01. Une touche de vanille

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Jungkook

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Jungkook

Lundi après-midi, jour de pluie.

Boston est un peu comme moi. En ce temps gris, elle tombe dans l'oubli. La vie est tragique, la destinée fatale et personne n'y échappe.

Comme le temps qui défile.

Et pourtant, je reste immobile. Statique sur le trottoir, je me sens vide. Vulnérable. Une simple carapace d'os et de chair pleine de failles.

Une voiture passe devant moi.

Sa conduite est brusque, immature. Elle file à vive allure sur la chaussée sans se préoccuper des autres passants pressés de rentrer. Lorsqu'elle passe devant moi, elle ne prend pas la peine de décélérer et m'arrose de son plein gré avant de poursuivre sa course en filant au loin. Roulant après un horizon incertain.

Je suis un jour d'échec. Un jour de malchance.

Je renifle. Il fait froid.

Mon regard voyage. Il se perd sur la veste en cuir que je porte, certainement trop légère pour une journée d'hiver, puis sur mon jean et, enfin, sur mes derbies. Je souffle, agacé. De la tête aux pieds, je suis trempé. Super. La morsure du froid attaque ma peau. Je tremble. Cependant, autour de moi, personne ne le constate. Personne ne me voit. Les badauds ne m'accordent aucune attention, pas même un coup d'œil. Je suis transparent, mais j'ai l'habitude.

Je l'ai si souvent été, auparavant.

Les échos de la ville sont lourds, la pluie assourdissante. Le klaxon des voitures est fort, puissant et tout ce bruit me dérange, me démange. Alors, je fuis. Je fuis comme un lâche parce que c'est ce que je suis. Un lâche au comportement égoïste qui souhaite juste respirer. Un lâche accablé par le poids de ses responsabilités.

Un lâche qui, après trois rues et cinq autres enjambées, part se réfugier dans la galerie d'art juste à côté.

Ma préférée.

Dans un besoin pressant, je me jette sur les portes en verre et franchis l'entrée familière. C'est le gardien qui m'accueille. Hector, accompagné de son éternel balai et de sa casquette à l'effigie de l'équipe des Red Sox, m'offre un sourire accueillant et chaleureux. Je lui réponds par un hochement de tête, simple et discret, avant de me diriger vers la billetterie. Cette fois-ci, c'est Jennie qui me reçoit de bon cœur. Sa voix douce et ses pommettes rosées illuminent la pièce lorsqu'on échange les banalités de la journée. Ce sont les mêmes qu'hier, les mêmes qu'avant-hier, puis du jour encore précédent, et ce sera certainement celles qui viendront demain, ainsi que le jour suivant. Enfin, elle me tend le ticket et me souhaite « une bonne visite » en m'accordant un dernier sourire et aussitôt mes pas me guident et me conduisent sur le même chemin que je commence à connaître sur le bout des doigts. Bien vite, un immense escalier en marbre blanc me fait face. Celui-ci mène à l'étage où sont rassemblées les peintures et gravures du XXe siècle.

Ma salle favorite.

Le monde autour s'affole et s'agite.

― On reste groupé, s'il vous plaît...

Les couloirs se remplissent, ils s'inondent de bruits.

― ...Et par pitié, ne vous dispersez pas !

Je n'aime pas ça. L'esprit en alerte, je crains une future frénésie contre laquelle je lutte constamment. Mon cœur se débat férocement dans ma poitrine. Il pompe vite, se tord et se comprime. C'est aussi frustrant que douloureux.

Un jeune garçon me bouscule soudainement et me sort de mes sombres pensées. Il rigole avec un de ses amis et rejoint le reste de ses camarades sans me prêter la moindre attention, sans m'accorder la moindre excuse. Sûrement parce qu'il ne m'a pas vu.

Comme tous les autres.

Rongeant mes ongles, je les observe prendre le couloir de gauche en compagnie d'un guide. L'enseignante qui les accompagne rouspète contre les éléments les plus turbulents, tandis que moi, je souffle de soulagement lorsque j'emprunte le couloir à droite. C'est plus calme, plus paisible. Moins bruyant. Puis, à la vue de la salle, mes traits s'adoucissent instantanément. C'est beau. Immense. Et malgré la hauteur sous le plafond, je m'y sens bien, serein. Partiellement apaisé. Une salle qui nous offre cette sensation de légèreté, celle dans laquelle on convoite une certaine liberté.

Une salle où se trouve ce tableau.

Un magnifique tableau qui passe presque inaperçu au milieu des autres plus majestueux, spectaculaires, plus grandiloquents. Pourtant, c'est sur lui que mon regard se pose dès que j'entre dans la pièce.

Cependant, aujourd'hui ce n'est pas sur cette huile que mes prunelles s'accrochent.

Mais sur la silhouette masculine qui se trouve juste devant l'œuvre que je suis venu admirer.

Une silhouette imposante à la subtile fragrance de vanille.

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Frêles sont les cœurs ébréchés ᵗᵃᵉᵏᵒᵒᵏOù les histoires vivent. Découvrez maintenant