Chapitre 6: Pourquoi rester?

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Pourquoi rester ? C'est la question que je me suis posée après avoir écrit des mots à mon père sur ce bout de papier (des mots qu'il ne liera probablement jamais d'ailleurs, mais revenons en aux faits). Je mourrai si je ne fais rien, à cause de la faim ou à cause de mon alterné qui réussira à rentrer en criant à nouveau avec son sourire de fou. Je ne dois pas infester les autres, d'accord, mais est-ce que quelqu'un a la preuve que ce truc se diffuse ? J'ai terriblement peur, et cela ne s'arrangera pas. Je ne veux pas mourir sans avoir essayé quoi que ce soit.


C'est en ayant ces pensées que je me retrouve, avec une brique en main, en train de détruire la fenêtre de la chambre de Maïna, de passer avec peine dans ce petit espace et de courir avec de grandes enjambées. Vous connaissez l'expression courir comme si sa vie en dépendait ? Et bien, j'ai compris tout le sens de cette expression seulement à ce moment précis de ma douce vie. Et je me retrouve au milieu d'un rond-point :


- Bon, je fais quoi maintenant ?


C'est ridicule, mais sous le coup de l'impulsion, je n'avais pas réfléchi à ma destination. Les rues sont vides, tout le monde est enfermé dans leurs misérables maisons, comme si cela allait les protéger d'un être paranormal. Je songe quelques instants au lieu le plus adapté à ma fuite. La police. J'ai bien remarqué qu'ils sont inutiles dans cette histoire (tellement inutile qu'ils laissent une gamine livrée à elle-même, peu importe, ce n'est pas le sujet) mais j'imagine qu'ils sauront au moins me donner une arme ou un pass pour me réfugier dans un bunker...



- Bonjour, je suis victime d'un alterné, vous n'avez pas quelque chose pour moi ?


Son visage, qui se décompose lentement, m'a très vite fait comprendre qu'ils n'ont rien de tout cela. L'homme, enfoncé dans son fauteuil, prend d'une main tremblante son talkie-walkie avant de chuchoter :


- Luan... On a le cas numéro 6 à l'accueil...


- Nalani ?! Demanda le chef de la police.


Il ne répondit rien et Luan parla à nouveau quelques secondes plus tard :


- J'arrive.


En attendant le chef de la police, je questionne l'homme :


- Numéro 6 ? Qui sont ceux avant moi ?


Il s'enfonce encore plus dans sa chaise et m'affiche un visage horrifié. Je comprends que je n'obtiendrais rien de cette personne.


- Ils n'ont pas voulu nous rejoindre, tu es le cas numéro 6, mais la seule qui a accepté de répondre à nos questions, affirma Luan.


Son visage rassurant m'apaise.


- Vous avez leurs noms ?


- Que fais-tu ici ? Je pensais que ton père t'avait dit de rester chez toi.


- Il m'a surtout dit d'aller me faire voir avant de me laisser toute seule chez-moi.


Voyant qu'il n'ajoute rien, je continue :


- Vous n'avez pas des armes ? J'aimerais tuer mon sosie avant qu'il ne s'occupe de moi.


Il a de la peine pour moi, c'est clair, mais il a aussi peur de moi. Je me fiche royalement de ce qu'ils pensent, de toute façon, je vais mourir.


- J'imagine qu'on peut te trouver quelque chose.


J'ai déjà le fusil de mon père dans un grand sac à dos. C'est tout, je ne voyais pas l'intérêt de prendre autre chose qui ne fera qu'alourdir la charge qui pèse sur mes épaules. Il me donne deux pistolets ainsi que des balles.


Je lâche un timide « Merci » en baissant les yeux.


- Je te soutiens, Nalani, je sais que tout ces regards insistant de la part de mes collègues ne sont pas faciles.


Il pose sa main sur mon épaule et me sourit chaleureusement.


- Oui, merci. J'aimerais savoir les noms des autres cas.


- D'accord, viens avec moi, dit-il dans un souffle.


Je repars une trentaine de minutes plus tard, avec un bout de papier plié sur lequel j'avais noté le nom et l'adresse du premier cas. Je me rends compte que je marche au milieu d'une route qui est habituellement très passante, il n'y a personne dehors. J'essaie de trouver un endroit ou me reposer, mais tout est fermé, tout sauf le magasin de la ville dans lequel j'entre avec espoir d'y voir un panneau « Gratuit pour les victimes d'alternés !». Mais évidemment, il n'y a rien. Je ne sais pourquoi, mais les clients semblent tous avoir repéré que j'étais une victime. Les mères tirent leurs enfants vers elles quand je passe et les adolescents me dévisagent en me contournant. Je ne leur en veux pas, j'aurais fait la même chose. Je ressors, sachant que je n'y trouverais rien sans argents. Et j'entame ma marche vers la maison de cet inconnu, en ignorant les bruits étranges qui me suivaient.


MANDELA CATALOGUE (ABANDON)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant