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Charles laisse ses lunettes de côté. Il n'en a pas franchement besoin, il les utilise pour les écrans et la concentration, mais il sent le mal de tête lui venir. Conduire de Paris à Monaco lui a au moins permis de se détendre et de se dégager l'esprit.

Puis c'était la réalisation concrète de plusieurs mois de travail qui prenaient vie sous ses yeux. C'est une grande responsabilité et il sait qu'il doit se concentrer au maximum de ses capacités dessus, pour organiser un défilé et une réception qui soient représentatifs de la marque de sa famille. De l'entreprise dont il est l'héritier.

Il a passé ce temps à côtoyer Pierre et ses amis, comme un échappatoire de ses obligations. Peut-être comme une première fois à ressentir des sentiments qui avaient fini par le fuir bien trop souvent, en considérant les personnes qui l'entouraient comme simples façons de s'amuser mais sans qu'il ne se permette plus de proximité avec eux.

Pierre a été représentatif de la nouveauté à bien des niveaux. Il l'a rendu heureux, sans vraies conditions. Un bonheur simple et terrifiant à expérimenter, puisqu'il le faisait s'aventurer dans des terrains jusque-là inconnus.

Il a changé son monde en quelque sorte. Il lui a ouvert les frontières du possible et lui a montré une autre perspective de vie. Une perspective à laquelle il s'était peut-être fermé trop vite par peur de la blessure. Après tout, s'il sortait de ses habitudes, de sa routine, s'il se permettait d'aller au-delà de ses zones de confort, il se confrontait à quelque chose d'ordinaire, avec laquelle il n'avait jamais su composer, l'attachement.

Il est plus difficile de faire face au même milieu qu'il a quitté plus tôt et de revenir à Monaco en étant chargé de toutes ces expériences. Il a presque l'impression d'être un homme différent, changé.

Il sait aussi qu'il doit mettre derrière lui toute notion de conflit et d'engagement émotionnel pour être sûr de mener à bien sa mission. L'événement est en étroite collaboration avec Lewis Hamilton et c'est d'autant plus une raison pour réussir ce projet.

Chaque détail est vu et revu, du défilé au gala de charité qui a lieu juste après. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas côtoyé de gens de sa classe sociale mais il ne peut pas dire que ça lui avait manqué. Les paillettes, les sourires de façade, les remarques assassines camouflées sous les petits-fours ...

Le samedi arrive trop vite à son goût. Il n'a pas assez dormi. Il sait qu'il va encore subir les demandes incessantes de certains amis de ses parents à propos de son statut de célibataire, bien entendu faussé de sa part, et de potentielles propositions de mariages; 'Je connais une fille tout-à-fait adorable' et 'Ma nièce vient tout juste de finir ses études et elle'.

Avant que le défilé ne commence, Lewis et lui montent sur scène, en tant que représentants de l'organisation et de la mise en place de l'événement. Il endosse un sourire professionnel et ressort ses plus belles manières pour représenter le projet. Puis il délègue sa place.

Il n'y a que du soulagement quand les applaudissements retentissent après la fin du défilé et que les invités se dirigent vers la salle de réception pour le reste du gala. Il peut respirer un peu mieux, il se détache de ses propres émotions pour mieux coller à l'image de la marque.

Au milieu de plusieurs discussions, son regard se perd dans la foule. Le luxe est la vitrine d'un certain train de vie, qui est inaccessible à la plupart, il le sait. Quand il se tient ici, il sait qu'il est la représentation de tout ce que Pierre déteste. Mais bon, au fond, même s'il a vécu différemment ces derniers mois, ça ne change pas que c'est une partie de lui. Il ne peut pas vraiment renier ses origines, quand d'une certaine manière ce sont elles qui ont justifié sa présence à Paris, leur rencontre.

rich boys do(n't) have heartsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant