14 - le rituel interdit

3 1 0
                                    

Je me souviens encore de cette nuit noire et tourmentée où j'ai découvert l'existence du rituel interdit. C'était il y a plusieurs années, dans la petite ville isolée de Greenwood. Tout semblait normal en surface, mais cette nuit-là, quelque chose d'insidieux planait dans l'air. Une tension palpable, comme si les ténèbres elles-mêmes étaient vivantes, une présence malveillante s'enroulant autour de chaque recoin. Les ombres étaient plus épaisses, plus menaçantes. Chaque goutte de pluie qui s'écrasait au sol résonnait dans l'obscurité, comme un avertissement qui tambourinait dans mes tempes.

C'est dans cette atmosphère oppressante que je fus attiré par la vieille maison abandonnée au bout de la rue. Une demeure décrépite, infestée de rumeurs sinistres. Les habitants évitaient de passer près de cette ruine, mais moi, une attraction irrationnelle, presque incontrôlable, m'aspirait vers ce lieu maudit. Je pouvais sentir une force invisible qui me poussait, m'appelant, murmurant des secrets à mon esprit. Les murmures... des rires étouffés, bas, déformés, résonnaient, comme s'ils s'élevaient des profondeurs de l'enfer.

Je savais, à cet instant précis, que je n'étais pas seul. L'obscurité qui m'entourait n'était pas simplement une absence de lumière. Elle était vivante. Elle respirait autour de moi, imprégnée de cette malveillance latente qui semblait attendre patiemment que je franchisse un seuil irréversible.

Poussé par une curiosité malsaine, une pulsion que je ne pouvais expliquer, je franchis le seuil de cette demeure en ruine. Chaque pas laissait des empreintes humides dans la poussière épaisse qui recouvrait le sol. Le silence était total, presque assourdissant. Un froid étrange s'empara de moi dès que j'entrai, un froid qui n'était pas celui d'une simple baisse de température, mais un froid qui semblait provenir du lieu lui-même, comme si le temps y était figé, comme si quelque chose de plus ancien que la maison régnait ici.

Je progressai dans la pièce principale, une grande salle autrefois majestueuse mais désormais déchue, jonchée de débris, ses murs délavés et fissurés témoignant d'un passé tragique et oublié. Des étagères délabrées, s'étirant jusqu'au plafond, étaient remplies de poupées étranges. Leurs visages figés dans des expressions sinistres semblaient me suivre des yeux, leurs sourires se transformant en rictus déformés sous la faible lumière vacillante de ma lampe.

Mon cœur battait si fort que chaque battement résonnait dans mes oreilles comme un coup de tonnerre. Je me sentais comme un intrus dans un monde qui ne m'appartenait pas, et chaque seconde passée dans cette maison renforçait cette sensation de malaise. Les yeux de verre des poupées brillaient faiblement dans l'ombre, et je ne pouvais échapper à l'horrible pensée qu'elles étaient conscientes, qu'elles me fixaient vraiment. Une pensée glaciale traversa mon esprit : ces poupées étaient-elles vivantes ?

Soudain, une voix sourde et gutturale déchira le silence. Elle résonna derrière moi, comme un grondement venu d'un autre monde.

« Nous sommes les gardiens du rituel interdit, cher intrus. »

Je me retournai brusquement, figé par une terreur viscérale qui me glaça jusqu'à l'âme. Devant moi, à quelques pas, une silhouette encapuchonnée se tenait, immobile. Ses contours étaient flous, presque irréels, mais une présence oppressante émanait de cette figure mystérieuse. L'air autour de nous semblait s'épaissir, comme si respirer devenait une lutte contre une force invisible, contre cette noirceur qui semblait s'être éveillée à mon arrivée.

« Le rituel interdit ? répétai-je, ma voix tremblante, mes mots se perdirent dans l'immensité de la pièce, avalés par les ténèbres. Qu'est-ce que c'est ? »

La silhouette s'approcha lentement. Son mouvement était presque imperceptible, mais terrifiant. Plus elle se rapprochait, plus je pouvais distinguer son visage déformé par une malveillance inhumaine. Une masse de chair et de ténèbres se tordait dans une expression de pure cruauté. Ses yeux, si on pouvait les appeler ainsi, brillaient d'un éclat démoniaque.

La maison des poupées [recueil de nouvelles]Where stories live. Discover now