Chapitre 4

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   23h27. Je commence à m'inquiéter, papa est parti depuis bien longtemps maintenant... J'espère qu'il va bien, j'aurais bien aimé aller vérifier mais la partie de la forêt où les chasseurs traquent les proies est interdite quand ils sont en chasse. Je travaille demain mais je n'arrive pas à trouver le sommeil. Je sais en revanche que mon petit frère n'eut pas ce problème, il a cette capacité de poser sa tête sur l'oreiller et de s'endormir directement.

   Je décide de me lever car je sais très bien que je n'arriverai pas à dormir tant que mon père ne sera pas rentré. Je me dirige donc vers notre petite cuisine. Ses placards verts font bien avec le bois de la maison. Je me dirige vers le frigidaire et sors une bouteille de lait. Cette invention est géniale, nous l'avons amélioré depuis quelques centaines d'années. Il est nécessaire d'y garder un morceau de glace éternel, malheureusement il faut un Eddjaï maîtrisant la glace pour en fabriquer, et ils sont rares. Mais au moins ça ne pollue plus. C'est, par ailleurs, la même chose pour toutes les inventions de ce genre là. Je fis donc chauffer le lait avec un peu de sucre grâce à une flamme éternelle. Je dis éternel mais ce n'est pas exactement le cas, on peut l'arrêter et la remettre par le moyen d'un dispositif que je ne comprends pas. Bref, je me pose sur une chaise en attendant mon père.

   J'ai peur. Je sais que normalement il ne craint rien car il est avec son dragon et une autre chasseuse mais je ne puis m'en empêcher. Mon père est le seul réel membre de ma famille qu'il me reste, avec ma grand-mère bien sûr. Mon petit frère ne l'est pas réellement, même si c'est tout comme. Mon père l'a adopté quand il avait 7 ans. J'en avais 12, il se méfiait au début mais je l'ai tout de suite adoré. Nous étions en vacances dans un des villages alentours. Ses parents étaient les derniers criminels restants, ils furent exécutés. Personne ne voulait de lui, mon père, pris de sympathie, le ramena à la maison. Il était dans son coin au départ mais il s'est vite acclimaté. Je pense qu'à cette époque là mon père a pris Yezeul sous son aile pour moi aussi. Je n'avais plus ma mère depuis bien longtemps et je me sentais seule. La maison dans laquelle nous étions était trop petite, nous avons donc déménagé. Papa en a profité pour se rapprocher du travail, l'école n'étant pas très loin ce n'était pas un problème. Quand je repense à cette époque je me sens nostalgique, c'est en même temps agréable et insupportable. J'ai toujours l'impression d'avoir raté quelque chose.

   Je me lève et me dirige vers la chambre de mon petit frère, je veux vérifier qu'il dort bien. Étrangement je vois que son sommeil est agité, lui que rien ne perturbe, ça m'inquiète un peu... Je me rapproche de lui en jetant un coup d'œil à la pièce, elle est petite donc il n'y a pas grand chose à vérifier. Son lit se trouve sous la fenêtre ; je sens un courant d'air. Je m'approche encore un peu et remarque que la fenêtre est entrouverte, il pleut à verse. Yezeul reçoit quelques gouttes sur la figure, pas étonnant qu'il soit perturbé. Je ferme la fenêtre et me retourne vers lui. Soudainement, il se réveilla. Je le regarde s'asseoir et commence à remarquer les perles de sueur sur son front. Au moins cela me permet d'oublier un peu papa.

-Yezeul, que t'arrives-t-il ? Tu n'as pas l'air bien mon grand.

   Ma voix est empreinte d'une inquiétude réelle. Je me rend compte qu'avec la pluie mon père devrait être rentré depuis bien longtemps.

-Maylinna, j'ai fais un cauchemar.
-Oh mon grand... C'était si terrible ?

   Je le prends dans mes bras pour essayer, un tant soit peu, de le réconforter.

-J...J'ai rêvé de papa. Il n'allait pas bien... Il était en sang. Je crois qu'il s'était battu.

   Mon père, n'étant pas rentré, je m'inquiète d'autant plus pour lui. Mon petit frère continue.

-Mayli, il y avait un autre homme et une jeune fille. Elle avait un œil violet, comme toi... Mais elle c'était le gauche. Grande sœur, papa est bien revenu n'est-ce pas ?

   Je prends terriblement peur au fur et à mesure du récit de Yezeul. Je ne crois pas aux rêves prémonitoires et il n'existe aucune sorte de pouvoir de voyance. Et même s'il en existait, Yezeul est trop jeune, il n'a même pas son œuf.

-Non Yez, papa n'est pas encore rentré...

   Je serre un peu plus fort mon petit frère, je sais qu'à l'intérieur il est chamboulé mais il ne me le montre pas. Il reste calme en toute circonstance...

   J'entendis un bruit sourd dans la cuisine, je m'y dirigea en courant, laissant mon petit frère me suivre. Je pense que jamais je ne fut aussi horrifiée... Mon père était étendu par terre, ensanglanté.

MaylinnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant