Épluche et Feuilles

Chapitre 6

Morgane était extrêmement tentée de se retourner dans ces bras qui l'entouraient si tendrement. D'un côté, elle mourrait d'envie de le serrer à son tour dans les siens, et d’arracher le moindre soupir qui sortirait de ses lèvres. De l'autre, elle n'avait aucune envie d'interrompre son jeu de mains, malgré l’impatience qui continuait de faire vibrer sa peau.

De son côté, Karadec avait défait la fermeture éclair de la veste, mais pas complètement. Juste un peu. Juste assez pour qu'il puisse y glisser la main, et profiter pleinement du brasier qu’il avait lui-même dissimulé sous l'épais tissu. Sa paume un peu froide explorait la peau brulante de Morgane, longeant un temps son épaule, et se plaçant entre cette dernière et la veste comme s’il voulait se charger lui-même de la recouvrir. Morgane s’en serait presque amusée si quelque chose d'autre ne monopolisait pas déjà ses pensées. Comme son autre main, toujours occupée à la rendre folle.

Le calme et la mesure avec lesquels il explorait l'intérieur de ses lèvres continuaient de la perturber. Comment faisait-il pour rester aussi serein, quand le moindre contact du bout de son doigt menaçait de lui faire perdre la tête ? Jamais elle n'aurait imaginé que faire tourner celle de Karadec s'apparenterait à un marathon de séduction. À court d'idées, les seules options qui lui restaient lui semblaient bien trop osées pour qu’elle ne les tente. Non pas qu’il serait incapable de les encaisser. Jusqu'à présent, il avait fait preuve d'une patience à toute épreuve. Non, ce qui était le plus en péril dans toute cette histoire, bien plus que la santé mentale de l'homme qu'elle essayait de faire céder, c'était l'amour propre de Morgane.

Alors, abandonnée aux ministrations des doigts de ce dernier, elle prit quelques secondes pour décider si oui ou non, elle s'engouffrerait dans cette ultime tentative. Quand elle sentit son autre main envelopper la courbe de son sein, avec une tendresse si grande qu’elle en devenait insupportable , Morgane libéra un murmure aussi chaud que ses joues rougies d'embarras.

-Faites moi mal, commandant....

La consultante se refusait de savoir de quoi elle pouvait bien avoir l'air. Elle, la grande enquêtrice à 160 de QI, venait de geindre comme la dernière des midinettes. Certes, elle cherchait à faire ressortir le côté dominant de Karadec, parce que ça l'excitait. Elle pouvait au moins reconnaître ça sans grande honte. Pour autant, abandonner sa dignité dès le premier soir ne faisait certainement pas partie de ses plans. Karadec semblait bien d'accord avec elle. Ses doigts avaient cessé leur danse à l'instant même où elle avait fini de prononcer ces traîtres mots, et la peau du sein de Morgane se fit froide quand il retira sa main d'un coup, comme s'il venait finalement de se brûler. Prenant ce brusque retrait comme un signal d’alarme, elle pivota enfin dans ses bras, et revint se cramponner à son cou, comme pour tenter de le convaincre avant même qu'il n’énonce son refus. 

Elle n’avait pas besoin de voir son regard pour savoir qu'il était noir de sa caractéristique colère.

-Hors de question que je vous blesse.

Un sourire vint parer les lèvres de Morgane. Sa capacité à anticiper les réactions de Karadec commençait à la terrifier très sérieusement.Au second degré bien sûr, autrement elle ne serait pas là en train de ricaner et de se coller langoureusement contre lui, les hanches motivées par l'urgence de son désir.

-Encore heureux. Je ne vous demande pas de me coller des bleus...

Quelle poésie, tout de même. Tout ça pour une session de baise sur un bureau, pensait-elle en pouffant doucement. Avec un doux baiser sur la joue au passage, elle se rapprocha de son oreille.

-Mais je suis sûre que vous pourriez vous montrer un peu plus brute sans pour autant me casser en deux… 

Ok, elle devrait vraiment arrêter les rimes, ça en devenait grotesque. De toute façon, Karadec ne semblait pas très réceptif. Il restait de marbre. Peut-être devrait-elle passer à la vitesse supérieure ? Faisant glisser ses bras de ses larges épaules, elle revint lui faire face, ne se décollant que très légèrement de son corps.