Ce fut dans un état complètement second que Morgane passa la porte de la DIPJ, ignorant royalement l'agent d'accueil qui la sommait de venir remplir le registre. Elle continua son chemin vers l'open-space qu'elle avait aperçu près de la salle d'interrogatoire lorsqu'elle était venue ici, l'inquiétude lui broyant la poitrine, la rage au ventre et les larmes aux yeux. Ce fut dans le couloir de la salle d'interrogatoire qu'elle aperçut celui qu'elle cherchait. Le flic. Celui à cause de qui sa fille avait disparu. Le nez plongé dans un dossier, il ne l'entendit pas tout de suite arriver. Morgane sentit alors son cœur exploser sous le trop plein d'émotions et, dans un élan désespéré, se jeta sur lui en lui martelant la poitrine de coups de poings. Surpris, le commandant se dégagea bien vite et lui attrapa les poignets pour l'arrêter.
- Mais enfin, madame Alvaro ! On peut savoir ce qui vous prend ?, gronda t-il
- TAISEZ VOUS ! C'EST DE VOTRE FAUTE SI ILS L'ONT EMMENÉE, hurla Morgane
- De quoi vous parlez ?
- DE MA FILLE, ILS ONT MA FILLE PUTAIN !
Eberlué, le flic desserra sa prise, ce qui permit à Morgane de se dégager. Face au commandant, le visage défait, le corps tremblant, les yeux brillants de larmes, elle tenta vainement de reprendre une respiration normale, se faisant violence pour ne pas mettre à terre celui qu'elle considérait comme le coupable de la situation. Une fois qu'il eut assimilé l'information, le commandant la saisit doucement par le bras et les enferma tous les deux dans la salle d'interrogatoire.
- Racontez moi tout, en détails. On va la retrouver votre fille.
- Non..., sanglota la belle rousse, si je vous dit tout ils vont... ils vont la tuer...
- Je ne vais pas enregistrer notre conversation, mes collègues ne seront pas au courant, et pour tout le monde ici, vous serez venue passer vos nerfs sur moi.
Morgane le jugea un instant du regard, puis vaincue, se laissa tomber sur le siège en plastique. Elle savait que ce type était sa dernière chance. Si quelqu'un pouvait l'aider à retrouver Théa, c'était lui, et de toute façon, elle n'avait plus rien a perdre.
- Le jour où le Belge s'est échappé, Romain est rentré en me disant qu'il avait fait une grosse connerie. Y'a quinze ans, il lui a emprunté 50 000 euros, pour les jouer au casino avec mon père. Faut qu'vous sachiez que mon père est un putain de compteur de cartes, p'tet le meilleur. Evidemment, ils ont gagné un gros pactole. Un million. En cash. Ils devaient rembourser 100 000 balles au Belge. Sauf qu'il a pris perpet ce soir là, alors ils ont gardé le pognon. Quand Romain est rentré, qu'il m'a dit qu'il avait gagné autant, j'étais juste fière de lui, j'aurais jamais cru qu'il pourrait me ramener de l'argent gagné illégalement à la maison... Mais il l'a fait, et moi bah, j'me suis pas méfiée. Puis l'autre soir, celui où le Belge s'est barré de prison, il est rentré couvert de blessures et il m'a tout raconté. Il m'a dit qu'il devait 500 000 euros au Belge et qu'on devait rien dire aux flics, que sinon il nous butterait tous... y compris Théa... chez ma mère j'ai retrouvé ce mot... "Il ne fallait pas parler à un flic"... et maintenant...
Morgane dut prendre une longue inspiration avant de terminer d'une voix blanche :
- Maintenant ils ont ma fille.
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Adam se laissa à son tour tomber sur un siège, sous le choc des révélations de la belle rousse. Il avait toujours pensé que Romain était le complice du Belge, pas qu'il lui devait quelque chose. Adam se força toutefois à réfréner la colère qui l'avait envahi à la pensée que Destat avait mis sa famille en danger par appât du gain. Il comprenait un peu mieux les réactions de la rouquine et se mit à réfléchir intensément. Du côté du Belge, ils n'avaient rien pour le moment mais le fait qu'il ait enlevé cette petite pouvait très bien le conduire à sa perte. Si ils retrouvaient Théa Alvaro, ils auraient de grandes chances de retrouver le Belge. Le tout était de la retrouver avant qu'il ne lui arrive malheur. Tenon avait appris d'une manière ou d'une autre que Morgane et lui s'étaient parlés, en revanche, il n'avait probablement pas dû entendre la conversation, sinon il aurait su qu'elle ne lui avait rien dit sur lui, ou sur les magouilles de Destat. Il avait donc très probablement placé la rousse sous surveillance, et, si tel était le cas, ils avaient un coup d'avance sur lui. Personne ne savait que la rouquine lui avait dit la vérité, en revanche, lui pouvait chercher à identifier l'homme qui la suivait et peut être, réussir à retracer ses mouvements pour trouver son quartier général. Il pouvait également observer toutes les caméras de surveillance autour de la maison de Mme Alvaro senior et tenter de trouver le lieu où sa petite fille avait été amenée. Avec un peu de chance, au moins une de ces deux pistes le mènerait au Belge et, surtout, si il agissait rapidement, à l'adolescente, saine et sauve. Il se leva de sa chaise, prêt à agir et lança à la belle rousse :
- Madame Alvaro, voilà ce que...
- Morgane, le corrigea la rouquine, s'il vous plait. Juste entre nous.
Comprenant qu'elle avait besoin de soutien émotionnel, sans toutefois oser vraiment le demander, il s'approcha d'elle et lui posa une main rassurante sur l'épaule, plongeant son regard dans ses yeux océans.
- Morgane, reprit il d'une voix douce, j'ai peut être une idée pour retrouver votre fille, mais pour ça j'ai besoin de vous savoir en sécurité. Personne ne doit savoir ce que vous m'avez dit, officiellement, vous vous en êtes pris à moi avec violence, alors que j'essayais de vous interroger. A cet effet je vais vous placer en garde à vue, autrement dit en cellule, et dès que cette affaire sera close, j'effacerai cet "incident" de votre casier.
- Je... pardon ?
- Je pense que vous êtes suivie. Si vous sortez d'ici et rentrez chez vous, la personne qui vous suit pensera probablement que vous avez parlé, en revanche si je vous place en cellule, vous serez protégée, au moins un temps. Personne ne se risquera à kidnapper une personne en plein milieu de la DIPJ. Surtout pas le complice d'un évadé de prison. Entre temps, j'espère avoir une piste sérieuse pour votre fille.
- C'est vraiment la seule solution ?
- C'est la seule que j'aie pour le moment. Par contre..., ajouta le commandant en sortant une paire de menottes.
- J'vais vraiment finir par croire que vous aimez me passer les menottes hein, grommela Morgane en se retournant de mauvaise grâce.
Adam sourit, sans un mot, admirant la force mentale que possédait cette femme pour réussir à plaisanter alors que sa fille était introuvable. Il lui passa les bracelets et se recomposa un visage fermé, la trainant presque jusqu'en cellule, malgré le fait qu'elle se débatte comme une diablesse et ordonna à un agent de la surveiller étroitement. Il fila ensuite droit vers son bureau pour éplucher les vidéosurveillances qui l'intéressaient, priant intérieurement pour qu'il trouve quelque chose de concret, quitte à y passer la nuit...
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Un rayon de soleil
FanficEt si Agnès n'avait jamais prévenu Devos des plans de Romain pour obtenir de l'argent ? Si l'idée de Serge avait fonctionné ? Si le Belge avait été condamné à perpétuité avant que Romain ne lui rende son argent ? Si Romain avait pu offrir un apparte...