Chapitre 3 : Thoughts

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Atsushi







Certaines personnes prennent parfois des décisions inexpliquées qu'aucun individu n'est en mesure de justifier. Elles nous laissent là, sans aucune forme d'éclaircissement, et tout ce qu'on peut faire c'est rester les bras ballants, à attendre que ça se passe. Leurs décisions résultent souvent de leur passé, de leurs sentiments ou de traumatismes dont ils ne parlent jamais. On dit d'ailleurs que nos souvenirs, joyeux ou malheureux contribuent à créer notre personnalité, notre manière de fonctionner, que nos traumatismes parfois en volontairement exclu de notre mémoire par notre cerveau à cause de leur violence, influent de manière considérable nos actions. Les personnes atteintes de ce genre de traumatismes - si tant est qu'elles s'en souviennent- n'en parlent généralement que très rarement, aussi il est souvent presque impossible de déterminer avec certitude qui a souffert de tel ou de tel manière. Conséquemment, on ne peut la plupart du temps rien faire de concret pour ces personnes, à moins qu'elles ne nous montrent volontairement la partie d'elles qui les fait souffrir. Car quant on exprime notre souffrance devant les autres, n'est-ce pas en vérité une sorte d'appel à l'aide ?

J'aurais voulu avoir conscience de ces vérités plus tôt car peut-être qu'ainsi, rien de tout ça ne serait arrivé. J'aurais sûrement été en mesure de prévoir ou d'anticiper ce qui a suivi le jour où il est arrivé à l'agence chancelant, les cheveux poisseux de sang, et le regard perdu, de cette manière, j'aurais tout mis en oeuvre pour le retenir, pour l'empêcher de prendre cette décision qui a bouleversé l'équilibre même de Yokohama.

Mais je n'ai rien vu venir et si je tente d'être rationnel, avec le recul, je me dis que c'était peut-être un mal pour un bien.








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C'est en bâillant que j'achevais de nouer la cravate de mon costume approximatif, planté devant la vitre de la fenêtre du salon. Je soupirais en regardant mes cheveux désordonnés et tentais tant bien que mal de leur donner un peu d'ordre en entendant la porte de la salle de bain s'ouvrir sur Kyoka déjà prête après seulement dix minutes dans la salle de bain. Je lui fis un sourire qu'elle me rendit timidement et me relevais pour mettre mes chaussures et sortir enfin de l'appartement. Je fermais à clef et alors que Kyoka descendait les escaliers, je me tournais vers l'appartement de Monsieur Dazai. C'était étrangement calme aujourd'hui, d'habitude on l'entendait se débattre avec ses ustensiles de cuisine et crier au feu quand il faisait brûler des nouilles instantanées mais ce matin là, aucun son ne sortait de son appartement. Peut-être s'était-il absenté?

Il pleuvait ce matin là dans les rues de la ville, d'épais nuages noirs recouvraient le ciel et un froid certain mélangé au vent et aux gouttes qui tombaient m'assaillait les membres, me faisant trembloter. Je soupirais en regardant Kyoka, stoïque comme à son habitude, comme insensible au froid. Et dire que je n'avais même pas assez d'argent pour m'acheter une simple veste à capuche qui aurait pu contribuer à me maintenir au chaud un minimum. Avec l'hiver qui approchait, nul doute que j'allais finir par mourir congelé dans mon sommeil ! Tout ce que j'avais comme argent ne me permettait que d'acheter le strict nécessaire en matière de nourriture -et encore- si bien que quand je m'autorisais un simple café, il fallait que je me resserre la ceinture pour les trois prochains jours ! En plus de ça notre appartement était incroyablement petit, froid, plein de trous, humide, mal isolé, et les fenêtres donnaient l'impression qu'elle pourraient tomber si l'on osait de serait-ce que les toucher du bout des doigts. Heureusement que nous n'avions pas de loyer à payer sinon nous ne mangerions tout simplement pas.

Frissonnant, je serrais mes bras autour de moi et c'est bien vingt minutes plus tard que nous arrivions enfin à l'agence. C'est avec un long frisson que je sentis la chaleur m'envahir et, soupirant de bonheur, je relâchais enfin mes bras. Mon attention se dirigea immédiatement sur Hirano dans le couloir et quand celle-ci nous vit, elle afficha un regard étrange. Comme un mélange de tristesse et de compassion. Intrigué je ne lui demandais cependant rien, de peur de me montrer indiscret, et m'empressai de suivre Kyoka dans l'ascenseur.

Some Things Can't be Changed {Soukoku}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant