Chapitre 3: L'appel d'Helen

33 5 0
                                    

Après la soirée d'anniversaire d'Alice, je constate que l'on est plus sympa avec moi au lycée. Certains élèves, que je ne reconnais pas, m'adresse des sourires et signes de tête dans les couloirs, et quelques-uns me lancent même des "Hé, Katherine !" alors qu'ils n'ont aucune raison de connaitre mon prénom. Alice vient me rejoindre à l'heure du déjeuner. Elle s'assoit à côté de moi et me fait rire en me racontant des potins sur des personnes dont j'ignore presque tout. Cela m'amuse et je suis contente de n'être plus seule désormais.

Je ne cherche pas à savoir pourquoi elle tient à me fréquenter. Après tout, moi aussi, j'ai été quelqu'un dont on cherchait la compagnie et suis habituée à ce que l'on m'aime. Alice veut être mon amie. Elle semble apprécier ma présence et elle est suspendu a mes lèvres quand je parle. Je lui en suis reconnaissante, c'est flatteur pour moi. Pour la première fois depuis la mort de Rachel, j'éprouve un sentiment proche du bonheur.

Le lendemain de la fête, je l'appelle pour l'inviter le samedi soir. J'habite chez Vivien, ma tante paternelle. C'est pratique. Vivien est chaleureuse et facile a vivre, et, grâce à elle, j'ai pu quitter Melbourne et finir ma scolarité dans un lycée où personne n'a entendu parler ni de Rachel, ni des sœurs Boydell. Je suis seule le plus souvent, car Vivien est fréquemment en voyage d'affaire et, le week-end, elle part avec des amis. Elle m'encourage tout le temps à faire venir du monde dans l'appartement. Visiblement, elle trouve bizarre que je ne le fasse pas, mais je suis habituée à la solitude et j'aime être libre de ce que je veux manger, regarder, écouter.

"Je nous ferai à dîner, dis-je à Alice

- J'espère que tu es bonne cuisinière !

- C'est l'un de mes talents secrets.

- Secrets, hum... (Elle reste quelques instants silencieuse avant de poursuivre:) Des secrets, tu en as un certains nombres non ?"

J'éclate de rire, comme pour montrer que c'est une idée absurde.

Je passe le samedi à faire les courses. Avant la mort de Rachel, quand nous formions encore une famille, je cuisinais souvent et je sais dont j'ai besoin. J'achète tout les ingrédients nécessaires pour faire l'un de mes currys préféré: cuisse de poulet, graine de cardamome, yaourt, cumin, coriandre moulu, riz basmati. Comme ça, je pourrai tout préparer à l'avance, et le plat mijotera pendant qu'on bavardera, Alice et moi. Il n'en sera que meilleur.

J'ai tellement l'habitude de garder tout pour moi, de tenir les autres a distance, que je suis surprise de constater à quel point je tiens à présence d'Alice. J'ignore à quel moment et de quelle manière l'idée d'avoir une amie proche m'est devenue si précieuse, mais le fait de connaitre une nouvelle personne et de partager de bons moment avec elle est soudain devenu une nécessité. Et même si j'ai encore peur de trop en dire, si je consciente que l'amitié peut présenté des risques, je reste très excitée à cette perspective.

Je rentre à la maison, préparer le curry, prends une douche et m'habille. J'ai une heure devant moi avant l'arrivée d'Alice et j'en profite pour appeler mes parents. Eux et moi, nous avons quitter Melbourne il y a un an.Nous connaissions trop de gens là-bas. Trop de gens savaient ce qui était arrivé a Rachel. Nous ne pouvions assumer les regards curieux ou apitoyés, les chuchotement sur notre passage. Je me suis installée chez Vivien pour pouvoir finir ma scolarité à Drummond, l'un des plus importants lycées de Nouvelle-Galles du Sud, un établissement si vaste que je pouvais rester dans mon coin et conserver l'anonymat. Mes parents ont acheté une maison en bordure de mer, à Newcastle, à deux heure de route vers le nord. Ils auraient voulu que j'aille vivre avec eux, bien sûr. Mais je commençais à trouver leur tristesse pesante et leur présence m'étouffait. J'ai donc réussi à les convaincre que Drummond était un établissement idéal pour moi, que mon bonheur en dépendait.

La beauté du Mal •C.H&L.TOù les histoires vivent. Découvrez maintenant