Lazulite

Chapitre 5

Taehyung

    Allongé dans cette chambre où la mort, les réminiscences et les fantômes virevoltent, je refais mon monde à partir de mes rêves brisés en me sentant vide lorsque Lazulite redevient Taehyung.
    Mes yeux ne quittent pas les grandes baies-vitrées du regard car ils prient silencieusement que le jour se lève. L'inaction, le silence, la solitude, ce sont des choses que je ne supporte pas.
    Et Dieu merci, mes suppliques semblent avoir été entendues car Koen entre dans ma chambre dans un pas pressé.

« Taehyung, lève-toi. Tu dois venir voir quelque chose. »

    Doucement, je me lève et enfile ma longue robe de chambre en satin bleu. Mon personnel est déjà au travail et ne manque pas de me saluer tous avec respect.

« Où est-ce qu'on va ?

— Juste ici. »

    Il me pousse dans la salle principale des oeuvres d'arts que je possède et je ne comprends pas.

« Tu ne vois rien ? » mon meilleur ami insiste.

    Je me frotte les yeux et soupire tout en laissant mes ocelles analyser les alentours jusqu'à ce que je bloque sur un élément en particulier.

« Qu'est-ce que c'est que ça ? Comment cela a pu arriver ! je m'énerve immédiatement.

— Justement, j'ignorais si tu étais au courant. »

    Je me précipite vers le lieu du crime et je me laisse retomber sur les genoux.

« Non ! Ce n'est pas vrai ! »

    Je suis hors de moi, triste et confus.
    Avec délicatesse, je ramasse les éclats de nacre, de cristal de roche et d'argent. Je sens mon coeur se serrer et mes yeux me brûlent alors qu'une explosion de rage bouillonne en moi.

« Le personnel assure ne rien avoir cassé et je le crois. » Koen explique.

    Mes mains tremblent en regardant en détails ce vase brisé.

« Tu penses qu'il est réparable ?

— Réparable ? » je relève brutalement la tête, choqué de ce qu'il dit.

    Réparable ?
    On ne peut pas simplement recoller des morceaux. Les fissures seront toujours là. L'art, c'est une âme. Il est possible de le froisser mais le contraire est impossible.

« Tu crois que je veux vulgairement recoller les morceaux et faire comme si rien n'était ? »

    Je me relève et fou de rage, je pointe le délit du doigt.

« Ce vase, ce n'était pas n'importe quel vase, Koen. Ce vase, au delà d'être celui de la très grande reine Min, de l'époque Joseon, c'était également l'un des derniers souvenirs que j'ai de ma mère. C'était ton père qui lui avait offert ! »

    Je n'ai que très peu d'objets lui ayant appartenu. Je n'ai que quelques photos et des anecdotes la concernant. Je n'ai rien, ni aucun souvenir d'elle. Je crois que les âmes vivent dans les souvenirs et le seul moyen d'avoir un lien avec l'âme qui m'a mis au monde, ce sont ces quelques objets qui ont une valeur inestimable à mes yeux.

« Je le sais mais...

— Retrouve celui qui a fait ça et je te jure que le coupable sera encore plus brisé que le vase qu'il a touché.

— Le personnel assure que cette pièce n'a pas été ouverte depuis quatre jours.

— Le vase n'était pas cassé hier matin. je l'annonce avec conviction.