Quand arrive la fin de journée, je suis éreintée. J'espère que pour le 8 mars nous aurons de meilleures suggestions, ou s'ils n'en ont pas, je serai ravie de leur en apporter. Ils ne pourront pas dire que je ne suis pas force de propositions.
Marie souhaite qu'on se retrouve au bar « des prés » qui se localise à l'entrée de mon quartier et il est littéralement en face de ma porte d'entrée, ce qui m'arrange autant que ça me dérange. Ce bar est connoté très populaire dans sa fréquentation. Il est très cosmopolite et Marie adore l'ambiance. Par bonheur, mon balcon donne de l'autre côté de mon entrée, je suis donc coupée un peu de cette agitation. La terrasse est vraiment sympa, construite en bois avec des matériaux de récup qui donne un esprit guinguette sans que ce soit à l'extrême puisqu'il reste populaire. Nous sommes inondées de plantes et on pourrait sans effort se croire dans un terrarium au vu de l'ambiance chaleureuse et de la différence de température entre dehors et cet endroit tropical. Le seul hic, et c'est sans aucun doute toujours le même : les mecs bourrés et relou.
Je me rends près d'Elsa qui m'explique qu'elle nous a réservé une table sur la terrasse, mais que Marie n'est pas encore arrivée.
— Tu connais les bouchons du centre-ville, elle ne devrait pas tarder.
— Oh non elle m'a transmis un message pour toi : elle s'est payée le camion poubelle.
Je roule des yeux, sa petite vengeance personnelle, j'imagine. Je ne peux pas lui en vouloir c'est contraire à ma règle sur le Karma. Je commande mon modeste apérol spritz et une pina colada pour ma cheffe. Demain, je télétravaille alors je n'ai aucun scrupule à boire de l'alcool. Je sais qu'à la fin de ce verre, mes joues auront déjà chauffé et seront rouges comme si je m'étais tapé tout un cubi de la même couleur.
J'en profite pour faire une introspection. Pas que je le veuille, mais je suis tant et si bien toquée que je me remets en question dès que je suis seule deux minutes que ce soit concernant mon corps, ma manière de penser mes réflexions ou encore émotionnellement, tout y passe. Je suis plutôt grande, 1m76, taille mannequin oversize quoi. Mes cheveux sont châtains et parfaitement indomptable, ils sont semi-bouclés, semi-paillasse. Le coiffeur doit me les sauver la semaine prochaine. J'ai arboré mon rouge à lèvres bordeaux, mon préféré qui place en valeur mes lèvres assez pulpeuses, comme chaque fois que je sors après le boulot. Il s'agit de mon unique touche de maquillage (oui, bon d'accord, ma mini C.C crème Erborian m'accompagne tous les jours).
Pour ne pas vous mentir, je me sens bien avec mes formes, j'ai toujours eu cette sensation qu'elles me protégeaient de la société extérieure. Elles sont mes petites bouées de sauvetage, elles sont réconfortantes et elles m'empêchent d'aller trop souvent à la salle de sport ou de manger qu'un seul carré de chocolat par semaine. Sans barguigner, je n'adhère pas aux standards de beauté. De facto, j'ai conscience que je les ai complètement intégrés, et qu'ils m'ont matrixée au même degré que tout le monde. D'ailleurs puisque j'essaie de m'habiller comme ces standards-là, sans le vouloir consciemment et sans forcément être à la recherche d'un 36. Ou de ressembler au mieux à une femme dans du 36.
— Alors, on est perdu dans ses pensées, les devis sont prêts ?
— Tu m'as fait peur et il est 19 h 30, je ne répondrais certainement pas à cette question.
— Je sais c'était pour te taquiner. On prend des tapas ?
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Misandrie, Délices et Pissenlits
Storie d'amorePas facile d'être Clotilde. Son 46 dans lequel ces petites poignées d'amour débordent, son mépris des hommes, son SMIC et ses pilules vous le disent : elle en a marre qu'on la prenne de haut parce qu'elle ne respecte en rien la catégorie sociale qu'...