Prologue

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L'innocence et le démonique


- Mademoiselle Gray, je vais vous reposer la question une dernière fois : avez-vous tué Monsieur Allargon durant la nuit du 23 mai ?

Mes mains sont attachées par ce morceau de ferraille depuis maintenant 12 heures. Mes fesses commencent à me faire mal à cause de cette foutue chaise en métal sur laquelle je suis assise, toujours depuis 12 heures. Les menottes qui me maintiennent ligotée à cette table, aussi vide que mon regard, sont d'une chaleur mordante, comme si ma chaleur corporelle venait de rendre ce morceau de ferraille aussi chaud qu'un soleil vous brulant la peau en un début d'après-midi en été. Est-ce qu'il fait beau aujourd'hui ? Est-ce qu'il pleut ? Ça, je ne le sais pas. Tout ça à cause de cette pièce exiguë dans laquelle je me trouve, accompagnée d'un agent de police pas si dégueulasse que ça. Mais bon, ici, les agents de police sont mes ennemis alors la seule chose que je pourrais m'autoriser, la maintenant tout de suite, serait une bonne baise avant de passer 12 autres heures à croupir ici, dans ce poste de police new yorkais.

Un léger rictus aux lèvres, la tête haute, je garde la bouche fermée. Je sais que derrière ce plexi-glace qui se trouve à ma droite, d'autres individus m'observent, se demandant quand je vais oser ouvrir ma gueule pour leur donner la réponse qu'ils attendent. Ils peuvent aller se faire foutre, tous autant qu'ils sont, parce que je ne dirais rien. Même si on venait à utiliser les pires tortures, je ne parlerais que si j'en ai envie. Et ça leur fou bien les boules, parce qu'ils connaissent mon passé. Oh que oui ils me connaissent. Ils savent tous les détails croustillants qui m'ont amené ici, devant eux avec cette question à 100$ : suis-je coupable ? Je pense que la majorité de la ville de New York pense que je le suis. Les journalistes défoulés en face du poste de police doivent aussi se raidir d'excitation dans l'attente de ma réponse. Je tiens une bonne paire de boules dans une seule paume de main. Et mon dieu, ça me rend heureuse d'avoir un certain pouvoir. Mais, je pense aussi que les autres psychopathes vus comme mes pairs pensent que je suis innocente. Pourquoi ? Parce que je n'ai pas la gueule d'une tueuse. Enfin, pas selon eux. Apparemment, je serais une capricieuse cherchant à tirer de l'attention sur un meurtre non commis tout ça pour me tirer une certaine vedette qu'un bon nombre de psychopathe n'aurait pas. Ce sont quelques tweets que l'agent-pas-si-dégueulasse m'a montré. Soit. Je laisse quiconque juger ma capacité de tueur quelqu'un ou non.

Vous aussi vous aimeriez le savoir, si je suis coupable ou non. Ça vous tend de vous dire qu'une simple réponse à trois lettres mette autant de temps à être divulguer. Et ça me fait d'autant plaisir, car j'ai aussi le pouvoir sur vous. Alors, comment une simple fille comme moi, de 26 ans, née dans un quartier plutôt cosy, avec des parents mariés, un frère et de quoi réussir, peut se retrouver ici, face à un choix de réponse qu'elle n'aurait même pas pensé avoir à faire à 5 ans.

Ce jeune monsieur a été retrouvé mort, à son domicile dans un bain de sang épouvantable. Selon les photos que l'on a posé sur la table juste en face de moi, les éclaboussures ont peint les murs de la maison d'une manière que je ne serais décrire. Artistique ? Ou atroce ? Plusieurs qualifications ont été utilisées : démembré, tranché, torturé, séquestré, et j'en passe. Dans quel monde sommes-nous, hein ? Des frissons de dégoûts ont franchi la passerelle de mes bras, affichant mon choc face aux photos si réalistes.

Ais-je tué ce Monsieur Allargon ? Suis-je coupable de ce meurtre ? Ou suis-je tout simplement accusée à tort pour la simple raison que je n'ai jamais assez su ouvrir ma gueule pour afficher mes propres pensées ?

Que diriez-vous de me laisser vous guider dans mon histoire afin que vous compreniez par vous-même la réponse ? Je vais répondre à votre place : Faites-le. Laissez-moi vous donner une certaine saveur de ma vie, très intéressante d'ailleurs, avant que vous puissiez savoir si je suis une meurtrière, une psychopathe ou une innocente.

Une fois que vous tournerez la page suivante, aucun retour en arrière ne sera possible car vous aurez choisi par vous-même de vous engager sur le radeau au bord du lac qui va vous mener droit vers la cascade. La question est telle : la cascade fait-elle 30 centimètres ou 20 mètres ?

Tic-tac, dépêchez-vous, j'ai une réponse à donner.

Coupable ou Innocente ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant