La cité miroir

10. Les somnias les plus dangereux

Maelle ferma la porte de la salle de bain derrière elle. Katya s'assit sur le rebord de la baignoire tout en observant cette drôle de petite pièce carrelée de blanc. Maëlle tourna une manivelle ronde et de l'eau jaillit d'un tube dans une vasque en céramique. L'eau s'arrêta quand la jeune fille tourna dans l'autre sens. Incroyable ! Le débit du puits à proximité devait être activé par une pompe ou un moulin à eau gigantesque. 

Katya se leva pour tester le mécanisme. Elle tournait la manivelle dans un sens puis l'autre : l'eau changeait même de température !

- Quelle est cette magie ?

- Vous n'avez pas l'eau courante dans ton... (Maëlle hésita à dire « pays » où « monde ») Chez toi?

- L'eau ne court pas, non.

Maëlle hocha la tête en se séchant les mains. Donc Katya n'était pas impressionnée par les monstres, savait se battre avait un Bidule-claymore, mais était en extase devant un robinet ?

- Et ce truc qui mousse ?

- Du savon liquide.

Katya appuya sur le petit bec de canard de la bouteille. Une crème blanche avec un parfum d'amande s'en dégagea. Elle se frotta les mains tout en regardant les bulles se former sur ses doigts, avant de les rincer dans « l'eau qui courait ». Ce monde était fabuleux !

Maëlle attrapa la trousse à pharmacie dans le placard :

- Je vais désinfecter tes plaies si tu veux bien.

Katya hésita avant d'enlever son pull : elle ne pouvait pas prendre le risque de laisser ses plaies infectées, toutefois elle se méfiait un peu de Maëlle. Surtout après l'avoir vue invoquer des vagues d'épines géantes. Aussi prit elle le soin de se placer de profil au miroir pour voir chacun des gestes de sa soigneuse. Elle plaqua le tissu contre sa poitrine avec soin.

- Les coupures sont légères, constata Maëlle en imbibant un coton de désinfectant.

En silence, Katya observa chacun des gestes appliqués de la jeune fille. Elle sentait la douceur du coton derrière le picotement du désinfectant et les compresses minuscules qu'elles collaient sur sa peau avec concentration.

Lorsque Maëlle finit de poser le dernier pansement, elle surprit le regard de Katya posé sur elle dans le reflet du miroir.

- Ça va ?

Katya rougit et détourna le regard :

- Merci.

- De rien, c'est normal. Tu m'as quand même sauvée d'un monstre.

- C'est toi qui nous as sauvées du second somnia.

- Était-ce aussi un somnia ?

Katya hocha la tête :

- Je n'en avais jamais vu un aussi évolué. D'habitude je ne traque que les jeunes comme le premier.

- Celui qui ressemblait à un dragon était beaucoup plus effrayant et beaucoup plus grand, constata Maëlle.

- Ce ne sont pas toujours les créatures les plus grandes et les plus effrayantes qui sont les plus dangereuses. Plus un somnia a une forme humaine et plus il est intelligent et puissant.

Maëlle se tût le temps de digérer l'information avant de demander :

- Katia est ce que tu sais où est ma mère ?

- Je n'ai malheureusement aucune information à ce sujet. Ma mission était de te demander de venir avec moi et de transmettre le message de mon mentor à un membre de ta famille, c'est tout.

- Ma tante avait l'air parfaitement au courant de l'identité de ton mentor.

- Tout le monde connaît le Mage Rouge. C'est une personne importante.

Une personne importante dans un monde inconnu... Maëlle n'était pas plus avancée. Qu'avait dit Katya face à sa tante ? Elle avait parlé d'élémentaire. Elle s'apprêta à interroger Katya lorsque cette dernière se mit à frissonner.

- Je vais te chercher des vêtements propres.

Katya pressa le tissu sur son plexus lorsque Maëlle quitta la pièce. Elle soupira une fois seule et déposa le pull troué sur le bord du lavabo. Elle ne regardait pas souvenr dans un miroir et la vue de son propre reflet lui arracha un soupir. La plaque moirée de cristal qui s'étendait sur toute sa cage thoracique et remplaçait ce qui aurait dû être de la peau humaine était d'un bleu sombre constellé d'éclats dorés.

Oui, les somnias ayant une apparence humaine étaient les plus évolués ce qui les rendait dangereux au-delà de tout entendement. Du moins c'est ce qu'on lui avait toujours répété : on ne devait jamais faire confiance à un monstre ! Son doigts passa légèrement au dessus de son ventre, la limite entre sa peau et la plaque était aussi épaisse qu'une cicatrice après une chute. Elle devrait vivre ainsi pour toujours. Ainsi avait-elle été définie.  Pouvait-elle se faire confiance à elle-même dans ce cas ?

Katya se mordit la lèvre inférieure et ravala sa peine. Bidule qui la regardait avec ses grands yeux noirs poussa un petit cri de réconfort et sauta dans ses cheveux pour s'y blottir

- Je sais, Bidule. Nous devons faire preuve de courage quoi qu'il arrive. C'est notre promesse.

🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻

Le mystère est intense ! Rdv rapidement.