Troisième partie

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La réponse vint d'un vague signe de la main et d'une moue ennuyée qui devait signifier quelque chose comme « mêle-toi de ton cul ».

Il tira une chaise de l'arrière-boutique, l'installa près de son collègue, juste à côté de l'endroit où j'étais assise, et s'y assit pour allumer une cigarette. Il semblait si détendu, qu'il ne lui vint même pas à l'esprit de garder son arme à la main, se contentant de la poser à côté de lui. Son intellect devait lui avoir soufflé que la menace de l'arme de Junior était suffisante pour nous garder sous contrôle.

Il n'en était rien.

La détresse laissait place à la fureur en moi, piquée de ne même pas être considérée par cet homme qui se croyait tout permis et tout-puissant.

Ils avaient fait la bêtise de ne pas m'attacher, et ils allaient le regretter.

Je ne m'étais jamais considérée comme irréfléchie, mais il m'arrivait d'être impulsive et je passais suffisamment de temps à entraîner mon corps pour savoir de quoi il était capable : je ne pouvais rivaliser avec un homme de la stature de Sécurité, mais j'étais rapide, et je pouvais le prendre de court.

Ce serait une action quitte ou double.

J'évaluais mes chances, mes options, et je bondis sur l'arme posée au sol. Sécurité fut rapide, mais je l'étais plus encore, et j'eus le temps de m'en saisir avant qu'il ne puisse mettre la main dessus. Son geste précipité l'avait déséquilibré sur sa chaise, alors que j'étais de retour sur mes pieds, ce qui me donna un avantage de taille lorsque j'abattis la crosse de l'arme que je venais de lui subtiliser sur la tempe.

Il s'effondra, me laissant quelques secondes de répit de ce côté-là. Aussitôt, le chef de la bande déboula, alerté par le raffut. Sa soudaine présence eut pour effet de distraire Samy que j'en profitais pour frapper à son tour, à l'arrière du genou. Il s'affaissa partiellement, me laissant tout à fait l'occasion de lui subtiliser son arme que j'envoyais valser et de me positionner derrière lui. C'était à notre tour, les otages, d'avoir un bouclier.

- Pose cette arme, gamine, tu vas te faire mal.

Il en était absolument hors de question. J'étais résolue et j'avais la situation en main, c'était à lui de m'écouter.

- Si vous voulez tirer, faites-le, mais soyez sûr que j'emporterais Samy avec moi.

Je n'étais pas bien certaine de savoir comment fonctionnait l'arme automatique de Sécurité que je tenais presser contre le cou de Samy, mais j'en savais suffisamment long pour savoir que ce genre d'arme était redoutable. Même s'il m'abattait, mon corps pouvait appuyer sur la gâchette par pur réflexe et faire des dégâts.

Son regard me disait qu'il en avait bien conscience et que c'était la seule raison pour laquelle il n'avait pas encore fait feu. Il patientait.

Dans tous les cas, la situation était à son avantage : il était armé – et savait se servir de son arme – et son complice ne tarderait pas à reprendre connaissance. Ce n'était qu'une question de secondes. Il me fallait réfléchir, et vite.

La seule option viable à laquelle je pouvais penser, était la fuite. Tant que je tenais le chef grâce à la menace que j'exerçais contre son complice, j'avais l'avantage.

- Ouvrez la porte, ordonnais-je alors sans bien savoir si c'était réellement la chose à faire.

- Un geste, et je vous descends, répliqua le braqueur en retour.

- Faites, et je tirerais aussi.

Il serra la mâchoire face à ma répartie : je devais être suffisamment convaincante puisqu'il ne répliqua rien de plus, se contentant d'appuyer sur l'ouverture électronique de la porte. Dans mon dos, elle s'ouvrit tout doucement, alors qu'à l'extérieur des ordres de ne pas tirer étaient échangés. Je ne pouvais pas sortir avec eux, Evandre était toujours dans le coffre. Je laissais la porte se refermer, me laissant seule avec mes braqueurs alors que le chef appuyait sur le système de fermeture du rideau métallique.

Le chant des sirènes - 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant