1.Ne traîne pas

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Attention: Je ne publierai pas l'intégralité du roman sur Wattpad. Tu pourras seulement lire les vingt premiers chapitres du tome 1. 

La trilogie " On a tous droit à une seconde chance ? " sort en version éditée cette année.

D'ici là, bonne lecture.

Elisa

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                                                                                                 Cannes, 28 juin 2023

- Je vais me rafraîchir, dis-je discrètement à l'oreille de Marc.

Marc s'arrête de parler, tourne la tête et me regarde droit dans les yeux. Avec mes talons, on fait la même taille. Je souris en ajoutant :

- Je ne serai pas longue.

Marc vient de croiser l'homme qu'il voulait rencontrer ce soir. La raison pour laquelle nous sommes venus à cette soirée. Marc est avocat d'affaires, et ce petit homme replet, dégarni au regard vif possède la moitié de la Slovénie. Marc décolle sa main de mon dos. Je les laisse parler affaires.

Le gala se déroule dans un endroit sublime, un château médiéval sur les hauteurs de Cannes, transformé en musée.  Au moment de quitter la salle dédiée aux antiquités iraniennes, je me retourne vers Marc, nos regards se croisent.

Je le regarde avec mes yeux de biche innocents pour la dernière fois, puis sors.  Dans la galerie voûtée qui mène à la cour intérieure du château, je marche à vive allure, je regarde à peine les œuvres exposées autour de moi.

Dans la cour, l'air du soir et l'odeur des pins parasols me calment. J'essaie de ne pas me tordre la cheville sur les pavés en la traversant. Arrivée aux vestiaires, je présente mon ticket. Ma main tremble. Mon cœur bat si fort, que je me demande si l'hôtesse l'entend tambouriner dans ma poitrine. Je souris. 

J'ai laissé un sac en arrivant. Marc était étonné quand il m'a vue le sortir du coffre, mais quand je lui ai montré mes Converse, il a compris pourquoi je l'avais pris. Marc sait très bien que je n'ai pas l'habitude de porter des talons aussi hauts.

Et ça ne le gêne pas, il aime ma discrétion, c'est une des facettes qu'il préfère chez moi. Il ne sait même pas pourquoi je ne cherche jamais à attirer l'attention. 

Je porte la plupart du temps un jean, un t-shirt et des baskets pour aller à la fac. Alors m'offrir une robe bustier, moulante, fendue sur toute la longueur de la jambe, des sandales aux talons vertigineux avait de quoi m'étonner le jour où j'ai ouvert ses paquets à la maison.

Il y a beaucoup de monde, les invités arrivent encore. Je prends mon sac et quitte les vestiaires. 

Je ne me sens pas à ma place au milieu de toutes ces personnes chics. J'évite de croiser leurs regards et me précipite aux toilettes. Quand je vois la queue qui m'attend, mon cœur s'arrête de battre. Je ne sais pas quoi faire, je n'ai pas le temps d'attendre. Je dois aller ailleurs.

Or je ne vois qu'un endroit où je peux espérer un peu de tranquillité.  Qui chercherait à gravir une centaine de marches en tenue de soirée et talons inconfortables ? Je fonce vers le donjon.

Au pied des escaliers, je retire mes chaussures, puis cours en gravissant les marches de la tour. La fente de ma robe me permet de faire de grandes foulées. 

Il fait sombre dans ce donjon, j'avais raison, je ne croise personne. Je n'entends que ma respiration haletante en montant. Si j'avais assez de place pour me changer dans les escaliers, je le ferais car je n'en peux plus, je suis à bout de souffle. 

Enfin, je vois de la lumière. Je suis hors d'haleine quand j'arrive au sommet de la tour de guet. Le vent m'accueille avec férocité, mes cheveux s'envolent.

La lumière déclinante, teintée de rose m'avertit que la nuit n'est pas loin. Ça me rassure. Seule au sommet de cette tour, j'ai l'impression que rien ne peut m'arriver, c'est idiot, mais c'est la sensation que je ressens. 

Je sors mes Converse du sac, les jette au sol, puis je commence à enfiler directement mon jean sous ma robe. Au moment d'ouvrir la fermeture éclair au dos de ma robe, elle coince. Je suis trop serrée, c'est pour ça. J'inspire profondément, puis retente de me débarrasser de cette foutue robe. Je ne comprends pas, elle résiste encore.

Soudain j'entends :

- Besoin d'aide ?

Au début, je n'en crois pas mes oreilles, puis je tourne la tête vers l'origine du son. 

Un homme s'approche. Il est jeune, grand, en costume, la cravate desserrée au col. Il me regarde sans expression particulière. 

Ou est-ce mon cerveau qui n'est pas capable d'en déchiffrer le sens à cet instant ? 

L'espace qui nous sépare se réduit inexorablement. Qu'est-ce qu'il veut ? Je ne sais pas pourquoi je ne l'arrête pas en le voyant se diriger droit vers moi d'un pas décidé. Peut-être simplement parce que j'ai besoin de lui. Il se frotte les mains l'une contre l'autre. Je crois qu'il est beau, mais je n'ai plus les idées claires. La situation est trop gênante.

Sans attendre de réponse, l'inconnu dégage mes cheveux de mon dos, je sens ses doigts sur ma peau nue, j'en frémis d'étonnement. Je rêve ou quoi !? 

Il descend la glissière de la fermeture éclair avec calme. Ma robe s'ouvre. Mes bras la retiennent de tomber, puis je sens qu'il recule. 

Je me retourne. L'inconnu a déjà tourné les talons. Au moment de s'engouffrer dans la cage d'escalier, nos regards se croisent une dernière fois.

- La vue est encore plus belle que je ne le pensais, dit-il avant de disparaître dans la tour.

Je ne réalise pas bien ce qu'il vient de se passer, j'attends quelques secondes, le regard fixé vers la sortie, au cas où ce mec étrange aurait des envies de se rincer l'œil en douce. 

Son image s'est étonnamment gravée sur ma rétine, je revois son grain de beauté sur le côté gauche de sa pommette, sa mâchoire intransigeante, son nez légèrement bosselé, et ses yeux. Des yeux dans lesquels on plongerait sans un regard en arrière.

Je n'ai jamais croisé ce genre d'homme, beau, jeune, blasé, l'air d'en avoir rien à foutre d'être là, surtout à ce genre de soirée. Il bosse dans quoi ? Il n'y a que des millionnaires ce soir. 

Je suis bête ! C'est un gigolo. Une russe a dû l'amener avec elle. Sur la côte d'Azur, il y en a de plus en plus. Cette révélation me fait l'effet d'un coup de fouet, je me remets en action. 

Je récupère mon t-shirt dans le sac, puis retire complètement ma robe. Je remonte mon jean, m'assieds par terre, enfile mes Converse, puis attache mes cheveux en queue de cheval avant de zipper mon sweat à capuche. 

J'enfourne ma robe et mes talons dans le sac. Je me relève et cours. je dévale aussi vite que je peux les escaliers sans me rompre le cou.

Une fois en bas, je remonte la capuche de mon sweat noir, baisse la tête et rase les murs qui délimitent la cour pavée. J'essaie de passer la plus inaperçue possible.

Je ne sais pas si Marc me cherche déjà. J'entends les invités qui profitent de la soirée. Je marche sans me précipiter, le corps légèrement incliné comme pour me rapetisser.

J'ai une allure de voleuse avec ma capuche et mon sac de sport à la main. Je récupère mon téléphone et fais comme si je discutais au téléphone pour avoir l'air moins louche. 

Au moment de passer devant les vigiles postés à l'entrée du musée, je dis d'une voix fatiguée : j'ai fini mon service, je rentre. A tout maman.

Puis sors, le cœur battant, la tête bouillonnante, les mains moites.

On a tous droit à une seconde chance ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant