"Une petite démone décolorée... c'est mignon."
La femme remonta lentement la pointe de sa lance sous ma gorge, me forçant à me redresser malgré la panique qui continuait à broyer mon cœur dans un étau. J'avais échappé à la mort grâce à l'elfe noir. Il avait tiré sur l'homme qui me tenait en joue. Ça m'avait permis de ne pas me faire trouer la peau. Et maintenant, cette femme m'avait menée jusqu'ici.
"Je... je ne suis pas une démone." disais-je d'une voix fluette.
Le sang de ma plaie commençait déjà à refluer. Je ne savais pas comment appeler la personne qui se tenait face à moi. Sauveuse, adversaire ? Elle devait m'avoir aidée, et maintenant, elle me tenait sous son autorité. Je pus la détailler davantage. C'était une femme assez grande, au physique athlétique. Lorsque ma vision s'affina, je discernai enfin ses cheveux rouges comme le sang. Elle avait aussi une cicatrice sur le cou, comme si on avait décollé sa tête de ses épaules avant de l'y fixer de nouveau. Sa tenue aurait pu être tout à fait dans mes goûts, si nous avions discuté vêtements. Elle portait une robe en cuir d'où pendaient des chaines, comme pour mimer une armure. Le fendu de sa robe s'enroulait autour de ses jambes par ces mêmes liens. Elle avait des runes étranges tatouées sur son bras droit et sa jambe gauche, de la base jusqu'à l'extrémité des membres. Ses mains et son cou étaient parés de nombreux bijoux finement travaillés. Quant à son visage, elle me regardait d'un air sévère. Ses yeux rougeoyaient dans la pénombre, contrastant avec une peau extrêmement pâle. Ses lèvres étaient fines, pincées.
"Tssss ne me mens pas, hybride !"
Je fronçai les sourcils sans comprendre. J'ai toujours cru que j'étais une vampire. Cela faisait partie des nombreux sentiments internes que nous avions, Rose et moi, sans pouvoir le confirmer. Devant mon incompréhension, mon interlocutrice parut hésiter. Elle se redressa pleinement, puis retira sa lance de ma gorge. Elle planta le talon de celle-ci dans le sol. L'arme se tint droite sans que sa propriétaire ne la touche. Elle était magnifique, d'une beauté lugubre. Une lame noire d'obsidienne. Je pouvais y voir mon reflet tellement la pierre était pure. La hampe était faite d'ébène et des gravures dorées dans une langue qui m'était inconnue parcouraient l'entièreté de l'œuvre.
"Pourquoi être arrivée chez moi ?!"
"Hein ?"
Toujours aussi grâcieuse Sélénia.
Même si elle ne tenait plus son arme principale dans la main, elle portait un long poignard à la hanche. Ses doigts étaient serrés autour de la garde, même si elle ne l'avait pas sortie. A ma remarque, la femme explosa dans un rire clair. Bientôt, je vis des créatures apparaitre dans les fourrés. Ou plutôt, je voyais de grands yeux jaunes nous observer. Ils étaient énormes, et je ne parvenais pas à percer l'obscurité, bien que je crusse être parfaitement nyctalope.
"C'est mignon... mais pour une comparse ignorante, je vais faire une exception à mes principes. Dépose ton sac à dos à terre, ta veste aussi. Montre-moi que tu n'es pas là pour te battre."
Je tremblais encore alors que je laissais retomber mon sac au sol. A la vue de la peluche, elle se mit à rire de plus belle. Je commençais à ne pas apprécier cette femme. Quand ma veste tomba au sol, je levai les mains en l'air puis fis un tour sur moi-même. Le temps que je lui fasse face à nouveau, elle avait pris mon sac pour en observer le contenu. Elle récupéra le couteau, puis essaya de s'entailler la peau du pouce avec.
"Pfeu... même pas digne de me servir de cure-dents." dit-elle d'un air dédaigneux.
Ensuite, elle jeta l'arme improvisée au loin, fit un pas en retrait et haussa les épaules.

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Les faucheurs
FantasyDans ce monde post-apocalyptique, humains et autres espèces vivent ensemble. En harmonie ? Non, loin de là. Sélénia, une jeune femme au tempérament de feu et sa sœur jumelle l'expérimentent chaque jour. Elles survivent, tant bien que mal. Cependan...