﹋﹋
Music theme : https://youtu.be/iml2iTi8CEQ?si=AuvJjT3N3tBE7A7o﹋﹋
17 Juillet 1791.
Les oiseaux, perchés sur le sommet des hauts arbres avoisinants, échangeaient gaiement quelques mélodies symphoniques rythmées par leur bon-vouloir. Pourtant, de lourdes larmes coulaient douloureusement contre ses joues creuses.
Dans le silence des larges plaines de champs et de vignes, une brise légère soufflait paisiblement contre les brins de blés se pliant à son gré. Pourtant, de lourdes larmes coulaient douloureusement contre ses joues creuses.
Entre les touffes d'herbe sèches mais pourtant encore vertes, résonnait le chant joviale et répétitif des cigales à la guise de l'entrée de la saison estivale. Pourtant, de lourdes larmes coulaient douloureusement contre ses joues creuses.
Les rayons du soleil se reflétaient dans la rivière voisine ou dans l'eau du puits en pierre comme un millier de petites étoiles scintillantes, répandant leur chaleur fervente sur les plantations d'été. Pourtant, de lourdes larmes coulaient douloureusement contre ses joues creuses et il hurlait à s'en couper la voix comme prit au piège au sein d'une tempête incontrôlable.
Jamais on ne l'avait aperçu pleurer de la sorte, jamais on ne l'avait entendu crier de la sorte, lui même n'était pas certain d'avoir déjà enduré une peine aussi intense, une douleur aussi prenante. Sans qu'il ne puisse les contrôler, ses genoux s'écrasèrent lourdement contre le sol, égratignant sa peau basanée exposée par le short court qui ne couvrait que ses cuisses. Ses bras retombèrent mollement le long de son corps, il avait cessé de hurler, plus aucune larme ne glissait contre sa peau pour mouiller sa chemise abîmée. Toute pensée semblait s'être évaporée, toute réflexion s'était évanouie. Immobile et absent il fixait un point invisible, il ne percevait plus le chant délicat des cigales, ni même le gazouillement joyeux des oiseaux. Rien d'autre qu'un acouphène désagréable et qu'un goût amer contre la langue accompagnant une envie de vomir étouffante.
Il ne bougea pas, ni pour se relever, ni pour essuyer ses joues humides, pas même quand il senti les frêles bras de sa petite sœur agripper sa nuque pour sangloter bruyamment contre son épaule, tout près de son oreille. Elle avait besoin de réconfort, plus que lui encore. Il avait appris à être fort et elle n'était qu'une enfant tremblante en quête de consolation, mais il ne trouvait plus la force de soulever ses bras pour l'enlacer à son tour.
Si le soleil brûlait sa peau, il frissonnait presque. Une migraine transcendante l'accablait comme pour lui interdire de trop penser. Pourtant, dans sa poitrine, un poids lourd enchaînait son cœur, comme pour lui rappeler la panique silencieuse qui prenait forme sous sa peine affligeante, faisant trembler le bout de ses doigts. Le souffle court, l'estomac douloureux. Une nouvelle larme solitaire vint se joindre à cet amalgame de sensations déchirantes quand une main se déposa d'une douceur hésitante entre ses cheveux bruns tandis que l'autre camouflait des pleurs étouffés. Sa mère. Elle tentait désespérément de masquer sa peine, de se montrer courageuse devant ses enfants dont l'univers entier venait de s'écrouler en l'espace d'un instant. Face à la famille brisée qu'ils représentaient, les deux hommes leur aillant annoncé la tragique nouvelle se montraient silencieux, la tête baissée, le visage grave. L'un d'eux, dont les mains étaient couvertes de sang, s'accrochait péniblement à l'autre qui se tenait droit sans broncher. Si ils n'osaient pas un mot, on lisait dans leurs yeux, une douleur similaire et un chagrin compatissant.
Mais si personne ne se montrait fort, qui le serait pour sa mère, dont la peine devait être incomparable ? Il puisa alors dans ses dernières ressources, trouva le dernier soupons de volonté qui lui restait pour passer avec lenteur ses bras taillés par le travaille autour des épaules de sa sœur, se redressant sur ses jambes tremblantes, entraînant avec lui la petite fille sanglotante. Dans un dernier souffle de courage, il releva le regard, croisant le visage sérieux des deux hommes qui lui faisait face. L'un d'eux lui accorda un signe de tête comme une dernière marque de compassion tandis que le deuxième déposa une main chaleureuse sur son épaule puis sur la tête tremblante de sa sœur qui ne cessait de pleurer entre ses bras. Ils s'en allèrent, le cœur lourd, sans un mot de plus.
De nouveaux bras vinrent l'enlacer avec douceur, accompagnés d'un parfum rassurant qui, à travers la douleur qui lui traversait la poitrine, lui apporta une once de réconfort. Durant dix lentes minutes seul le son de la brise qui caressait leurs peaux et soulevait leurs cheveux brisait le silence. Et quand il trouva enfin la force de parler, sa voix fut roque et brisée, comme s'il n'avait pas ouvert la bouche depuis plusieurs jours.
- Qu'allons nous faire maintenant ? Souffla t-il, raclant sa gorge sèche et douloureuse.
- Rentrons, lui répondit sa mère, d'une voix brisée par ses sanglots silencieux.
Ce fut l'unique et dernière chose qu'elle trouva à dire à son fils, Gabryel Sorel, âgé de seulement quatorze ans et désormais responsable d'une famille paysanne, vivant dans la misère et la faim causées par les récurrentes mauvaises récoltes. Ce fut l'unique et dernière chose qu'elle trouva à dire à son fils qui venait de perdre son père.
![](https://img.wattpad.com/cover/358069553-288-k372868.jpg)
VOUS LISEZ
Gabryel Sorel : Quand les lettres s'enlacent
Любовные романыParis - 1800 Gabryel, Libraire au coeur vibrant, incarne l'exubérance de la bohème. Son esprit rebelle se mêle aux murmures des pages, faisant danser les lettres avec une audace contagieuse. Il révèle les secrets enfuis entre les pages jaunies des l...