Le 24 Pluviôse 922 - 2

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Me revoilà ! Il y avait pas mal de clients, mais tout s'est bien passé au bar, et puis Hazem m'a fait remarquer, pour mon carnet, que je pouvais aussi utiliser d'autres points et il me les a tous expliqué : point virgule, double point, point d'exclamation, point d'interrogation... Il y en a tellement ! Je suis heureux de pouvoir écrire ce journal et d'apprendre à mieux le tenir.

Je veux maintenant revenir à la vente. La personne qui m'a achetée, c'était Maîtresse Lucille. La première chose qu'elle a faite est de me faire mettre contre le mur, le dos face à elle. Ça m'a encore plus fait peur, mais elle m'a posé des questions très simples, en fait... C'est juste qu'à l'époque, je ne pouvais pas le comprendre. Hormis une tape sur la tête, Lara ne m'a fait aucun mal. Elle m'a ensuite emmenée dans un bar - Le Geai Flamboyant - où elle m'a dit de me présenter à Arminus. Maintenant que j'y repense, ça devait être assez drôle et triste à voir en même temps ! Je me souviens que Karil était présent à ce moment-là mais je n'osais pas lui parler parce que je n'avais pas reçu d'autorisation de le faire. Je me suis présenté comme on me l'a appris, et puis j'ai attendu les ordres d'Arminus. Sauf qu'Arminus ne voulait pas me donner d'ordre, seulement faire en sorte que je sois bien accueilli... il a été très surpris et il m'a tout de suite demandé de quoi j'avais besoin. Le plus difficile est qu'il ne me considérait pas comme un esclave qui devait lui obéir en tout point, mais comme quelqu'un qu'il aidait à retrouver sa liberté. Sauf qu'à l'époque, je ne pouvais pas imaginer être libre. Je pensais - parce qu'on me l'avait appris, que les esclaves et les hommes libres étaient nés en tant que tels et qu'ils ne pouvaient pas changer de situation. Alors quand Arminus m'a dit tout ça, j'étais perdu. Je ne savais pas quoi répondre à part acquiescer comme un bon esclave.

Les jours suivants, j'ai été mis au travail avec une certaine Rose. Elle me faisait beaucoup de remarques, mais je pense que c'est aussi parce que j'étais trop respectueux à son goût... avec elle, j'ai appris le métier de cordonnier. Je savais déjà filer, tisser et un peu coudre comme j'avais appris à le faire quand j'étais enfant, mais j'avais tout à apprendre.

Et puis, je me souviens que le lendemain soir, on m'a touché les mains et l'épaule. Maintenant, je sais que c'était gentil de leur part, que c'était pour tenter de me rassurer, mais ça m'a refait penser à quand j'étais chez M et je me suis souvenu de tout. Le médecin qui devait m'aider après qu'on nous ait sorti de la maison de mon ancien maître n'avait pas réussi à me faire accepter d'être touché. On peut dire que j'étais paniqué à l'idée d'un contact tactile avec quelqu'un... Même si je voulais faire de mon mieux pour le cacher et être un esclave parfait...

Aussi, les premiers jours au Geai Flamboyant, je n'arrivais pas à comprendre pourquoi on se souciait de moi et de mes besoins ; dans ma tête, c'était moi qui devait répondre aux leurs... et aujourd'hui, je me rends compte que je suis tombé sur des maîtres très bienveillants. Une autre chose qui m'a marqué, c'est quand Arminus m'a dit qu'il ne me punirait jamais. J'étais puni tout le temps auparavant alors je faisais de mon mieux pour obéir à tous les ordres et à être parfait...


Journal de CotonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant