Un jour comme les autres (partie 2)

3 1 0
                                    

Lorsque le jeune homme ouvrit les yeux, il se sentait calme, déjà lucide, une seule et même idée fixée dans son espri et lorsqu'il se leva de son lit, lui vint une certitude : lorsqu'il se coucherait à nouveau, ils en auraient fini.
Repassant dans sa tête toute la stratégie qu'avait préparé Bellor le soir de leur arrivée à Talmatt, il s'habilla sans détourner ses pensées de la tâche qui leur incomberait à lui, son chef, Karrina et Fenra, puis sortit de sa chambre, sa lance à la main et son sac sur l'épaule.
Dans la salle commune l'attendaient comme la veille Fenra et Bellor. Lorsqu'il avança vers eux, ce dernier,  le fixa, ses yeux clairs brillants de ce que le jeune aventurier interpréta comme un mélange de fébrilité, de fièreté et de nostalgie. Ces yeux, il les avait déjà vu, mais jamais toutes ces émotions ne lui étaient apparu avec une telle clarté. La guerrière, de son côté, s'était comme à son habitude affalée sur une chaise, cette fois celle que Karrina occupait la veille, et laissait son regard vagabonder dans les paysage que laissait imaginer la petite fenêtre qui laissait pénétrer dans la pièce sombre les premières lueurs du matin. Malgrès tout, son pied qui frappait à répétition sur le plancher grinçant trahissait une indéniable impatience.
-"Prêt, gamin ?" Demanda le colosse en soulevant d'une main son lourd bouclier de fer pour aussitôt le laisser retomber au sol, ponctuant sa question par un bruit sourd.
-"Prêt." Répliqua l'intéressé avec un sourire contracté au coin des lèvres.
À ces mots, une porte s'ouvrit derrière lui, laissant passer l'herboriste, sa lame accrochée comme toujours à son côté gauche et les bras chargés de fioles de verre remplies d'un liquide bleu pâle.
-"Avant de parir, prenez trois fioles chacun et rangez-les bien, nous en aurons peut-être fort besoin." Annonça-t-elle en désignant les fioles.
-"Les anti-poisons ?" Devina le jeune homme en fourant les petits flacons dans l'une des saccoches qu'il portait à sa ceinture.
-"En effet." Confirma l'aventurière en en tendant quelques-unes Fenra qui à son tour, les ajouta au petit sac en peau de bête qu'elle accrochait à sa taille.
-"Alors, nous pouvons y aller." Annonça le colosse après avoir reçu les siennes.
Lorsqu'il se levèrent, le jeune homme aperçu le regard en coin que lui adressait Karrina, un sourire emprunt de fièreté sur son visage.
Ainsi, après avoir écouté les quelques formules de politesse que leur adressa Teldas, peut-être un peu moins rigidie que d'acoutumée, et reçu les encouragements des villageois qui s'étaient rassemblés comme à leur arrivée, les quatre aventuriers repartirent de nouveau sur la route, éclairée de la même aube naissante que la veille, filant droit vers ce lieu qu'ils pouruivaient depuis des jours : le bois du Malkhar.

À mesure qu'ils progressaient et que le disque solaire s'élevait dans le ciel, le bois commença à se rapprocher, se préciser. Personne ne parla durant ce trajet et bien vite, une atmosphère sérieuse, témoin d'une dissipline martiale, s'installait sur la petite troupe. De l'extérieur, cette marche vers l'inconnu aurait pu parraître grave mais le jeune aventurier aimait ce moment, presque un rituel, qui revenait avant le début de chaque mission. C'était dans ces instants silencieux, de partage d'une concentration commune, qu'il se sentait le plus profondement appartenir au groupe. Ça et là, des pierres de plus en plus imposantes émergeaient des herbes hautes, jusqu'à former de verritables rochers à l'approche des premiers pins dont l'ombre offrit enfin un peu de répit aux yeux fatigués des voyageurs, assaillis de lumière depuis leur départ de Talmatt. Si bien qu'après quelques heures de marche, ils convinrent de se reposer sur le côté du chemin au pied de l'un des épineux. C'est alors que le regard du jeune homme, dont la protection du végétal avait fini par dissiper l'éblouissement, se posa par hazard sur un petit groupement d'arbres qui avaient poussé à une dixaine de mètres de l'autre côté de la route de terre et en vit sortir trois personnes qui, elles aussi, semblaient se dirriger vers le bois. Bellor devait les avoir repéré lui aussi car il se releva, attrappa sa lance et son lourd bouclier et fit signe à ses companions de le suivre. Lorsqu'il fut sûr que les inconnus les avaient bien vu eux aussi, le colosse demanda d'une voix puissante :
-"Salutations, messieurs-dames ! Dites moi, vous rendriez-vous au bois du Malkhar ?"
Devant l'être massif qui se présentait devant eux, les concernés se regardèrent quelques instants, perplexes, avant que l'un d'entre eux, un homme d'une vingtaine d'années aux cheveux noirs en bataille et portant en bandoulière dans son dos une longue épée rangée dans un foureau de cuir brun ne s'avance pour répondre, non sans une certaine hésitation :
-"En effet... nous sommes ici pour nous occupper d'une mission, des personnes ont disparu aux environs et nous sommes là pour les retrouver."
-"Oh !" Lança Bellor d'un ton bien plus jovial. "Dans ce cas, nous sommes sur la même. Bellor, enchanté !" Conclut-il en tendant sa main épaisse vers le nouveau venu qui s'avança d'un pas un peu plus confiant que ne l'avaient été ses mots et serra la main du colosse.
-"Karal, de même."
Lorsque le jeune homme, Fenra et Karrina eurent achevé de se présenter, le dénomé Karal reprit la parole avec un sourire poli :
-"Ravi de vous connaître, je vous présente Trish et Nordell, nous sommes dans la même équipe." Annonça-t-il en désignant une femme et un homme, tous deux de la même tranche d'âge. La première, vêtue d'une longue cape vert foncé qui l'entourait presque toute entière, fendue au niveau des bras et de laquelle on pouvait voir dépasser une épée courte attachée à sa ceinture, affichait un visage rose aux traits étonnement doux barrés d'une longue et fine cicatrice qui s'étendait du coin gauche de sa mâchoire jusqu'à l'extrêmité de son sourcil droit. Le second, quant à lui un peu plus jeune que les autres, arborait sur sa face mince et livide une expression contractée. Sur ses épaules reposait une tenue de cuir renforcée de quelques pièces métaliques aux bordures desquelles s'étalaient de nombreuses inscriptions à même l'acier, trop petites cependant pour être déchifrables à la distance qui le séparait du jeune homme. À son côté se trouvait une masse de métal dont le manche, lui aussi couvert d'incriptions, semblait bien plus usé que le reste de son équipement. Enfin, un bouclier de bois rond couvrait le bras gauche du dénomé Nordell.
-"Donc, vous vous rendez aussi au bois du Malkhar." Présuma Trish à l'intension du chef du groupe.
-"Tout à fait." Répondit Bellor en regagnant la route, intimant aux autres de le suivre d'un signe de tête. "Nous avons fait le chemin depuis Aryon, autant dire que nous attendons ce moment depuis quelques temps !"
Le visage souriant qu'arborait à présent le colosse, ainsi que son ton calme et chaleureur, contribua à mettre un peu plus à l'aise les jeunes aventuriers, si bien que les deux groupes se mirent à marcher côte à côte, Trish entamant peu à peu la discution avec Fenra et Karrina, tandis que Karal faisait de même avec Bellor.
-"Nous, nous sommes venus à pied depuis la capitale, alors j'espère que tout ceci sera vite fini !" S'exclama le chef des nouveau venus.
Là où son élocution comme sa posture étaient jusqu'ici restés irréprochables, ce dernier ayant, semble-t-il, retrouvé ses aises, laissa transparaître une désinvolture naturelle bien plus en accord avec sa tignasse noire ébourifée et son accoutrement chaotique, sorte d'empilement de plusieurs couches de vêtements et de tissus renforcés de cuir clouté.
-"En parlant de ça, vous vous êtes lancés il n'y a pas longtemps, n'est-ce pas ?" Supposa le colosse, un petit sourire aux lèvres.
-"Comment le voyez-vous ?" Demanda Karal, quelque peu surpis.
-"Votre atitude. Vous, vous êtes plutôt détendu et votre ami, tout le contraire." Répliqua Bellor en envoyant son pouce dans la direction de l'aventurier blafard qui marchait à côté du jeune homme.
Le chef des nouveau venus se mit à rire de bon cœur.
-"Oui, bon, vous nous avez démasqué ! En réalité, nous avons commencé il y a un peu moins de quatre mois." À ces mots, le jeune homme sentit l'espace d'un instant une subtile réaction chez son chef, semblable à un blocage. Le dénomé Karal ne sembla cependant pas s'en rendre compte et poursuivit : "Moi et Nordell avons reçu une formation au combat dans notre enfance et Trish nous a rejoint quand nous avons décidé de nous lancer. Et vous, depuis combien de temps vous exercez ?"
-"Depuis quelques temps..." Répondit le colosse grisonnant l'air de rien. En réalité, lui, Fenra et Karrina travaillaient déjà ensemble plus d'un an avant que le jeune homme ne se joigne au groupe.
Tandis que les deux chefs se mettaient à échanger différentes anécdotes à propose de la capitale, le jeune aventurier se remémora les premières semaines qu'il avait passé avec ses companions, le sourire aux lèvres rien qu'à penser aux erreurs colossales qu'il aurait comit si Karrina n'avait pas été là pout veiller au grain. Tandis qu'il suivait le cours de sa pensée, son attension se tournait peu à peu vers l'échange qu'entretait cette l'épéiste avec Fenra et la dénomée Trish qui commençait à sortir de petits sacs noirs de sous sa cape.
-"Voici de la poudre à cannon." Expliqua-t-elle à une herboriste admirative et une guerrière dans l'incompréhension la plus totale. "Si elle est mise en contact avec ne serait-ce qu'une étincelle, elle provoque une explosion dont l'intensité varie en fonction de la quantité de poudre."
-"Donc, imaginons que l'on fasse exploser ce sac..." Supposa Karrina après quelques secondes de réflexion, ses yeux bruns bien plus brillant que d'ordiaire.
-"À la distance à laquelle se trouve votre visage, on aurait intérêt à vous amener chez un soigneur." Répondit Trish avec un grand sourire.
-"Mh... et comment vous en servez-vous ?"
-"J'utilise ce genre de dispositifs." Elle sortit de sous sa cape un petit sac semblable au premier duquel dépassait une courte ficelle. "Il suffit d'utiliser une pierre à feu pour allumer la mèche et de lancer le sac sur ce que l'on veut faire exploser. Les étincelles atteigent vite la poudre et le problème est réglé.
Pour ce qui est l'aprovisonnement, on en trouve sans trop de problème à la capitale."
De tels propos piquèrent à vif la curiosité du jeune homme qui s'empressa de se rapprocher du petit groupe.
-"Excusez moi... savez vous comment fait cette poudre pour exploser ainsi ? Et d'où vient-elle ? Est-ce que c'est une production alchimique ? Un minerai ?! Une plante rare ?!!"
Quelque peu déstabilisée par l'enthousiasme du jeune aventurier, Trish ne sut d'abord quoi dire puis, après un bref silence, commença formuler des explications, sûrement en même temps qu'elle réfléchissait aux réponses suivantes.
-"Euh... tout d'abord, j'ignore comment et pourquoi cette poudre explose, cependant, il s'agit bien d'une production alchimique. Elle a commencé à se vendre il y a quelques mois... À ma connaissance, vous n'en trouverez qu'à la capitale."
-"Intéressant... dans ce cas, il faudra peut-être nous y rendre un jour..." Commenta Karrina en tenant son menton entre son index et son pouce, comme elle le faisait toujours les rares fois où une chose échappait à sa compréhension.
-"Tu voudrais aller à la capitale pour comprendre pourquoi un sac de poudre explose avec des étincelles ?" Résuma Fenra, de plus en plus perplexe.
L'herboriste regarda la guerrière qui marchait à son côté avec un grand sourire amusé.
-"Pourquoi pas ? Si nous nous y rendons pour le travail, nous pourrons toujours chercher des explica..."
Elle n'eut guère le temps de finir sa phrase puisque de l'avant de la troupe s'éleva avec force la voix empreinte d'humour du colosse grisonnant.
-"Votre attension, s'il-vous plaît ! Nous arrivons au bois du Malkhar, vous êtes priés de vérifier que votre équippement soit prêt, vos armes nettoyées puis nous irons nous assoir dans l'herbe comme tout le monde !"
En relevant la tête, le jeune homme qui n'avait pas détourné les yeux de ce mistérieux sac de poudre noire se rendit compte qu'autours d'eux s'étendait à présent un vaste parterre herbu, jonché d'imposants rochers et duquel s'élevaient de hauts arbres aux longs troncs d'un brun sombre laissés en majorité nus par un épais feuillage qui semblait se borner à ne recouvrir que le sommet de ces longues lances végétales au pied desquelles s'était installé plus d'une vingtaine d'aventuriers, autant de paires d'yeux qui fixaient à présent les nouveaux venus avec une insistance qui, au fil des secondes, en devint presque pesante.
Aussi, la petite troupe eut tôt fait de se séparer, le groupe de Bellor s'installant quelque peu à l'écart tandis que celui des jeunes aventuriers prit place au pied d'un rocher, quelques mètres plus proche du centre du rassemblement.
Un fois assit au pied d'un arbre, le jeune homme se mit à scruter avec davantage d'attension la scène immobile qui se jouait autours de lui. Partout dans le semblant de cercle que formaient les groupes installés ça et là, des aventuriers attendaient et observaient, assis dans l'herbe ou sur la roche. Il fut surprit de constater qu'ils n'obesvaient pas la beauté des alentours, la légère brume qui parcemait le sol du bois, qui ne se trouvait à présent qu'à quelques foulées, ni même le bois en lui-même qui se faisait de plus en sombre au fur et à mesure que le regard se perdait dans ses tréfonds, non. Ils s'observaient tous entre eux.
L'étrange tension qui émanait ce cette scène ne tarda pas à faire naître un inconfort dans l'espri du jeune aventurier.
-"Sacré ambiance..." Commenta-t-il d'un ton qu'il voulait humouristique, autant pour briser le silence que pour calmer son poul qui commençait à accélérer.
-"Comme tu dis..." Approuva Fenra, accroupie à sa droite, qui avait elle aussi commencé à scruter les autres arrivants.
-"Bellor, tu as déjà connu ça ?" Demanda Karrina, elle-même assise à la droite de Fenra en tournant la tête vers l'autre côté du tronc où s'était intallé son chef.
-"Rarement." Répondit l'intéressé rapprochant quelque peu sa longue lance de son corps. "Ça n'arrive que quand plusieurs personnes se retrouvent à chasser la même cible en ayant accepté des quêtes différentes. C'est pour éviter ce genre de situation que la guilde n'a l'habitude de distribuer un même contrat que sur une zone très restreinte quand elle ne fait pas directement appel à un groupe d'aventuriers d'élite lorsque la situation l'exige."
-"Selon ce que l'on va trouver, tu pense qu'ils le feront ?" Demanda le jeune homme en sentant de nouveau une boule se former au creux de son ventre.
-"Non, très peu de chances. Le bois du Malkhar est bien surveillé et tu as entendu les débutants de tout-à l'heure, cette quête est au moins répandue d'Aryon à la capitale. Si quelque chose qui nécessitait une telle force de frappe vivait dans ce bois, on aurait pas répendu l'annonce dans toutes les guildes de la région. Ça causerait beaucoup trop de pertes humaines."
-"Donc tu dis que ce travail n'est pas trop dur puisque sinon, on aurait directement envoyé un groupe d'élite, ni trop peu règlementé par la guilde, puisqu'elle n'aurait jamais autant répandu la quête sans raison, mais que les gens se surveillent quand-même comme si l'un allait sauter à la gorge de l'autre ?" Résuma Fenra en se redressant à côté du jeune homme. "C'est absurde !"
-"Nous somme bien d'accord."
Sur ces mots, une silouhette se redressa au centre de la clairière et d'un bond agile, se hissa sur un l'un des imposants rochers qui dominait l'assemblée.
Il s'agissait d'un homme d'âge moyen vêtu d'une tunique d'un bleu sombre, sur laquelle reposait une côte de maille aux reflets métaliques. De là sortait une capuche enserrant un visage froid, ainsi qu'un large et aimable sourire comme collé par dessus. Ses braies, recouvertes de la cheville jusqu'au genou, d'une armure lisse bardée d'entailles et aux refets semblables à ceux de la côte de maille, revêtaient quant à elles un bleu décoloré. Un long arc de bois finement ouvragé enserrait son torse et à son côté pendait un carquois de peau duquel dépassaient de nombreuses flèches ornées de plumes noires et blanches. Alors qu'au pied du rocher s'assit avec calme un chien-loup à la geule barée d'une longue cicatrice, les bras de l'homme souvrirent.
-"Chers confrères et chères consœurs, bienvenue. Entant qu'aventurier de rang troll, j'ai été missionné pour vous transmettre les informations suivantes : Comme vous le savez déjà, cette mission consiste à trouver la cause des disparitions qui ont eu lieu dans ce bois et si possible, de ramener les victimes à la guilde.
De plus, en ma qualité, non pas que messager mais d'aventurier... c'est au même titre que vous tous que je prendrai part aux recherches."
À ces mots, pareille au vent se propageant dans les herbes hautes, une vague de murmures s'éleva de l'aurée des bois, traversant avec une vélocité impressionnante l'assemblée que l'exictation commençait peu à peu à gagner.
"Qu'est-ce qu'un aventurier de rang troll vient foutre dans une mission comme ça ?"; "Ils auraient menti sur la difficulté ?"; "Mais il peut pas être venu pour rien..."; "Mais alors, il y aurait un truc assez intéressant pour le faire venir ?"
Ce n'est qu'une fois les effets de ces premiers mots constatés que l'inconnu reprit la parole :
-"Cependant, à ceux d'entre vous qui on eu l'idée de n'identifier que la cause de la disparition pour toucher la prime précisée sur le contrat, sachez que notre employeur pourrait bien vous persuader de mettre davantage de cœur à l'ouvrage. Voici sa proposition : si vous parvenez, malgrès votre réticence, à ramener les disparus, notre employeur s'engage à vous verser le double. En main propre."
Cette fois, les murmures s'abatirent sur la foule comme une pluie d'automne, plus vifs, plus agités, plus partagés. Certains, même, changèrent de position pour mieux se lancer lorsque cet étranger aurait achevé son discours tandis que d'autres, plus hésitants, commencèrent à se disputer entre eux, certains manquant même d'en venir aux mains. Partout, les mots fusaient, les regards se croisaient, des sourires nerveux se dessinaient sur les joues...
C'est Karrina qui vint couper son apprenti de ce spectacle étrange qui peu à peu, semblait comme l'aspirer.
-"...Je crois que j'ai compris. Pour tous les aventuriers qui sont ici..." Elle s'interrompit un instant, puis reprit à mi-voix. "Il n'y a qu'une seule récompence."
Alors que l'inconnu poursuivait son discours, le jeune homme senti comme un voile se déchirer devant ses yeux. Il vit alors ce qui jusqu'ici, lui avait semblé dérisoire, des détails anodin. Les visages fermés, les mains crispées, les muscles tendus... Les aventuriers se surveillaient, se jaugeaient, s'examinaient avec une telle intensité que le jeune homme en venait à se demander comment il avait fait pour ne pas s'en apercevoir au premier coup d'œuil. Il n'y avait aucune fraternité dans ces yeux-là, ni enthousiasme, ni même indiférence. Il n'y avait que méfiance, crainte et fébrilité. Les aventuriers se guettaient entre eux de la même manière qu'ils guettaient des montres.
De tels regards n'étaient pas ceux d'une mission de recherche. Ils étaient ceux d'une course de chevaux. Nombreux étaient les aventuriers autours de lui à qui ce fait n'avait pas échappé. Voilà donc pourquoi ils se préparaient, se surveillaient.
Et lui ? Combien d'entre eux l'avaient vu ? Combien d'entre eux avaient observé la réaction du jeune homme lorsqu'il avait entendu les mots de l'herboriste, combien savaient déjà que lui aussi avait compris ?
-"Il va falloir modifier nos plans." Souffla Bellor qui lui aussi, observait la scène avec une méfiance presque tangible.
-"Pour finir..." Annonça l'inconnu. "Certains d'entre vous l'ont peut-être déjà compris mais entant que confrère, je tiens à clarifier ce point crucial : une calèche attendra peu après l'orée des bois et vous enmènera, vous et les disparus, jusqu'à la capitale. Une seule calèche."
À ces mots, quelque chose dans la foule sembla s'éveiler. La tempête humaine qui menaçait depuis trop longtemps se déchaîna. Sans un mot, les jambes se détendirent, les armes se levèrent, tombèrent sur les dos arqués des premiers coureurs qui se ruèrent vers le bois avec une efficacité supéfiante tandis les autres, ralentis par la surprise, se levaient à leur tour dans un tonerre d'éclats de voix, de bruits de pas et d'équipement enfilé à la hâte.
Lorsque le petit groupe partit, les premiers étaient déjà loins tandis que les retardataires commençaient à peine à se lever. Alors qu'ils se ruaient vers les bois, le jeune homme lança à son chef :
-"Bellor, pour la stratégie, qu'est-ce qu'on fait ?"
-"On serre les rangs." Répondit le colosse. "Je passe devant, Fenra avec moi. Karrina tu assures nos arrières et toi, gamin, tu reste au millieu et tu nous aides d'un côté ou de l'autre en fonction de la situation. Fenra, quand on se déplace, reste proche de lui. On a besoin qu'il brûles les toiles des Tachides, sinon on ne pourra rien faire !"
Les aventuriers se replacèrent selon les ordres de leur chef en aquiessant à l'unisson et en mème temps qu'ils s'enfonçaient dans la végétation, ils se mirent aux aguets du moindre son, du moindre bruit de pas et du moindre éclat de voix qui résonnait au loins, s'enfonçant toujours plus loins alors qu'autours d'eux, ils pouvaient entendre le chaos de la foule diminuer, s'aténuer peu à peu en se fondant dans la brume. Cette brume épaisse, dégageant une intense odeur sucrée  limita bientôt leur champ de vision déjà restreint par les épais troncs noirs, lesquels, semblables à des rempars de branches et d'épines, occultaient la chaleur du soleil pour préserver sous leur dense canopée un petit royaume de brûme et d'humidité qui pourtant, alors qu'ils erraient dans ses entrailles, leur paressait bien vaste. Les bruits s'étaient tus, à tel point qu'il n'entendaient maintenant plus que ceux de leur propre respiration et de leurs pas le sol plat qui fut celui des grandes plaines, se muant sans même qu'ils ne s'en aperçoivent, en un terrain à la topograpie inégale, alors que les talus naturels s'élevaient, et que les aspérités se creusaient.
Les aventuriers marchaient, à présent. Alors que peu à peu, ils récupéraient leur souffle, leurs yeux ratissaient encore ce paysage chaotique jonché de roches, plus imposantes encore que le colosse qui avançait en tête, et strié de troncs qui, de leur implacable régularité, semblaient s'acharner ordoner ces terres étranges pour au final, ne parvenir qu'à en augmenter l'incohérence. Le jeune homme, mal habitué par la chaleur écrasante qui reignait dans les plaines, au delà de ce petit empire de troncs, de trous, de bosses et de roches, commença à sentir le froid comme le malaise s'installer autant dans ses membres et son espri que dans ceux de la troupe.
Soudain, semblable à une brise glaciale, une pensée lui traversa l'espri :
-"Fenra... tu pense pouvoir retrouver notre chemin jusqu'à la plaine ?" Demanda-t-il à mi-voix.
-"Ça devrait aller. J'ai pris quelques repères." Répliqua la guerrière avec une assurance qui réconforta quelque peu son interlocuteur.
-"Je suis toujours aussi surprise que tu arrives à trouver des repères là dedans." Commenta Karrina avec un léger sourire.
-"Dans les terres du nord, il vaut mieux savoir faire ça." Répondit Fenra, visiblement contente que l'herboriste le lui fasse remarquer.
-"Dans ce cas, nous pouvons commencer à chercher." Conclut Bellor en scrutant les alentours. "Faisons bien attention, nous cherchons autant les disparus que des agresseurs potentiels."
-"Donc on se concentre bien sur eux plutôt que sur ce qui les a entrainé ici ?" Demanda le jeune homme, à la fois heureux et inquiété par la décision de son chef.
-"Oui, le double de la somme, ça ne se refuse pas. Et puis si jamais nous sommes incapables de les ramener, il est fort probable que nous nous frottions à ce qui les a traîné jusqu'ici en premier lieu."
Le groupe aquiessa et poursuivit sa marche dans le silence, aux aguets de quoi que ce soit qui se démarquerait du paysage singulier qui s'étandait autours d'eux.
Au bout de quelques minutes supplémentaires à marcher au hasard, le jeune aventurier sentit la main de Fenra tapoter son bras. Il tourna aussitôt la tête pour la voir lui indiquer d'un geste de la main de prévenir les autres tout désignant de son autre bras une direcrion vers laquelle la brume semblait s'accumuler.
Répétant de geste de son amie, il interpella tour à tour Karrina et Bellor et leur montra ce qu'elle lui avait indiqué. D'un regard entendu les aventuriers convinrent de laisser s'approcher l'épéiste et la guerrière tandis que le colosse et le jeune homme aux pas respectivement bien moins léger et bien moins aguerri resteraient en arrière.
Lentement, avec l'agilité de deux félins, les aventurières progressèrent vers la petite bute au sommet de laquelle semblait se concentrer la brume, tandis que le chef et l'apprenti, le dos arqué et l'espri alerte les surveillaient de loins en continuant de scruter les alentours à la recherche de quelconque piège, quelconque perturbateur suceptible de trahir leur présence. À chaque pas qui rapprochait Fenra et Karrina de cette brume presque opaque, le jeune homme sentait le temps s'étirer, ses muscles se tendre fibre après fibre, le sang battre à ses oreille comme en réponse au silence assourdissant qui emplissait l'espace de sa lourde présence. À cet instant, il lui semblait même possible de percevoir le frémissement des milliers d'aiguilles qui constituaient la canopée, voire peut-être même les fibres de tissus qui qui s'entrelaçaient, formant la cape de l'herboriste. En d'autres circonstances, il se serait amusé de cette perception accrue que cet instant sans fin lui procurait mais si il était capable d'une telle perception, c'était peut-être justement car la seule chose à laquelle il pouvait penser à présent était la détection de la moindre anomalie qui pourrait nuire à l'avancée de ses deux équipières.
Alors que celles-ci arrivaient presque au sommet de la bute, il commençait déjà à calculer la distance maximale qu'il serait capable d'atteindre et à quel point il devrait doser l'énergie qu'il mettrait pour toucher sa cible, quelle qu'elle soit, à coup sûr, sans risquer d'atteindre l'une ou l'autre des aventurières. Plus que quelques pas, à présent. Il ignorait ce que faisait son chef à côté de lui mais préférait se concentrer sur le chemin mental qu'il allait devoir parcourir pour intervenir dans les plus brefs délais.
Lorque qu'elles atteignirent enfin le sommet de la bute, elles s'immobilisèrent un instant. Fenra tourna la tête vers l'herboriste qui, pensa le jeune homme, lui répendit quelque chose de rassurant puisqu'elles se retournèrent et firent signe à leurs coéquipiers de s'approcher. Une fois arrivés à leur tour, Karrina pointa du doigt un point précis dans la brume, là où elle devenait presque impénétrable à force de densité.
-"Vous voyez ?" Demanda-t-elle à mi-voix.
-"Non." Répondit Bellor en plissant les yeux.
-"Regardez mieux." Insista l'herboriste.
Le jeune homme s'exécuta et bientôt, se rendit compte que la brume à l'odeur entêtante qu'il croyait se rassembler et s'enrouler autours du point qu'avait désigné l'aventurière s'échappait en réalité de celui-ci. En regardant avec d'avantage d'attension, il fut même en mesure de distinguer une forme au millieu de cet amas blanchâtre.
-"Qu'est-ce que c'est ?"
-"Probablement l'une des plantes uniques qui peuplent cette forêt. Une plante carnivore qui pousse sur le sol et exulte en continu une fumée blanche au parfum sucré semblable à de la brume pour se camoufler et attirer des proies potentielles."
-"Oui, on en a entendu parler." Répondit Bellor en hochant la tête. "Est-ce que tu pense que..."
Il n'eut pas le temps de finir sa phrase, un sifflement se fit entendre à sa gauche. Une flêche ensanglantée déchira l'air au dessus de leur tête. En même temps qu'elle se ficha dans un arbre à quelques centimètres de Fenra, un cri de douleur résonna au loins. Réagissant au quart de tour, les aventuriers levèrent leurs armes en même temps qu'ils dévalaient la pente pour y trouver un couvert. Alors que le jeune homme se plaquait contre la terre humide, un second sifflement traversa la brume, suivi de deux nouveaux cris.
-"C'est quoi ce bordel ?" Chuchota Fenra aussi bas que l'adrénaline qui la gagnait le lui premttait.
Bellor, le plus près des cris, se risqua à regarder derrière le talus avant de brusquement se plaquer de nouveau contre la terre.
-"Six personnes, trois blessés, deux archers visibles. L'un des deux est contre les autres." Répliqua-t-il en empoignant son bouclier d'une main de fer. "Restez derrière moi, on tente de s'éloigner."
Alors qu'ils s'écutaient, le colosse se leva d'un bond, brandissant son lourd bouclier comme un rempart derrière lequel ses camarades se rassemblèrent, reculant pas à pas le plus loins possible du fracas des armes et des cris qui jaillissaient à quelques mètres d'eux.
Le jeune homme, incapable de voir autre chose que quelques bribes de combats derrière l'imposant pavois de son chef se contenta de suivre le mouvement alors qu'à ses oreilles parvenaient le tonnerre indistinct et désorganisé du combat qui faisait rage en dehors de son champ de vision. Mais alors qu'ils s'enfonçaient peu à peu dans les arbres et que le bruit s'éloignait, quelque chose se répandit dans sa nuque. Un frisson primitif, presque imperceptible, que seul lui dictait son corps et qui le poussa à tourner son regard vers l'arrière, l'espace d'un instant. Instant pendant lequel le jeune aventurier cessa de penser. De ses yeux alertes jusqu'à sa mâchoire contractée, l'information fila plus vite qu'il n'eut le temps d'en identifier la nature exacte. En cet instant, il ne perçu qu'une essence. Un souffle. Danger.
-"Fenra ! Karrina ! Derrière !"
Comme une seule femme, les deux aventurières se retournèrent à leur tour, arme au poing, toutes deux animées d'une rage née de la même essence profonde que celle qui avait investi le jeune homme. Derrière le petit groupe, à quelques mètres seulement, se tenaient deux hommes en embuscade. Ceux-ci eurent à peine le temps de comprendre ce qui leur arrivait car déjà, les deux aventurières se jetaient sur eux. Incarnée en ces deux combattantes expérimentées, l'impulsion de survie qui avait prit le jeune homme, afutée par les batailles, avait revêti une forme plus claire, plus froide, plus élaborée. Tandis qu'en face de ce dernier, un arbre épais coupait sa vision en deux, il vit à sa gauche Fenra, qui se jetait de tous son être sur l'un des embusqués, armé d'une épée courte et d'un bouclier. Avec une violence lucide et dirrigée, la guerrière commença par crocheter de sa première hache le bouclier que l'inconnu tenait devant lui comme elle aurait arraché un bout de bois à un enfant alors que déjà, elle plongeait sa seconde hache dans le torse du malheureux avec une brutalité presque naturelle tant le mouvement semblait simple. Alors qu'elle arrachait sa lame aux côtes de son ennemi dans une gerbe de sang, un nouveau coup, plus puissant venait se loger dans la gorge du futur défun.
À sa droite, Karrina, précise et méthodique dans le maniement de sa lame courbe tranchait l'air, déviait l'acier et parcourait la chair avec la fluidité d'un ruisseau qui serpentait dans la terre meuble. Les tailles s'enchainaient sans qu'une seule ne manque sa cible ou ne fasse vaciller le malheureux, désemparé face à ce tranchant qui, comme animé d'une volonté propre, traversait une à une toutes ses deffences avec l'implaquable rigueur d'un oiseau de proie fondant sur un poisson à la surface d'un lac.
En quelques échanges, l'attaquant gisait au sol, inerte.
Bien que peu attiré par l'idée de prendre une vie humain, le jeune homme ne put s'empêcher de ressentir face la violence dirrigée de l'une et la méthode fluide et implaquable de l'autre, une admirarion, une forme de beauté martiale. Il n'eut cependant pas le temps de développer ces considérations car depuis sa droite, un son brutal et dissonnant, représentation bien plus fidèle de la situation dans laquelle ils se trouvaient vint mettre fin à cet instant étrange.
-"Tuez-les !!!"
À peine le jeune aventurier eut-il le temps de tourner la tête que surgirent trois autres assaillants, les deux premiers armés d'un marteau et d'une lance tandis que le troisième restait à l'arrière, immobile et à découvert.
Son sang ne fit qu'un tour, le jeune homme savait très bien ce que ce troisième agresseur était entrain de préparer. Fenra et Karrina devait être focalisées sur les adversaires qui leurs faisaient face, elle n'auraient pas le temps d'esquiver et selon ce qu'avait choisi cet homme, les blessures pouraient être impossible à soigner pendant la mission. Il voulait faire quelque chose mais il manquait de temps, s'il voulait l'atteindre à cette distance, il aurait besoin de longues secondes de préparation, luxe que ne pouvaient pas se permettre les aventurières qui se battaient devant lui...
Non. Peu importe si il pouvait faire quelque chose, il devait faire quelque chose. Aussi vite qu'il le put, il rassembla ses forces, les concentra au plus profond de lui pour leur donner forme, il ne pourrait pas devancer l'homme qui se tenait de l'autre côté des lames, sa raison le savait mais ses entrailles refusaient de s'y résoudre, omettant contrôle et stabilité, il préféra focaliser ses efforts sur la vitesse et alors que cette pointe d'énergie mal-formée dévalait le long de son bras pour atteindre sa main, lui arrachant des douleurs semblables à celles d'une lame frottée sur sa peau à vif, quelqu'un passa dans son champ de vision pour se frayer un chemin jusque devant Fenra et Karrina, brandissant son grand bouclier de fer alors que plus loins encore, l'homme laissait échapper une large salve de flammes qui se répandit devant lui pour se fracasser sur le rempars de métal, léchant les épaules et les flancs du colosse alors que sur ses côtés, le feu consummait l'herbe humide, libérant des volutes de fumée blanche. Pourtant, derrière lui, les deux aventurières continuaient de se battre avec force et aisance, en aucune façon menacées par les flammes qui peinaient à se répandre sur le sol jonché de pierres.
Cet initiative eut l'effet qu'un électrochoc sur le jeune homme qui, au bout de quelques secondes, parvint tant bien que mal à sortir de son était de panique. Mais alors qu'il s'apprêtait à laisser retomber la pression au creux de sa main, un détail attira son attension : Bellor restait debout, immobile, et son bouclier fumait. Au prix d'un effort supplémentaire pour rester lucide, il expira profondement et prit une seconde pour visualiser la situation. Les deux aventurières se battaient avec les deux assaillants et semblaient prendre l'ascendant. À un peu moins d'une dixaine de mètres, se trouvait un mage, qualifié, à en juger par le sort de feu qu'il venait de lancer. Cependant, ce dernier avait échoué grâce à Bellor et, aussi doué soit-il, il devait se trouver affaibli après avoir déchainé une telle vague de feu... "Très bien."
Pensa le jeune homme en s'arquant en avant. D'un geste décité, il empoigna sa lance de la main droite, prit une courte inspiration et s'élança, frôlant de peu les quatre combattants, toujours occuppés à échanger des coups. À peine eut-il passé cette barrière de lames qu'il commençait à rassembler son énergie dans la paume de sa main gauche, la modelant avec soin en récitant les incantions dans sa tête. Cette énergie, il la voulait molle, fluide, liquide, liquide et aussi froide qu'il en était capable. Au contraire de sa précédente tentative, la phase préparatoire lui parru logique, naturelle. Lorsqu'il arriva à la hauteur de son chef, constatant la teinte rougeâtre de son bouclier, il en approcha sa main aussi près que l'intense chaleur qui en émanait le lui permettait et, relachant simplement l'énergie qu'il avait accumulé, laissa s'échapper une grande giclée d'eau glaciale qui se mit à siffler comme mile serpents au contact du fer brûlant, libérant une nouvelle vague de fumée blanche. Profitant du couvert ainsi créé, le jeune aventurier fondit sur le mage, sa lance qu'il tenait à présent de ses deux mains fermes fendit l'air pour frapper de plein fouet les genoux de son adversaire qui tomba à la renverse laissant sa nuque exposée à un coup, non pas de la lame mais du manche, assommant ainsi l'homme qui s'écroula sur le ventre.
Lorsque le jeune homme se retourna, il aperçu, l'espace d'un instant, le grand sourire de Bellor juste avant que celui-ci ne lui tourne le dos pour aller aider Karrina, au prise avec le lancier dont la portée bien supérieure à la sienne, lui rendait la tache bien plus ardue que d'ordinaire.
Bien vite, les deux derniers assaillants s'écroulèrent, inertes, faisant détourner les yeux au jeune homme qui se força à se focaliser sur le mage, toujours étendu par terre.
Alors que, sachant que Fenra verrait une perte de temps dans le fait d'interroger un prisonnier au lieu de poursuivre leurs recherches, il se demandait quelles questions poser pour en finir le plus vite possible, un certain détail, anodin, aurait-il dit alors, attira son attension : à quelques dixaines de mètres d'eux, là d'où était parti la première flèche ensanglantée, le silence était retombé.
Bien que consient qu'une affaire plus importante requiérait son attension, le jeune aventurier, curieux, s'immobilisa et se mit à scruter les bois à la recherche d'un quelconque signe de vie, mais rien. Alors qu'il balayait la zone du regard, une légère odeur vint lui chatouiller le nez, une odeur... de brûlé ?
En baissant le regard, il s'aperçu que les flammes qui résultaient du sort lancé par le mage étaient entrain de se répandre, si bien qu'elles se trouvaient à présent presque à ses pieds.
Surpris, le jeune homme se dépécha de les asperger d'eau, ils n'avaient pas besoin d'un incendie en plus du problème des tachides et autres aventuriers, mais à peine eut-il achevé d'éteindre les braises qu'un cri d'agonie résonna depuis la butte de terre.
À cet insants, pas un seul les quatre aventuriers se figèrent net. Pendant quelques dixaines de secondes, ils attendirent, dans un état d'incertitude qui fit leur crisper les poings.
-"...On s'en va." Finit par annoncer Bellor.
-"Et le mage ?" Demanda le jeune homme.
-"Tant pis pour lui." Répondit le colosse en tournant les talons."
Alors qu'il s'apprêtait à imiter son chef, jetant un dernier regard en arrière, un mouvement presque imperceptible retint le geste du jeune aventurier. Il tourna brusquement la tête, prêt à brandir sa lance lorsqu'un chien-loup sortit lentement de derrière un arbre. Il avançait seul, droit dans sa direction et pourtant sa démarche respirait un calme olympien, dépourvu de toute volonté de nuire. Ses deux yeux ambrés l'observaient avec la tranquilité d'un animal sauvage devant chaton de ferme. Alors qu'il arrivait à mi-distance, le chien-loup s'assit avec grâce et suffisance sans quitter le jeune homme du regard. On aurait alors juré un souverain qui, dans la quiétude de ses appartements, s'asseyait avec flegme sur la couche.
Le jeune aventurier, intrigué au point presque, d'en oublier l'ordre de son chef, plongea son regard dans celui de l'annimal et en un instant, se sentit comme avalé par ces yeux d'ambre purs et calmes au centres desquels se tenaient deux points d'un noir absolu, deux trous béants dans la réalité au fond desquels semblait se cacher un espri sauvage l'observant avec autant de minutie et davantage encore d'intensité de le jeune homme n'en eut été capable. Cette étrange rencontre entre leurs regards fut l'une des seules choses qui lui fit oublier de se poser des question.
Alors qu'il contemplait ce spectace aussi facinant que singulier, sa méfiance endormie par les yeux envoutant du chien-loup, le jeune aventurier sentit, peu à peu, une nouvelle présence se dessiner. D'abord floue elle se précisa bien vite, le sortant de sa torpeur jusqu'à ce qu'il le sente, semblable à un frisson qui se répendait de son côté gauche jusqu'au plus infime recoin de sa nuque. Cet autre regard qui pesait sur lui.
Arraché de force à sa facination, il vit apparaître de l'autre côté de l'arbre duquel le chien-loup était sorti un spectre au masque d'homme, trahit par un teint pâle, un visage blafard, une côte de maille argentée surmontée d'un grand arc gravé d'élégants symboles, et dont l'éclat renvoyait des lueurs irréelles à travers les brumes de la forêt. Un pas si léger qu'il lui permettait de fouler le sol jonché de pierres et de brindilles sans produire le moindre soupçon d'onde sonore, si léger que c'était tout l'air embiant sembla s'alourdir lorsqu'il avancait vers lui. Mais pourtant, lorsque son regard froid se posa sur lui avec plus d'intensité, le jeune homme n'eut même pas l'impression d'être observé, si bien qu'il dut faire appel à sa raison, et non à ses sens pour se convaincre que ce fantôme sorti de nulle part le regardait bel et bien. Mais alors que les secondes défilaient comme des mois, il sentit des plus bas tréfonds de son espri remonter une certitue, une certitude plus glaçante encore que le regard vide de cet "homme" : "Si je l'ai vu, c'est uniquement parcequ'il le souhaitait."
Alors qu'il esquissait un mouvement de recul, il sentit la présence de Bellor, Fenra et Karrina à ses côtés. Tous trois avaient sorti leurs armes et fixaient avec méfiance le spectre qui avançait vers eux. D'un geste vif, ses yeux aux lueurs de glace se détachèrent de ceux du jeune aventurier pour examiner en un instant les trois nouveaux venus et se planter dans ceux du colosse qui rafermit sa prise sur son large bouclier, cherchant à évaluer le danger que représentait son adversaire.
C'est lentement, sans le perdre des yeux, persque avec douceur, que le spectre leva les main au niveau de sa tête et écarta ses lèvres minces :
-"Du calme, je suis là pour vous faire une proposition."
-"Et pourquoi on t'écouterai ?" Rétorqua Ferna en serrant davantage le manche de sa hache.
-"Parce que vous comme moi n'avons aucune envie de nous faire attaquer à nouveau par un groupe d'aventuriers. Ceux que vous avez affronté avaient noué une alliance avec ceux-là..." Il désigna du doigt la dirrection de laquelle étaient parvenus les cris, sans pour autant lâcher le colosse du regard. "...et je suis prêt à mettre ma main à couper que nombre d'autres équipes en sont déjà arrivées à la même conclusion."
-"Et c'est donc aussi une alliance que tu nous propose." Résuma Karrina, méfiante.
-"Précisement. Passons un accord jusqu'à ce que nous sortions de cette forêt avec les disparus : partageons nos connaissances et cherchons en profitant de la protection des autres.
-"Qu'est-ce qui nous dit que t'en as pas déjà passé un, d'accord ?" Répliqua la guerrière sur un ton accusateur. "Qu'est ce qu'il nous dit que tu ne vas pas juste nous attirer dans un piège ? Et puis t'as pas vraiment l'air d'avoir besoin de nous pour te deffendre."
-"Si j'avais déjà passé un accord avec quelqu'un d'autre," Répliqua l'inconnu. "...je ne vois pas pourquoi nous gaspillerions notre temps et notre énergie à vous attirer dans un piège. Et si il n'y avait pas de piège, alors que faisaient mes alliés lorsque je me suis fait attaquer ?" En prononçant ces mots, il porta sa main à son flanc gauche, soulevant sa cotte de mailles pour révéler une tâche rougeâtre de quelques centimètres ayant traversé sa tunique bleue. "J'ai peut-être survécu cette fois mais rien ne dit que ce sera le cas des cinq suivantes. Et il en va de même pour vous. Cette alliance est une assurance d'avoir un homme qui a vaincu un groupe entier d'aventuriers à vos côtés plutôt que face à vous, et à moi, elle garantit de survivre aux prochaines confrontations et de bénéficier de quatre paires d'yeux supplémentaires." Il était clair que ces derniers mots avaient été adressés à Bellor qui au bout de plusieurs secondes, se décida enfin à répondre.
-"Tu parle de garantie, mais quelle garantie avons nous que tu tiendra parole ?"
L'espace d'un instant, l'inconnu laissa transparaître un léger rictus de contrariété sur son visage blême.
-"Si il vous faut une garantie, alors voici." Il abaissa l'une de ses mains et la glissa dans sa saccoche pour en sortir une bourse de laquelle s'échappait un cliquetis familier. "Durant toute la durée de notre accord, je vous confierait ça."
Ce seul geste sema le trouble dans l'espri du jeune aventurier, jusque là très sceptique tandis que des mots que son mentor avait prononcé il y a ce celà bien longtemps lui revinrent en mémoire : "La première chose que tu dois savoir, gamin, c'est ce que les aventuriers appellent la règle d'or. Ta bourse, c'est ta vie, alors ne la remet qu'à ceux qui méritent de la porter : toi et ton vendeur de potions."
Ces dernières paroles résonnaient dans sa tête, alors que la voix du colosse s'éleva de nouveau à côté de lui.
-"Nous avons besoin de réféchir. Retourne toi, marche cinq pas en avant et garde tes mains là où on peut les voir."
À peine l'homme s'était-il exécuté que Fenra se retournait vers son chef :
-"T'es fou, on peut pas lui faire confiance !" Chuchota-t-elle aussi bas que son état le lui permettait.
-"Dans une mission normale, j'aurai été d'accord mais ce qu'il dit est vrai : les autres aventuriers ont déjà dû former des groupes et on ne serai pas capable de gérer une infériorité numérique, pas dans ces conditions."
-"Et si il voulait juste gagner notre confiance pour nous attaquer par suprise ?"
La mine de Bellor s'assombrit quelques peu.
-"Honêtement, je ne me suis même pas douté qu'il était là, on l'a vu parcequ'il s'est montré, et pourtant nous savions que quelqu'un était dans les environs. À mon avis, si il avait voulu nous tuer, il n'aurait eu qu'à nous suivre et attendre le bon moment, il n'avait aucun intérêt à venir nous parler."
-"Dans ce cas, que fait-on si il décide qu'il n'a plus besoin de nous ?" Objecta Karrina sans le lâcher du regard.
-"...Je pense qu'on peut le croire quand il dit qu'il respectera les termes de l'accord." Intervint le jeune homme.
Bellor, qui s'apprêtait à répondre, referma la bouche pour fixer son apprenti, surpris de cette soudaine prise de position.
-"Ah bon ? Et pourquoi il ferait ça ? Demanda Fenra, peut-être davantage curieuse qu'agacée.
-"J'étais de ton avis jusqu'à ce qu'il nous propose de garder sa bourse jusqu'à la sortie des bois. Si il nous propose ça, alors il nous propose de mettre sa vie entre nos mains."
-"Oui mais quand-même..."
-"Je suis d'accord avec toi." La coupa Karrina. "Si on s'assure de ce que contient la bourse et qu'on le fouille pour vérifier qu'il n'en ait pas caché une autre, même s'il est clair qu'on ne peut pas lui faire confiance, je suis d'avis de jouer le jeu."
La guerrière se tut quelques instants, regardant l'herboriste dans les yeux avant d'expirer longuement.
-"Très bien... je vous suis."
En hochant la tête, Bellor se tourna de nouveau vers l'inconnu.
-"Bien. Laisse nous te fouiller et regarder à l'intérieur de ta bourse. Si rien ne prouve que tu nous a menti, alors on accepte."
Lorsque celui-ci se retourna, il sembla au jeune aventurier que c'était une autre personne qui se tenait devant lui. Ce visage d'une neutralité angoissante et cette aura fantômatique qu'il avait senti peser sur lui depuis l'instant où cet homme avait surgit de la brume s'étaient comme évaporés et à la place du spectre glaçant se trouvait à présent un homme d'âge moyen au teint pâle et aux vêtement bleutés au côté duquel venait s'assoir un chien-loup au pelage gris et au regard profond.
-"Fantasique !" Commenta-t-il d'un ton très poli après s'être soumis à l'examen du groupe. "Dans ce cas, permettez moi de me présenter en bonne et due forme. Je m'appelle Lariann, archer et aventurier de rang ogre. J'espère que notre collaboration s'avèrera fructueuse."
-"Bellor. Enchanté." Répondit ce dernier d'une voix neutre en invitant l'homme à passer devant.
Sans sourciller, ce dernier s'exécuta et c'est dans cette formation singulière, l'archer en première ligne, que le groupe nouvellement formé reprit sa marche à travers les bois brumeux.
Les minutes passèrent, se changeant peu à peu en ce qui parru des heures aux aventuriers qui progressaient en ce royaume chaotique à l'intérieur duquel le temps semblait s'étendre et se contracter sans aucune logique.
Bientôt, où des heures plus tard, peut-être, le jeune homme ne se trouvait même plus dérangé par la présence de Lariann qui marchait en tête, suivant les aléas des reliefs capricieux d'un pas régulier et furtif. La dernière attaque, sans doute, avait amené ses coéquipiers et lui-même à adopter une attitude semblable à celle d'un chat dans des herbes hautes : à la fois discret et assuré, tenu par l'impatience d'une rencontre autant que par sa crainte, à la fois chasseur et proie.
Peut-être était-ce cette position ambivalante, seuls contre monde, qui amena Karrina à s'autoriser une question à l'attension du nouveau venu :
-"Lariann, si tu as été choisi pour prononcer ce discourt avant le début de la mission, c'est que tu as dû rencontrer le comenditaire... que peux-tu nous dire à propos de lui ?" Demanda-t-elle à voix basse.
-"Que voulez-vous savoir ?" Répondit-il d'une voix plus basse encore.
-"Cette mission est tout sauf normale. Beaucoup trop de monde a été mobilisé, en plus pour une récompense qui ne reviendra qu'à un seul groupe. Je veux comprendre ses motivations et comment il a réussi à faire accepter ça à la guilde."
-"Dans ce cas, j'ai bien peur que ma réponse ne paraisse un peu légère... et, croyez moi, j'aimerai autant que vous qu'elle ne le soit pas. Le comenditaire a refusé de me donner son nom, décision assez sensée puisque vous avez raison : cette mission n'aurait jamais dû passer le filtre de la guilde. Cependant, si j'en crois mon expérience, avec de bons amis et une somme adéquate, il est possible de faire passer beaucoup de chose sons le nez de la guilde. En ce qui concerne l'homme en lui-même, il s'agit d'un petit noble de la capitale. Lorsque nous avons négocié mes honoraires spéciaux entant que porte-parole, il m'a semblé fébrile, mais aussi très prudent. Nous ne nous sommes même pas rencontrés chez lui mais dans l'une des salles privée qu'une auberge louait pour les discutions d'affaires entre comenditaires et aventuriers. Le genre d'endroit duquel vous êtes sûrs que rien ne sortira.
-"Nous voilà bien avancés..." Commenta Fenra entre ses dents.
-"Si vous voulez mon avis, la priorité à ces instant n'est pas de connaître le pourquoi du comment mais de faire notre travail." Répliqua l'archer avant de s'arrêter net. Il resta immobile une seconde puis tourna la tête vers la guerrière. "Et de revenir autrement qu'en pièces détachées." À ces mots, il désigna de la main un arbre dressé sur sa gauche.
D'abord, le jeune homme ne vit rien mais à mesure qu'il fixait la base du tronc et que sa vision se précisait, il commença à distinger quelque chose d'autre à travers les brumes sucrées... une bosse... une forme, adossée au grand végétal. Un corps.
D'un même geste, les aventuriers se mirent en garde, scrutant les environs à un rythme effréné, des premiers mètres de leur champ de vision jusqu'aux tréfond grisâtres de la brûme barrés par les hauts troncs noirs que celle-ci semblait avaler. Ils baissèrent à nouveau leurs armes. Aucun danger immédiat.
Pas à pas, le petit groupe avança vers le cadavre à moitié caché par l'arbre imposant qui laissait peu à peu apparaitre davantage du malheureux, vidé de son sang par une profonde entaille dans l'abdomen. Alors qu'ils ne se trouvaient plus qu'à quelques mettres de celui-ci, une nouvelle forme émergea de la colone d'écorce sombre. Une main maculée de terre et de sang gisait à moins d'un pas de ce dernier. En remontant le flux de la mélasse rougeâtre, on arrivait au propriétaire du maleureux membre, couché face contre terre, le corps lacéré de toutes parts. Sa position sur le sol mena naturellement le regard du jeune homme vers une scène qui suffit à lui donner la nosée. À quelques mètres de lui, caché en partie par un rassemblement d'arbres un peu plus dense, se trouvaient les vestiges encore chauds d'un verritable carnage. Au millieu de ce qui s'était changé en une arène végétale trônaient presque une douzaine de cadavres, autant de statues de chair figées dans une ultime position de souffrance sur le sol d'un amphithéâtre de sang, de boue et d'entrailles.
Devant cette fresque macabre, le jeune homme eut toutes les peine du monde à retenir les flots acides qui menaçaient de s'échapper de ses propres intestins.
-"Partons d'ici..." Parvint-il à articuler. "...les responsables sont peut-être encore dans le coin."
-"Détrompez vous, mon cher." Répondit Lariann d'un ton grave mais duquel ne transparaissait aucun malaise. "Les responsables se trouvent sous vos yeux. Voyez cette femme couchée sur le côté, celle avec des cheveux noirs. Sur sa jambe, se trouve la flèche décochée par cet archer, à vos pieds. Observez les plumes à leur base, ce sont les mêmes que dans son carquois. Et l'individu à la main tranchée que nous avons vu plus tôt, la coupure était bien trop nette pour qu'il s'agisse d'une bête sauvage. Ce devait être l'épée du tout premier que nous avons aperçu, dos au tronc. Il y avait des traces de lutte autours d'eux et notre second cadavre avait sous lui une hache, tout à fait capable de laisser le genre marques qu'il arborait sur l'abdomen. De plus..."
-"Merci, Lariann. Je pense que nous avons compri." Le coupa Bellor en s'approchant du jeune homme, posant sa lourde main sur son épaule pour lui faire détourer le regard.
-"Ce n'est pas ce que nous cherchons, inutile de nous attarder." Compléta Karrina en poussant légèrement le jeune homme vers là d'où ils étaient arrivés.
Sur ces mots le petit groupe se remit en route, quittant enfin ce spectacle sanglant alors que l'herboriste se placa au côté de son apprenti, laissant à Fenra le soin d'assurer leurs arrières.
Mais avant de quitter des yeux ce triste carnage, un éclat familier attira le regard du jeune aventurier. Une broche maculée de sang, acrochée à la cape de l'un des cadavres. Sur celle-ci, une épée suivant la longueur d'un œuil ouvert et alerte. La même broche que portaient ses trois camarades, la broche des aventuriers expérimentés.
Il grinça des dents. Comment était-ce possible ? Comment des être humains pouvaient-ils en venir à s'entretuer pour quelques pièces ? Il avait beau avoir déjà vu Fenra ou Karrina prendre des vies humaines, après avoir été témoin d'une telle horreur, il ne pouvait s'empêcher de se demander si tout celà en vallait réellement la peine. N'y avait-il pas d'autres moyens de régler ce genre de problèmes ? Alors qu'il réfléchissait, un souvenir encore frais lui vint à l'espri, celui de Fenra et Karrina se ruant sur leurs agresseurs lors de leur dernière confrontation. "Peut-être que les aventuriers du charnier s'étaient juste deffendu ?" Pensa-t-il. Alors que la persepctive que leur combat de tout-à-l'heure aurait lui aussi pu dégénérer à ce point commençait à effleurer son espri, la main que Karrina posa sur son épaule vint le sortir de ses pensées.
"Allons-y." Se dit-il. "Il est temps d'en finir avec cette mission absurde."
Cette idée en tête, il tapota l'avant-bras de l'herboriste qui tourna la tête. D'un signe de la main, il lui demanda son aide avant de désigner Lariann d'un mouvement de tête. Avec un regard entendu, elle se rapprocha de ce dernier et entama la conversation, laissant ainsi le jeune homme interpeler Bellor à voix basse sans courrir le risque que leur conversation ne soit épiée.
Le colosse le fixa d'un œuil interrogateur.
-"Une fois sortis de la forêt avec les disparus, qu'est-ce qu'on fait pour lui ?
-"On l'assome si possible, sinon on passe aux attaques létales."
-"On peut le faire ?"
-"Oui. Il sera sur ses gardes mais il y a une faiblesse que nous pouvons exploiter : il est trop fier de ses capacités."
-"Comment ça ?"
-"Quand on était dans le charnier..." Répondit Fenra à la place du colosse. "...il a sauté sur l'occasion pour étaler sa science, il a commencé à te décrire les dernier instants de chaque cadavre comme un gosse qui montre qu'il sait à ses copains."
-"Donc s'il pense pouvoir déjouer notre stratagème, quel qu'ils soit, il ne se méfiera qu'à moitié et nous aurons pour nous l'effet de surprise." Compléta le chef du groupe d'un ton que le jeune homme avait rarement entendu sortir de sa bouche. Ce ton grâve et résolu de celui qui sait ce qu'il a à faire.
L'espace d'un instant, un frisson passa dans le dos du jeune aventurier à l'idée de voir à nouveau le spectre qui lui était apparu quelques heures plus tôt, mais une tape amicale qui le força à avancer de deux pas percuta son dos, écrasant au passage ce qui ne lui sembla plus qu'un léger fourmillement au niveau de la nuque. Lorsqu'il regarda derrière lui, il vit les yeux pleins d'une confiance effrontée de Fenra. Ce furent ces yeux qui le décidèrent à affronter l'homme aux allures de spectre qui marchait à présent devant lui. Il le fixa, reserra son emprise sur sa lance et avança d'un pas ferme vers cet oblectif, cette idée qui jusque là lui aurait semblé impossible et qu'il voyait à présent, investi de toute l'assurance de la guerrière : ce spectre qui n'en était pas un, Lariann.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Jul 06, 2024 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

GaléadOù les histoires vivent. Découvrez maintenant