𝐓𝐇𝐄 𝐐𝐔𝐄𝐄𝐍 𝐀𝐍𝐃 𝐓𝐇𝐄 𝐊𝐈𝐍𝐆 | ❝ˢʰⁱᵍᵘᵃⁿᵍ❞

𝟣𝟤.𝟤.

- Quoi ?

- J'ai très rapidement pensé à retourner dans le passé pour te sauver. J'ai failli le faire. Et, si tu n'avais pas survécu, je l'aurais fait, avoua-t-il, sans bégayer bien qu'il tremblait intérieurement.

- Ne fais jamais ça. Tu n'y arriveras pas.

Surpris par la fermeté avec laquelle venaient de résonner ces mots, le plus grand trouva aussitôt les yeux de son partenaire, n'y distingua rien d'autre qu'une lueur grise et résolue, donnant l'impression de le gronder sévèrement.

- Tu ne crois pas que je sois capable de te sauver ? se vexa-t-il.

- Personne ne l'est. Je te l'ai déjà dit, et je croyais que tu avais fini par le comprendre, mais la mort est immuable. Tu ne peux pas te permettre de tester d'autres coups, alors que la partie est terminée, lui expliqua-t-il, se détachant de sa dureté au profit d'une attitude plus calme.

- Et si je ne veux pas qu'elle s'arrête ? Si je n'accepte pas qu'elle se finisse ainsi ?

Ces suppositions provoquèrent l'effet d'un coup de genou dans l'estomac du blanchâtre, qui se compressa douloureusement. Évidemment, attendre de son petit-ami qu'il ne riposte pas et accepte les choses telles qu'elles étaient, était vain. Cheng Xiaoshi était le genre de personne à ne jamais cesser de se battre pour son idéal, même si on lui prouvait par toutes les argumentations du monde qu'il était irréalisable.

- Ce n'est pas à toi d'en décider. Tu ne peux pas braver ces règles là, voulut-il le raisonner, sans grand espoir.

- J'essaierai quand même.

- Je te l'interdirai.

Les deux garçons se défiaient du regard, fixaient à travers les rayons de lune l'œil de leur associé, illuminé par un éclat déterminé au possible. Droit et stoïque, Lu Guang refusait de céder aux caprices de son partenaire, de lui laisser croire rien qu'un instant qu'il pourrait rendre possible ce qu'il disait. À l'inverse, Cheng Xiaoshi serrait les poings sur ses genoux et peinait à se maintenir en place, détestant qu'on essaye de le limiter ainsi et aucunement enclin à se plier à ces règles stupides.

- La reine a le droit d'abandonner son propre plateau si ça peut permettre au roi de ne pas en tomber, mais lui ne peut pas faire de même pour elle ?

- Non, il ne peut pas.

Les mâchoires du plus grand se contractèrent à en faire blanchir leurs angles alors que son petit-ami affirmait cela avec une telle nonchalance, comme si cela relevait de l'évidence et ne pouvait être remis en question.

- Tu es injuste, Lu Guang.

Oui, il était injuste, égoïste et hypocrite, il le savait plus que quiconque. Il réprimandait son partenaire, lui répétait à quel point il importait de ne pas se risquer à challenger la mort, que rien n'était susceptible de vaincre face à elle. Et pourtant, lui-même ne respectait pas ses dires. Plus que cela, il niait même leur véracité. La présence de Cheng Xiaoshi, en chair et en os, articulé par un cœur pulsant sans difficulté et pompant le sang fluant à travers ses veines, était la preuve qu'inverser le sort d'un défunt ne relevait finalement pas de l'impossible. Du moins, le blanchâtre l'espérait, sans parvenir à complètement retenir les doutes s'amusant à tourmenter son esprit.

Parfois, il se remémorait le stratagème qu'il avait méticuleusement mis en place, se demandait s'il avait réellement fonctionné ou s'il ne se trouvait pas en réalité piégé dans une illusion éphémère. Il lui arrivait, plus de fois qu'il ne se l'admettait, de craindre de finir expulsé d'une photographie d'une seconde à l'autre, d'être ramené à un présent où le roi ne tenait plus, où le plateau était détruit et la partie achevée. La poitrine brûlant sous l'effet de ces pensées, Lu Guang se ressaisit sans tarder, décidé à avoir le dernier mot au plus vite.