Ivy, 11 ans a subit durant toute sa primaire du harcèlement scolaire qui se manifestait par des coups, des insultes et des menaces de la part de tous ses camarades de classe. Elle n'a jamais vraiment été heureuse.
Un jour, elle décide de tout racont...
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Voilà, encore et toujours les mêmes moqueries sur mon prénom. Ivy. Je n'ai jamais vraiment compris pourquoi d'ailleurs, qu'ai-je fait pour mériter cela ? J'ai bien conscience qu'il est original mais de là à m'insulter pour ça, me faire du mal alors que je n'y suis pour rien... J'aurais bien voulu qu'ils arrêtent, mais c'est comme si ça leur faisait plaisir de me faire souffrir comme ça. Sûrement que ça doit être le cas.
De toute façon, le résultat est le même, depuis la maternelle, on m'embête ou on m'insulte. Au départ, ils justifiaient leurs moqueries par le fait que mon prénom était étrange et pas adéquat. Mais depuis le CE2 à peu près, c'est un tout. Juste parce que je suis... moi.
C'est pour ça que je décide aujourd'hui de demander à mes parents si nous pouvons partir, juste avant ma rentrée au collège. Je veux être le plus loin possible des gens qui ne m'apportent rien de bien. Étant fille unique, j'ai toujours eu l'habitude que mes parents me passent les rares « services » que je leur demandais.
Je ne suis pas ce genre de filles qui sondent sans arrêt les gens et qui piquent des crises dès qu'on leur dit non. Au contraire, je demande peu de choses, mais quand je le fais, je suis méthodique, pas râleuse comme les pestes de ma classe de CM2.
Je décide donc de descendre pour rejoindre mes parents dans le salon. Dès qu'ils me voient arriver, mon père éteint la télé en me souriant et ma mère ferme son livre -sans oublier de mettre son marque-page.
- Je veux déménager. J'en ai marre de cet endroit, je... je ne m'y sens pas à ma place.
Mes parents se regardent, surpris. Mon père prend la parole :
- Enfin Ivy, c'est bien trop tard ! Nous ne pouvons pas déménager comme ça, du jour au lendemain.
Et ils me sortent alors tous les deux un tas d'arguments contre. « C'est impossible de s'organiser car les vacances d'été viennent de commencer » « Nous t'avons déjà inscrite au collège de la ville » - où tous les gens de ma classe iraient – "Nous avons toute notre vie ici, notre travail, notre famille, nos amis", et j'en passe.
J'avoue ne pas être très surprise de voir qu'ils refusent. C'est logique étant donné que je leur demande cela d'un coup, sans explication. C'est pour ça que je décide de tenter le tout pour le tout.
Je leur expose alors la première raison qui les obligerait à m'écouter et à me donner raison. Tout d'abord, la cause du harcèlement que je subis -qui continuera sans aucun doute au collège. Mes parents n'ont jamais sur ce qu'il se passait à l'école après qu'il m'y aient déposé, et je n'ai jamais voulu leur dire, de peur qu'ils me grondent, qu'ils me prennent pour une menteuse, ou bien qu'ils ne comprennent pas. Dans un premier temps, je leur dis brièvement que je ne me sens pas à ma place là-bas, et que les autres enfants me font du mal. Je ne rentre pas dans les détails mais je leur explique malgré tout l'essentiel pour qu'ils comprennent bien d'où vient mon envie irraisonnée de partir d'ici.
Quand je finis enfin l'exposition de cette raison, je vois des larmes qui menacent de couler sur le doux visage de ma mère, alors je décide d'enchaîner avec mon deuxième argument.
L'air irrespirable de notre ville polluée. Mes parents en parlent très régulièrement ; ils ne supportent plus le bruit des voitures, le klaxon des camions et les énormes tracteurs qui passent tous les samedis matins juste devant chez nous.
Ils se lancent alors un regard, que je ne comprends pas. Ce n'est pas la première fois qu'ils me font ce coup là, le fait de se comprendre en un coup d'œil. Et dans ces moments-là, je ne sais absolument pas ce qu'ils pensent évidemment. Je les observe, intriguée et ils me disent de continuer. Mon père a l'air intéressé par ce que je vais leur servir comme troisième et dernier motif et ma mère a plutôt l'air soucieuse. Pourquoi ? Je ne sais pas.
C'est là que j' explique tout.
Comme je n'ai pas vraiment d'autres arguments que ceux du début, je leur fais une explication plus complète du premier : Je leur développe tout, les choses qu'ils ne savent pas, que je n'ai jamais raconté à personne.
Les menaces, les insultes, les coups que je me prends chaque jour dans les toilettes en secret. Les mots affreux qui me détruisent de l'intérieur tel que "Personne ne t'aime !" "T'es moche, t'es trop maigre, et tes cheveux sont gras" "Sale lèche-bottes, t'en n'as pas marre d'être la chouchoute de la maîtresse ?" Ces mots qui provoquent chez moi des crises de larmes si fortes que j'ai très souvent pensé à des choses inimaginables surtout pour une enfant de 11 ans.
J'ai 11 ans ! À 11 ans, on ne doit pas vivre des choses comme ça, entendre des mots aussi affreux ! Enfin je pense. J'imagine que ce n'est pas... normal... ?
Je reviens soudain à la réalité, et lorsque je lève les yeux vers mes parents, j'aperçois les yeux de mon père -lui qui ne pleure jamais- briller de tristesse. Alors, j'arrête mon discours et sans réfléchir, je pars dans ma chambre en sanglotant. J'ai tout juste le temps d'entendre au loin ma mère pleurer et marmonner à mon père.
- Qu'est-ce qu'on a fait Marc, qu'est-ce qu'on a fait ?
Je m'en veux tellement. Je n'aurais pas dû leur dire tout ça. J'aurais dû garder pour moi la souffrance, pourquoi je leur ai raconté ? Je peux me débrouiller seule en plus, je n'avais aucune raison de leur en parler, ce n'est pas si grave que ça, ce sont juste des... petites disputes d'enfants, comme répète la maîtresse régulièrement.
Je leur ai juste fait du mal, je suis tellement égoïste !