Chapitre 3 - Lucy

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Il a fermé la portière assez fort pour faire claquer mes molaires entre elles et relancer mon mal de tête. Cela faisait trois ans. Trois années solitaires, vides, remplies de chagrin depuis que les sœurs Lynch étaient passés d'un trio à un duo. J'étais proche de Leah, elle était génial et elle avait toujours été mon modèle en termes de dur à cuire, mais Lauren était ma moitié, au propre comme au figuré. Nous étions de vrais jumelles, elle était la lumière contre mon obscurité, la facilité contre ma difficulté, la joie contre ma colère, la perfection contre mon côté bien, bien vrillé, et sans elle je ne suis que la moitié de la personne que je pourrais jamais être. Cela faisait trois ans que je l'avais appelé au milieu de la nuit pour qu'elle vienne me chercher à une fête pourrie parce que j'avais trop bu pour conduire ma moto. Cela faisait trois ans qu'elle avait quitté l'appartement que nous partagions pour venir me chercher, sans poser de questions, parce qu'elle était comme ça.

Cela faisait trois ans qu'elle avait perdue le contrôle de sa voiture sur la route du périphérique parisien, pluvieuse et glissante, et s'était fait percutée par un semi-remorque qui roulait bien au-dessus de la limite autorisée. Cela faisait trois ans que l'on avait enterré ma sœur et que ma mère m'avait regardé, les larmes aux yeux, en me lançant à bout portant: «Ça aurait dû être toi », alors qu'ils descendaient le cercueil de Lauren. Cela faisait trois ans, et le simple fait de prononcer son nom a suffi à me mettre à genoux, surtout venant de la seule personne au monde que Lauren avait aimé autant qu'elle m'aimait.

Lauren était tout ce que je n'étais pas : maquillée avec soin, bien habillée, soucieuse de faire des études et de construire un avenir stable. La seule personne sur cette planète assez bien et assez classe face à toute sa magnificence était Daniel Campbell. Ces deux-là avaient été inséparables depuis la première fois qu'elle l'avait ramené à la maison, alors qu'il avait quatorze ans et essayait de fuir la forteresse du camp Campbell. Elle répétait qu'ils étaient juste amis, qu'elle aimait Dany comme un frère, qu'elle voulait l'aider à échapper à la pression de son horrible famille, mais sa façon d'être avec lui était pleine de respect et de sollicitude. Je savais qu'elle l'aimait, et comme tout ce que Lauren faisait était bien, Dany est rapidement devenue comme un membre de la famille. Bien que cela m'exaspère au plus haut point, il était celui qui comprenait vraiment, profondément, ma douleur de l'avoir perdue.

Il m'a fallu quelques minutes pour reprendre mes esprits, puis j'ai avalé le reste de mon café et j'ai ouvert la portière. Je n'ai pas été surpris de voir une grande silhouette faire le tour du SUV tandis que je sortais de la voiture de sport.

Ma sœur faisait quelques centimètres de plus que moi et était construit sur le modèle de la parfaite guerrière, une vraie amazone des temps modernes. Ses longs cheveux châtain foncé aux reflets roux étaient tirés dans un chignon, à la mode militaire, et ses yeux bleu pâle - la même teinte glacée que ceux de notre père - semblaient fatigués au-dessus de son sourire forcé. J'ai émis un sifflement, car son bras gauche était plâtré et tenu en écharpe et elle avait également une attelle sur un pied.

-Tu as l'air en forme, soldat.

Elle m'a tirée contre elle avec son bras valide, et j'ai eu mal pour elle en sentant les bandages sur son flanc, signe de côtes cassées ou abîmées.

-Je suis aussi en forme que j'en ai l'air. Toi tu as l'air d'une cinglée en sortant de cette voiture.

-De toute façon, j'ai l'air d'une cinglée quand je suis avec ce mec.

Elle a explosée de rire et a passée une main dans mes cheveux teints.

- Dany et toi jouez toujours aux ennemis mortels?

-On est plutôt des connaissances mal à l'aise. Il est toujours aussi coincé et dans le jugement. Pourquoi tu ne m'as pas appelée ou envoyée un message pour me dire que tu étais blessée ? Il a fallu que ce soit lui qui me le dise.

Elle a lancée un juron alors que nous nous dirigions lentement vers la maison. Cela m'a inquiétée de voir les efforts qu'elle devait fournir pour marcher, et je me suis demandée s'il y avait des dégâts plus sérieux que ceux qui étaient visibles à l'œil nu.

-Mon coéquipier et moi étions en train de poursuivre un vaisseau ennemi quand tout d'un coup le réacteur s'est éteint et les deux moteurs de notre Dassault sont tombés à sèches. J'ai perdue le contrôle. On s'est mis à tombés rapidement, j'étais plaquée vers l'avant et j'arrivais pas à choper la poignée d'éjection. J'ai demandé à Max de le faire et il y est arrivé, mais dans la foulée j'ai reçu des débris de l'explosion dans l'épaule, deux côtes cassées et une fracture à la cheville droite.
Max lui n'a pas eu cette chance, quand son siège a été éjecté il s'est pris les reste du toit sur la tête, traumatisme crânien, il est mort sur le coup.

-Putain.

-J'ai perdue connaissance quand les secours sont arrivés. Je suis restée une semaine à l'hôpital avec la tête en vrac, et quand je me suis réveillée ils devaient opérer mon épaule, donc j'étais droguée. J'ai appelée Maman et je me suis dit qu'elle te tiendrait au courant mais j'ai appris que, pour changer, tu étais injoignable quand elle appelait.

J'ai haussée les épaules et ai tendue une main pour la stabiliser car elle chancelait un peu sur les marches de la porte d'entrée.

-J'étais occupée.

-Tu es têtue.

-Pas tant que ça, je suis là, non? Je ne savais même pas que tu étais rentrée jusqu'à hier.

-La seule raison pour laquelle tu es là, c'est parce que le garçon de cette maison est décidé et déterminé à rassembler cette famille, peu importe que ce ne soit pas la sienne. Tu vas rentrer et être gentille, sinon, je te botte le cul, bras cassée ou pas.

J'ai marmonné quelques mots et suivi ma sœur toute cassée dans la maison. Ça promet!

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[P!NK - BUT WE LOST IT, EN BANDE SON]

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