2. LUI

627 35 17
                                    

Chère Sybille,

Je suis là. Mais tu ne m'aperçois pas.

En fait, tu ne m'as jamais trouvé, aveuglée par des futilités. Pourtant, toi et moi, c'est une longue histoire, des pages inscrites dans l'Histoire, quelque chose d'inévitable. Rien ne pourrait corrompre les desseins du destin. Tu es mienne, je suis tien, comme l'automne appartient aux âmes esseulées. Une évidence. Un coup de chance pour nos cœurs qui battent en arythmie avant l'union de nos deux corps.

Car celle-ci ne devrait tarder, je le sais.

Je le sens. Ce désir en moi. Cette insatiété en toi. Tout ça nous consume, telle une fièvre meurtrière. Nous sommes en manque. Un vide constant que personne ne peut combler. Tu te noies dans des relations sans perspective, alors que je sombre dans le fantasme. Dans une mer rouge de passion, troublée par les vagues de la réalité.

Mon imagination me joue des tours. Mon putain d'esprit détraqué m'offre des bribes de nous.

NOUS.

NOUS.

NOUS.

J'adore l'entendre dans ma tête ce « nous ». J'aime le prononcer à voix basse au creux de ton oreille. Mais je déteste le voir s'éloigner. Parce que plus le temps s'effile, plus la certitude de nous s'évanouit. Il chute comme les feuilles mortes disparaissent, emportées par le vent. Sauf qu'il renaît en même temps que la nature s'éveille à la belle saison. Après la mort, la vie. Après la vie, la mort.

C'est un cycle. Une ère sans début, ni fin. Ce temps n'appartient qu'à nous.

NOUS.

Deux amants dans la tourmente qu'on a empêché de s'aimer... Jusqu'à aujourd'hui, j'en fais le serment. Cet automne est le dernier que nous passerons séparés. Vie et mort coexisteront. Oxymore ? Pléonasme. Par un baiser, je t'insufflerai la vie, aspirant ton dernier souffle. Nous vivrons, nous aimerons, nous tuerons. Ensemble, nous serons.

Parce que je ne peux plus rester loin de toi. Je meurs d'une folie qui nécrose mon quotidien. Mon obsession. Ma dévotion. Mon amour. Donne-lui le nom que tu souhaites à cette affection. Ce dont je suis certain, c'est que je t'aime comme personne n'a le droit.

Alors tapi dans l'ombre, j'attends une invitation. Un signe de ta part pour te rejoindre. Je patiente depuis toujours, espérant qu'un jour tu comprennes. Que tu saisisses notre vérité. Pourtant, tu demeures sourde aux appels de nos êtres en peine. Tu erres ici et là pour contenter cette place qui ne revient qu'à moi, entre tes bras. Mes mains sur ton ventre. Mon torse contre ton dos. Toi humide et serrée autour de moi. L'harmonie de deux corps ne faisant qu'un.

Non... Je ne devrais pas y penser, encore moins nous représenter dans cette position. C'est mal de te priver de mes pensées, de cette brûlure exquise qui coule dans mes veines quand je t'observe à la dérobée. Tellement divin que je cède.

Que veux-tu, j'ai le diable au cœur.

Surtout maintenant, quand tu t'arrêtes au bord de l'eau. Quand tu te penches vers la surface noire du lac. Tu ne devrais pas être ici, seule, à la merci du moindre tordu.

Ne t'inquiète pas, je veille sur toi. J'anéantirai quiconque osera t'approcher et te toucher.

Ce rendez-vous à l'abri des regards restera entre nous, comme tous nos autres petits secrets.

Profite de la plénitude de l'aurore... Des premiers rayons qui baignent de soleil ta chevelure.

Tu vois, lorsqu'on me demande ma couleur préférée, je réponds « orange ». Sauf que ce n'est pas tout à fait exact. Si je devais choisir une teinte parmi celles de l'arc-en-ciel, j'en serais incapable. Ce sont ces reflets entre le blond et l'auburn, qui, ensoleillés, semblent prendre feu, qui me rendent fou. Ma couleur préférée, ce sont tes cheveux roux que je rêve d'enrouler autour de mon poing, tout comme...

Le Diable au cœur (DARK ROMANCE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant