Chapitre 2

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Il était beaucoup trop tôt. Vraiment trop tôt.

Normalement le dimanche, on dort, on reste au lit jusqu'à midi, histoire de profiter d'un jour de repos. Mais non, je me retrouvais à courir comme une dératée dans les couloirs du manoir. Je courais vers ma mort, j'en étais certaine.

Je n'avais pas entendu mon réveil. Ou plutôt je l'avais délibérément ignoré. Dix minutes de retard c'était rien. Si ? J'avais manqué d'éclater mon téléphone plus d'une fois avant de me rappeler dans quelle merde je m'étais foutue la veille.

Le temps de lever mon cul du matelas et d'enfiler quelque chose, j'étais déjà foutue. J'avais croqué dans un gâteau clairement abandonné depuis trop longtemps sur mon bureau qui m'avait obligée à faire un détour supplémentaire par la salle de bain pour éviter de m'étouffer dessus.

Makan allait me tuer. S'il y avait bien une chose que les instructeurs appréciaient, c'était la ponctualité. Raison pour laquelle je dévalais les escaliers comme une furie. Enfin, maintenant que j'étais en retard, j'aurais pu tout aussi bien marcher.

Dans tous les cas, je me rendais tout droit à ma mort. J'avais même une musique funèbre en tête alors que mes pieds frappaient le parquet à toute vitesse.

Il n'était pas dans le gymnase.

J'avais dérapé avec une telle violence que je n'étais pas passée loin de la chute, tout ça pour réaliser que j'étais seule. Dans le doute, j'avais quand même tourné plusieurs fois sur moi-même, à la recherche de la silhouette de la sentinelle.

Bane m'avait pourtant bien dit d'être présente à huit heures. Si c'était une blague, elle était de mauvais goût. Personne ne voulait se lever aussi tôt le matin ! Merde, j'avais envie d'étriper ce draugr à la con, et pour plus d'une raison.

— J'avais donné une heure précise.

La voix rocailleuse de Makan provenait d'en haut, si rauque et sonore que tous mes poils se hérissèrent.

J'eus envie de me frapper pour ma stupidité pour ne pas y avoir pensé plus tôt. Mon entrainement m'avait appris à scruter les moindres recoins d'une pièce en y entrant pour détecter le plus minuscule danger.

Je n'avais pas pensé une seule seconde à vérifier des planques en hauteur, bien trop habituée à regarder en bas. C'était une telle insulte à l'entraînement de Bane que je sentis les larmes commencer à me brûler les yeux.

J'avais foiré. Encore une fois.

Chacun de mes muscles crispés à en être douloureux, je pivotai lentement, luttant pour garder la tête haute. L'envie de me planquer dans le premier trou venu était tentante, mais je savais que c'était inutile.

Jamais ça n'empêcherait la sentinelle de s'occuper de mon cas.

Avec une grâce que je ne l'imaginais pas posséder, Makan se laissa tomber du promontoire sur lequel il était accroupi, se réceptionnant sans un bruit au sol. Il déplia lentement son corps immense, couvert de tatouages si complexes que je peinais à en suivre les courbes.

Avec sa peau couleur de bronze et ses longs cheveux noirs, c'était impossible de nier ses origines polynésiennes. Quant à son espèce... Je n'en avais pas la moindre idée.

Il avait beau se trouver devant moi, suffisamment proche pour que je n'aie qu'à lever le bras pour le toucher, je ne sentais pas sa présence. C'était comme s'il ne se trouvait pas là, qu'il n'existait pas réellement.

— Tu as un quart d'heure de retard, gronda-t-il, son accent si fort qu'il déformait les mots en roulant les « r ».

— Dix minutes, protestai-je.

[1] The Mermaid SinksOù les histoires vivent. Découvrez maintenant