Chapitre 2: La soirée d'anniversaire

49 5 0
                                    

Alice tient à ce que nous nous préparions ensemble pour sa soirée d'anniversaire. Le jour dit, après le déjeuner, elle passe me prendre dans sa veille Volkswagen déglinguée et me conduit chez elle. Tout en roulant beaucoup plus vite que la vitesse autorisée, elle me raconte qu'elle vit seule en ville, dans un deux pièces. Cela me surprend énormément, car je l'aurais plutôt vue chez ses parents dans une confortable maison de banlieue. Je l'imaginais gâtée et choyée, comme je l'avais été moi-même, et cet élément la rend soudain plus inintéressante, plus complexe que je ne l'aurais pensé. Visiblement, nous avons un certain nombre de points communs.

J'ai envie de la bombarder de questions. Où sont ses parents? Comment fait-elle pour payé sont loyer? Lui arrive-t-il d'avoir peur? Souffre-t-elle de la solitude? Mais je m'abstient de l'interroger. J'ai mes propres secret et, par expérience, je sais qu'en posant des questions je risque surtout d'en susciter. Mieux vaut ne pas me montrer trop curieuse avec les autres.

Son appartement se trouve dans un immeuble en brique très quelconque. L'escalier est sombre et peu engageant, mais quand elle ouvre la porte de chez elle, hors d'haleine après avoir monté quatre étages, nous nous trouvons dans une pièce chaleureuse.

Les murs couleur orange brûlée sont décorés de grands tableaux abstraits aux couleurs vives. Un tissu rouge sombre recouvre les deux canapés. Immense et profonds, sur lesquels sont jetés des coussins aux motifs ethniques. Des bougies occupent toutes les surfaces horizontales.

"Et voici mon humble demeure! s'exclame Alice. (Elle m'entraîne à l'intérieur et me regarde, guettant ma réactions.) Comment la trouves-tu? J'ai tout fait moi-même. Tu aurais vu comment c'était sinistre quand je me suis installée ! C'est fou ce que la couleur peut changer une pièce. Il suffit d'un peu de créativité et de peinture.

- Formidable".

Je ne peux m'empêcher d'éprouver un pincement de jalousie. L'appartement d'Alice est beaucoup plus branché que celui où j'habite.

"C'est vrai il te plaît?

- J'adore.

- Tant mieux ! Parce que j'espère bien que tu viendras me voir souvent. On papotera et on échangera nos petit secrets toute la nuit"

On dit que les gens dotés d'un grand charisme savent vous donner l'impression que vous comptez plus pour eux que n'importe qui. Avec Alice, je suis en train de comprendre ce que cela signifie. J'ignore comment elle s'y prend - quelqu'un d'autre se serait montré insistant -, mais quand Alice s'intéresse ainsi à moi, je me sens comprise et cela me réchauffe le cœur.

Pendant un bref instant de folie, je me dis que je vais lui révéler mon secret. J'imagine très bien la scène: Alice et moi dans cette pièce, heureuse, grisées et aussi un peu mal à l'aise, comme on l'est lorsqu'on s'est fait une nouvelle amie, une amie intéressante. Je pose la main sur la sienne pour montrer que je suis sur le point de lui dire quelque chose d'important, puis je lui dis tout d'un trait, sans croiser son regard. Et lorsque j'ai terminé, elle se montre compréhensive, chaleureuse et indulgente, comme je l'ai espéré. Elle me serre dans ses bras. Tout est bien. Je me sens légère, débarrassé de mon secret. Je suis libre.

Mais ce n'et qu'un rêve éveillé. Un fantasme absurde. Je me tais.


Je suis installé comme d'habitude en jean, botte et chemise, et j'ai apporté de quoi me maquillé avant la soirée, mais Alice insiste pour que je mette une robe. Elle en a plein ses placards, de toute les couleurs, de toute les longueurs, de tout les styles. Il y en à au moins une centaine, dont certaine ont encore leur étiquette. Je me demande où elle trouve l'argent pour les acheter.

La beauté du Mal •C.H&L.TOù les histoires vivent. Découvrez maintenant