Chapitre 1: Failure

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Dazai



Le regard vide fixant le plafond de la cuisine de mon petit appartement, cela faisait plusieurs minutes que j'étais là, allongé sur le carrelage froid, à contempler inlassablement les quelques craquelures qui semblaient, à mes yeux, constituer la plus belle oeuvre d'art qu'il m'ait été donné de voir. Je tremblait complètement, un horrible mal de crâne me donnait l'impression qu'un marteau piqueur me traversait la tempe pour ressortir de l'autre côté et mes poignets ensanglantés me faisaient tant souffrir que c'en était devenu insupportable. Ce n'était pourtant pas faute d'avoir ingéré deux boîtes complètes de somnifères pour m'embrouiller l'esprit et faire passer la douleur mais peut-être était-ce le mélange de whisky et de médicaments qui n'avait pas fait bon ménage car j'avais l'impression qu'au contact de l'alcool, la douleur de mes plaies s'était multipliée par mille et qu'au moment où il avait pénétré dans mes veines, ma tête avait été violemment brutalisé au point de me faire tomber au sol.

Mes yeux me brûlaient, j'avais du mal à respirer et je faisais tout mon possible pour enfin perdre connaissance mais la douleur semblait se plaire à me maintenir éveillé.

J'avais merdé. Le matin même, sur une enquête avec Kunikida, j'avais tiré trois balles dans le dos du fugitif que nous venions d'attraper et s'il s'en était sorti de justesse, je n'avais pourtant eu aucune raison valable de commettre cet acte. J'ignorais totalement pourquoi j'avais fais ça, après tout ce n'était qu'un petit voleur à l'étalage qui avait tenté de s'enfuir au moment où nous lui étions tombé dessus, j'aurais simplement du tenter de le rattraper avec mon collègue, nous l'aurions maîtrisé en quelques secondes. Mais non, je lui avait tiré dessus comme un réflexe et n'avait réalisé mon acte qu'au moment où Kunikida m'avait crié dessus en me demandant ce qui m'avait pris. Je n'avais pas compris sur le moment, après tout, quand une cible n'as rien à nous apporter, ne faut-il pas l'éliminer? Non bon sang, non!! Pas à l'agence, ce n'était pas comme ça que ça fonctionnait, à l'agence on gardait en vie le plus de gens possible, même les pires criminels! Ce n'était pas la mafia, ici on ne terrorisait pas nos ennemis au point de les éliminer! J'avais fait ça si compulsivement, si normalement, c'était tellement naturel, j'avais tiré avec tant d'aisance, sans me poser de question. Ça me terrifiait. J'étais transit de peur face à mon action. Je pensais m'être enfin débarrassé des habitudes que j'avais pris à la mafia mais non. Elles étaient toujours là, bien ancrées. Et maintenant, même mes collègues le voyaient. L'éclair de peur qui a traversé le regard de Kunikida en me regardant tout à l'heure m'as fait réaliser ce que je venais de faire et si pendant les premiers instants je me suis maudit, je n'ai pas pu passer à côté de la légèreté de ma main. Je me sentais bien, je n'étais pas dégoûté de moi-même, j'étais serein et presque plus joyeux qu'avant d'appuyer sur la gâchette. J'avais aimé ça, cette sensation m'avait manqué, la sensation de recul du pistolet, le bruit sourd d'un corps tombant lourdement sur le sol, tout ça m'avait empli d'un sentiment de plénitude indescriptible. Cette sensation je la connaissait bien, je l'avais quand j'étais à la mafia et que j'éxécutais le ordres de Mori.

J'étais terrifié. Que penserais Kunikida maintenant? Allait-il en parler au patron, renoncerait-il à faire équipe avec moi, allait il le dire aux autres membres de l'agence ?? Je ne voulais pas, je voulais garder ma place dans cette agence, mais après tout, ne le méritais-je pas ? J'avais manqué d'abattre un homme aujourd'hui, ne méritais-je pas le dégoût et le rejet de mes collègues ? J'étais quelqu'un d'ignoble, ça n'avait rien de nouveau, je le constatais chaque jours en inquiétant Atsushi avec mes tentatives de suicide à répétition. Ça devait être plombant quelqu'un comme moi, les gens devaient en avoir marre à la longue, personne ne veut d'un boulet incapable de prendre soin de lui-même. Je méritais leur colère. Je méritais leur dégoût.

Some Things Can't be Changed {Soukoku}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant