelle sa femme rentrerait du travail ce mardi soir-là, Blaise avait préparé le dîner, et avait disposé une table romantiquement décorée de pétales de roses sur leur terrasse en ce début d'été.

Il était 21heures lorsque sa femme passa finalement le pas de la porte. Blaise avait tout préparé pour elle, et savait parfaitement comment cette soirée allait se dérouler. Ainsi, il l'embrassa tendrement et l'aida à déposer son manteau dans l'entrée, puis il l'accompagna dans la pièce de leur maison qu'ils avaient dédié au nettoyage énergétique. En effet, sa femme travaillait avec la magie psychique, et ainsi les énergies, et principalement les énergies les plus négatives de personnes souffrantes. Régulièrement, Blaise aidait sa femme à se débarrasser de ces énergies qui ne lui appartenaient pas, afin que celles-ci ne l'affectent pas plus que nécessaire, pour la protéger. Après tout, c'était son rôle. Alors, il la conduisit dans le patio couvert de leur maison spécifiquement dédié à ces nettoyages. Cette salle intérieure ornait en son centre un magnifique magnolia magique, qui absorbait les mauvaises énergies et les transformaient en splendides fleurs. Un rocher était disposé à côté de cet imposant arbre sur lequel Giulia prit alors place. Elle s'assit en tailleur, prit une profonde inspiration, et ferma les yeux. Blaise se saisit de sa baguette magique, s'approcha de sa femme, tendit sa baguette vers elle, et fit un cercle autour d'elle en murmurant :

- Quod malae vires exeunt hoc corpus, (que les mauvaises énergies quittent ce corps).

Giulia prit une profonde inspiration, et expira lourdement alors qu'un début de fumée verdâtre commença à s'échapper de son corps pour monter dans les airs en direction du magnolia.

- Quod malae vires exeunt hoc corpus, continua Blaise en s'éloignant doucement de sa femme pour laisser les énergies la quitter et être recueillies par l'arbre magique.

La fumée verte se fit un peu plus épaisse, ainsi que plus conséquente. Les sourcils de sa femme se froncèrent alors que la douleur psychique appartenant à d'autres quittait son corps pour l'en libérer. La baguette toujours tendue vers elle, Blaise continua en s'éloignant encore un peu plus :

- Quod malae vires exeunt hoc corpus.

Une épaisse fumée devenant presque marron s'extirpa de l'intérieur de sa femme, et prit la forme d'un visage d'homme hurlant au-dessus d'elle. Blaise regarda cet énorme visage qui remplissait le large espace qui séparait le visage de sa femme et le plafond de leur salle à nettoyage. Chaque fois qu'ils pratiquaient ce rituel, Blaise se rappelait un peu plus la douleur que portait sa femme sur ses épaules, littéralement. Il était constamment renvoyé au fait que sa petite femme, celle qui était si douce, si belle, si brillante, celle dont le corps frêle vibrait juste sous ses yeux, recevait les pires douleurs du monde à longueur de journée, et qu'elle le faisait incroyablement bien. Il était à chaque fois espanté : sa femme recevait tout cela, et elle rentrait le soir dans leur maison, souriante, aimante, parfois fatiguée, mais toujours elle demandait à son mari comment avait été sa journée, toujours elle écoutait ce qu'il avait à lui raconter, et toujours elle lui offrait amour et chaleur. Alors, Blaise continua d'aider sa femme à se décharger de toute cette souffrance, parce qu'il lui semblait que c'était bel et bien le minimum qu'il puisse faire.

Alpha Ophis : Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant