Valentina

Rencard

- Bonjour Tina, assieds toi. Je souhaite dans un premier temps, te présenter mes condoléances. Cette période est difficile et tu mettras sûrement du temps avant de passer à autre chose.

Passer à autre chose ? Mais il est malade ou quoi ? Qui passe à autre chose après ça ?

- Je sais ce que tu penses, je ne veux pas dire oublier mais plutôt, accepter. C'est en ça que tu pourras tourner la page. Accepter qu'elle ne soit plus là, accepter de vivre sans elle...

Je le stoppe d'un revers de la main. Il est hors de question qu'il continue sur ce terrain là, car je n'ai même pas encore commencé à réaliser son absence.

- Bien, pardon. C'est peut être un peu trop tôt, tu as raison. Angélique m'a expliqué que tu ne parlais plus depuis ce qu'il s'est passé à part par messages. Prend cette feuille et mon stylo comme ça ce sera plus simple de communiquer.. Pourras tu me répondre par écrit ?

Je lui fais un signe de tête positif.

- Tu as essayé de chuchoter ? Tu as réussi ? poursuivit-il après une autre affirmation.

"Presque" lui écrivis-je.

- D'accord, nous sommes sûrement sur un cas d'aphonie psychogène. C'est différent du mutisme total ou le patient ne peut pas chuchoter du tout. Cela arrive parfois suite à un choc émotionnel, et ce n'est pas définitif. Tu vas devoir consulter un orthophoniste. Généralement, la perte soudaine de la voix et ses origines sont dans l'inconscient du patient, mais toi, nous savons d'où elle provient. C'est bon signe, la moitié de la guérison est déjà entamée. Je vais t'orienter vers un ami à moi et  je l'appelle après ton départ pour te prendre un rendez-vous.  Je t'enverrais un message avec l'heure, le jour et son adresse. On part là-dessus ?

"Oui".

- Parfait. Saches que cela peut se guérir en quelques semaines, voir quelques années dans quelques situations mais je doute que ce soit le cas pour toi.

Il marque un temps de pause et reprend.

- Sinon, à part ça, oserais-je te demander si tu vas bien ?

Je le regarde, impassible. Comment je vais ? Très bonne question.

- Excuse moi, je me doute que ça ne peut pas vraiment aller. Je ne peux rien de plus pour toi, malheureusement si tu ne peux pas parler, à part, te souhaiter beaucoup de courage. La séance d'aujourd'hui est finie pour moi, on se tient au courant pour la suite d'accord ? Une dernière chose, tu m'as fais comprendre un peu plus tôt que tu avais essayé de chuchoter. Si c'est le cas, continues le plus possible et bois beaucoup d'eau pour éviter les dégâts sur tes cordes vocales et hydrater un maximum ta gorge.

Je lie mes deux mains en signe de remerciements et je me lève.
- Au revoir Tina. Prends soin de toi.

Je ne m'attendais pas à vivre cela un jour. Qui l'eut cru ? Tina, aphone. Sûrement pas moi ! Je sais que ça ira mieux, de toutes façons, car je n'ai pas le choix, il m'est impossible de rester éternellement dans le silence.

Je ne tarde pas à recevoir un message de Samuel m'indiquant que mon rendez-vous aura lieu dans deux jours, juste avant le week-end, ainsi que toutes les informations nécessaires pour m'y rendre. Il ajoute que c'est le plus rapide qu'il ai pu négocier au vu du nombre explosif de demandes. Je le remercie et tourne la clé dans la serrure pour pénétrer dans ma demeure, ce lieu devenu aussi anxiogène que rassurant.

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- Avec ce que nous avons constaté aujourd'hui, peu de séances suffiront à vous guérir. Le plus gros du travail devra être fait chez vous, à l'aide de votre entourage. En vous remerciant.