𝟕.

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La chaleureuse lueur tamisée éclairant la pièce lui offrait une douce atmosphère.

Le silence au pouvoir à cette heure-ci, elle approcha du lit, se glissant sans bruit sous l'épaisse couverture, sentant le jeune homme venir se blottir près d'elle, enroulant ses bras autour de sa taille.

Il gémit.

- T'es gelée.

- Je ne t'ai jamais demandé de te frotter à moi.

- Galère...

Se laissant câliner par le noiraud qui, malgré la fraîcheur de son corps, s'acharnait tout de même à la serrer contre lui, elle tendit la main, ses doigts agrippant à l'aveugle la tranche en spirale du carnet mimosa déposé plus tôt sur leur table de chevet.

Elle l'attrapa, se redressant légèrement, son compagnon comprenant ses intentions faisant de même.

Le cahier lui fut tendu.

- J'ai fini.

- Tout ?

- Tout.

La scène pouvait être considérer comme un comique.

Plusieurs de ses manuscrits étaient en cours de publications, l'un d'eux déjà en vitrine, et pourtant...

Celui-là, le tout premier, venait, d'après ses précédentes paroles, tout juste de se terminer.

Ouvrant le carnet, il se jeta immédiatement sur les dernières pages, sachant les autres déjà découvertes des années auparavant.

La jeune femme avait depuis déjà belle lurette arrêter d'écrire là-dedans, le manque de place rendant toute tentative inutile, l'entièreté de ses textes dorénavant dactylographiés.

Cependant, elle avait tenu à conserver quelques pages vierges, assurant d'au moins pouvoir terminer ce récit là où il avait débuté.

Et visiblement, ce soir en était le moment.


Je me souviens, durant la première page, écrite désormais douze ans auparavant, avoir aborder, via une expression, le sujet de la procréation.

"Donner la vie"

C'était ces termes que j'avais employé.

Les temps changent, les mentalités aussi.

J'en suis la preuve.

La petite adolescente cynique et fière que j'étais, comprenant le mot pour mot, n'est désormais plus.

Ses cendres reposent en paix, en moi, et me marquent, peuvent me définir même, mais non me changer.

Reprenons les termes.

Donner la vie.

De mots bien ternes pour dire une aussi belle chose.

Mélange intensif, smoothie sensationel d'émotions et sentiments de toutes sortes, danger grisant.

Peut-être que j'en fais trop.

Neuf mois de torture pour trois minutes de plaisir, moins même, si on voulait être objectif.

Il lui jeta un regard noir, et elle le lui rendit.

- Lit Morphée, t'as rien subit toi.

- Si. Une furie bourrée ayant l'équivalent d'un mix entre alcool et règles dans le corps pendant près d'un an.

L'asségnant d'un coup de coude dans les côtes, elle l'intima pour la seconde fois à poursuivre sa lecture.

C'était dur. Je ne le regrette pourtant pas. Enfin, pas tout le temps.

Le voir pour la première fois ouvrir les yeux, tandis que des larmes perlaient dans les miens, procure une sensation indicible en vous.

Je vous l'assure.

Le sacrifice en valait clairement la chandelle, peut-être même moins.

Je ne sais pas qui, sur cette Terre, est mort à cet instant là, et sur l'instant, ça m'importait peu. Et aujourd'hui encore, d'ailleurs.

Peut-être était ce juste un vieil homme, doucement mort dans son sommeil, un sourire aux lèvres en comprenant sa fin venue ? Je l'espère. J'ai commis assez de crime jusqu'à ce jour pour ressentir le besoin d'ajouter à la liste un homicide indirect.

En tout cas, qu'importe qui, tant qu'il est là.

Fragile, délicat, les poings fermés, les paupières abaissées, quitte à ce que se soit une jeune fille ayant toute sa vie devant elle s'étant faîte écrasée par une voiture, tant qu'il est là, avec moi...

Vous me trouvez cruelle ?

C'est assez normal.

Car je l'aime. 


Il inspira un grand coup, se tournant brusquement vers elle en fermant le carnet.

- Et moi ?

- T'as déjà eu ton moment de gloire, n'en redemande pas.

- Pourquoi me vole-t-on toujours ma place...

Elle pouffa.

- Andouille. T'aurais du le sentir venir, avec ta cervelle surentraînée, qu'il allait valoir mille fois plus que toi.

- Quoi ?!

Ses rires redoublant face à sa mine horrifiée, un sanglot résonna dans la pièce.

- Regarde, à cause de toi il s'est réveillé !

- Mais ! c'est toi qui riais !

Sans lui répondre, elle s'extirpa des draps, frissonnant face à la fraîcheur de la pièce avant de s'approcher du berceau blanchâtre placé au fond de la pièce, duquel provenait les braillements suraiguës.

Avec délicatesse, elle souleva le nourrisson, le collant contre elle, le berçant doucement. Du bout de ses lèvres s'échappaient les douces paroles de comptines de son enfance, le minois du nouveau-né s'apaisant, ses pleurs s'en allant, son souffle redevenant calme.

Assurée qu'il s'était rendormi, elle le reposa sur son matelas, ne sentant même pas la commissure de ses lèvres se lever. Derrière, elle sentit deux bras s'enrouler autour de sa taille, une tête chutant sur son épaule. Mal rasée, la joue du jeune homme l'égratigna légèrement au cou.

- Comment peux tu préférer ce bambin pleurnichard à moi ?

- Parce que t'en es pas un peut-être ?

Soupirant désespérément, il déposa quelques baisers dans son cou, avouant à contrecœur :

- C'est vrai qu'il est adorable... Quand il dort et qu'il ne t'accapare pas.

- Sale égoïste.

Elle rit pourtant, joignant leurs lèvres.

- C'est ton fils, tu sais.

- Notre fils. 



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𝕷𝖎𝖇𝖊𝖑𝖑𝖊𝖘 𝕽𝖔𝖒𝖆𝖓𝖈𝖊́𝖊𝖘 || 𝗦𝗛𝗜𝗞𝗔𝗧𝗘𝗠𝗔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant