Chapitre 22

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Pour Grace

Peyton

Pour la première fois depuis un certain temps, j'essaie de faire un semblant de ménage dans mon local, un des endroits où je me sens le mieux, là où je peins toutes mes œuvres. J'ai toujours aimé travailler avec la peinture, depuis petit. C'est un moyen pour moi de libérer mes émotions, de les laisser s'exprimer à travers mon pinceau.

Ma tentative pour nettoyer n'est pas très concluante. Pour moi, c'est un bordel organisé. Mais là, ça devient trop étouffant. Pour autant, je ne bouge quasiment rien. Je sens que cet endroit va rester pareil un moment. Je reste planté là au milieu de la pièce alors que je me dirige vers mon mur remplis de photos. Je l'adore. Ici sont représentés les moments que je veux graver à jamais dans ma mémoire. Des moments simples mais inoubliables.

Je laisse mes doigts effleurer une photo au-dessus de ma tête. Mon cœur se serre, ma gorge se noue jusqu'à me provoquer une douleur que je connais trop bien. Quand Eve est venue ici, j'ai eu peur qu'elle me demande qui était la fille sur les photos. Je lui aurais probablement répondu que c'était une fille forte, une battante, une personne généreuse et d'une incroyable bonté. Est-ce que je lui aurais dit qu'elle comptait plus que tout pour moi, que je n'avais pas réussi à la sauver alors que j'avais sa détresse juste devant mes yeux ?

Ma sœur et moi ne nous ressemblons pas beaucoup. Elle est blonde, et moi brun. Elle a les traits du visage plus fin, un sourire plus radieux, des fines taches de rousseur qui parsèment son nez. J'ai toujours dit qu'elle était la plus belle de la famille. Quand je lui disais ça, elle avait tendance à me rabrouer et à me faire la morale, comme quoi tout le monde est beau à sa manière, et qu'elle n'était pas si jolie que ça. Je passe mon pouce sur son visage. Ce jour-là, on était à la plage. Ce jour-là, je n'étais pas ébloui par le soleil, mais par son sourire.

— Tu seras toujours la plus belle dans mon cœur, chuchotai-je.

C'était ce que je lui répondais toujours avant qu'elle ne me rit à la figure. Je m'éloigne d'un pas, reculant de la vague de souvenirs qui s'apprête à m'engloutir. Je n'ai même pas le temps de débarrasser le sol collé des vieux papiers journaux que la porte s'ouvre à la volée.

— C'est toujours en bordel ici, s'exclame-t-elle.

Elle n'a fait qu'un pas dans la pièce que l'atmosphère s'est déjà adoucie. Elle a toujours le don d'illuminer tous les endroits ou elle va.

— Content de te voir aussi.

Malgré qu'on soit en fin de soirée, Anastasia est toujours là, qu'importe l'heure, qu'importe l'endroit. J'esquisse un sourire en coin alors qu'elle s'assoit sur la chaise de mon bureau. Elle pose ses yeux partout dans la pièce avant de s'attarder sur la toile posée sur mon chevalet que j'étais en train de peindre il y a quelques instant.

— Ça, qu'est-ce que ça représente ?

J'enfonce mes mains dans mes poches et me mord la joue intérieur. Ana sait tout de moi, y compris la signification de mes peintures. Il n'y a pas une seule chose qu'elle ne sait pas à propos de moi. Depuis l'événement, elle me demande à chaque fois ce que mes peintures représentent, et elle obtient toujours la même réponse. Je me demande si elle espère un jour qu'elle changera.

— Grace, finis-je par répondre.

Si ma sœur m'entendait, là maintenant, elle aurait envie de me donner son poing dans la figure, c'est certain. Je ne peins que des portraits, et dans un style plus qu'abstrait. Mes portraits ne ressemblent pas à grand-chose. Encore une fois, celui-ci ne lui fait pas d'éloges. C'est un ramassis d'ébauches de crayons à papiers, de coups de pinceaux approximatifs et de couleurs, pas forcément très gaies. Mais ça lui ressemble bel et bien.

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