Chapitre 8 : Triste Réalité.

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Cours !

Un orage a éclaté au-dessus des rues de Londres, plongeant la ville dans un torrent d'eau et de boue. Je ne sais plus distinguer les larmes de la pluie qui s'abat sur mon visage, alors que je déambule sur les pavés.

Cours !

J'ai mal au cœur, comme jamais... La mort de mon père n'a pas été si douloureuse. Pourquoi ? Pourquoi a-t-il fallu qu'il chavire pour cet homme ? N'aurait-il pas pu se garder pour un autre ?

Cours !

Je n'arrête pas, comme si un violeur était à mes trousses, comme si ma vie en dépendait. Je veux fuir l'évidence qui s'est porté à mes yeux quand il me tenait si près de lui. Je m'imagine de nouveau, happé ses lèvres, sans retenu, alors qu'il me tient contre lui, provoquant une intense chaleur dans mon corps.

Mon pied s'accroche dans un pavé bien trop haut, m'envoyant au sol avec dureté. Le choc est rude, mes mains me font mal alors que j'ai voulu me rattraper. Je sens sur mes mains un liquide chaud, et je comprends rapidement que je me suis ouverte. Les larmes silencieuses continuent de couler, alors que je sais ma situation gâchée. Je me suis éprise d'un homme qui n'a que faire de moi, qui ne me voit comme une fille sans tenue. Pourquoi ?



J'ai regagné la maison avec difficulté, mes genoux me faisant horriblement mal, mes mains dégoulinant d'un liquide écarlate. Je suis épuisé.

La maison se trouve à dix minutes à cheval de Londres, et je n'ai pas réussi à marcher, je ne pouvais que courir. Et lorsque je pousse la porte, m'engouffrant dans le hall plongé dans le noir, je m'écroule au sol, fatiguée, épuisée, en pleurs. J'aimerais tellement que l'on me prenne dans les bras, une étreinte réconfortante, apaisant mes peines. Je me sens soudainement si seule.

-Miss Rose !

La voix de Ann se fait entendre, alors qu'elle accourt vers moi, me prenant dans ses bras. Le timbre de sa voix redouble l'intensité de mes larmes, elle semble choquée de me voir ainsi. Je me raccroche à elle, ne souhaitant qu'elle me laisse, ne voulant être seule. J'ai besoin d'elle, j'ai besoin de quelqu'un qui reste, qui ne m'oublie pas. J'ai trop mal au cœur pour cela. Je me rends compte avec douleur que l'absence de ma mère me ronge, j'ai affreusement besoin d'elle.

-Lilibeth ! Lilibeth !

Ann crie, alors que je suis entrain de noyer sa chemise de nuit de larmes et de sang. Elle me cajole, alors que je n'ai plus la force de me lever, de rien faire, seulement de pleurer.

-Rose, calmez-vous, et racontez-moi ce qu'il s'est passé.

Non, je ne veux pas, je n'ai pas la force de parler, de dire un seul mot. Je veux que l'on m'oublie, que l'on me laisse dans mon désarroi. Je ne peux m'en prendre qu'à moi-même. N'avais-je pas vu qu'il était un homme à femme ? Pourquoi a-t-il fallu que mon cœur chavire pour lui en si peu de temps ?

-Allez faire couler un bain chaud pour Miss Rose, et trouvez des linges propres pour soigner ses plaies.

-Tout de suite.

-Rose, levez-vous, il faut vous laver, vous êtes gelée !

Je me laisse faire, aidée par Ann pour gravir les marches, trop lasse pour penser par moi-même, ni même réagir à ses questions. Je ne reste fixé que sur une seule personne, le Vicomte Bridgerton. Ses lèvres, son contact, son souffle sur ma joue, son odeur.

La Rose et l'ArrogantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant