Noa
- Tu es certaine de ne pas vouloir rester avec ton vieux père ?
Je me retourne vers mon père qui n'arrête pas d'essayer de me dissuader de partir à l'université, en réalité, il n'essaye pas de m'empêcher de faire des études, simplement de partir à plus de cinq heures de lui et de notre belle maison à Portree.
- Tu sais il y a pleins d'autres écoles supers dans le coin. Reprend-t-il avec insistance.
- Oui papa, je suis sûr de mon choix, je rêve d'aller à cette fac depuis toujours, je ne pourrais que regretter de rester ici. Je réponds avec douceur en le voyant me montrer sa tristesse pour la première fois depuis qu'il a appris que je m'en aller.
- Ok.. Dit-il avec une lueur nouvelle dans sa voix, je dirais de la tristesse ?
Il me lâche un regard remplit de déception et sans être étonnée, je le vois partir en direction de la cuisine pour cacher sa tristesse et sa colère comme il le fait tout le temps. C'est sa muraille d'émotions, dés qu'il est de mauvaise humeur, en colère, déçu ou triste il s'y réfugie et cuisine n'importe quel plat pour reprendre ses esprits. Il est tellement pudique sur ses émotions et sur son passé que j'ai l'impression de vivre avec un étranger parfois, j'aime mon père de tout mon cœur mais il est assez complexe à gérer. On peut rire aux éclats et passer de supers moments ensemble, puis même pas cinq minutes après, il peut remettre son masque d'homme impassible et devenir froid et distant comme à son habitude.
Malgré tout, je suis rassurée de voir qu'il est affecté par mon départ, j'ai enfin l'impression de compter à ses yeux. Apparemment depuis la mort de ma mère, son comportement a changé, enfin d'après ce qu'il me raconte. Il n'a jamais voulu relater à son sujet, je ne connais même pas ses rêves, la manière dont elle riait et comment elle envisageait la vie, si elle était plutôt littéraire ou scientifique, musique pop ou classique, romance ou thriller, aucun détails qui ont pourtant tellement d'importance. Je ne sais pas non plus comment ils se sont rencontrés et encore moins de qu'elle manière ou à cause de quoi elle est décédée. Je me rappelle qu'une fois, il y a très longtemps, il m'avait parlé d'elle, il m'avait décrit la façon dont elle aimait les fleurs et créait tout et n'importe quoi avec des centaines de combinaisons différentes, il me l'a raconté après m'avoir vu faire un bouquet composé de roses rouges mes fleurs préférées et des marguerites blanches. Il m'avait également confié que je lui ressemblais énormément, qu'on avait les mêmes cheveux teintés de ce roux uniques, formé de roux auburn avec des légers reflets rouges particulièrement brillant, qu'il n'avait jamais vu nulle part ailleurs et qu'on avait les mêmes goûts au sujet des fleurs. Je n'ai jamais autant aimé mes cheveux et mes goûts floraux qu'à ce moment précis. C'est l'un de mes meilleurs souvenirs avec mon père.
Au même moment où la tête de mon père fait son apparition avec deux assiettes de mon plat préféré. Je me lève pour le serrer dans mes bras, nos relations sont peut être tendues mais elles ne retirent en aucun cas le fait qu'il a toujours fait de son mieux et qu'il est toujours présent à mes cotés quand j'ai besoin d'une épaule sur laquelle pleurer, et qu'il était aussi fou de sa femme. Même avec le peu d'information connu à propos d'elle, cette vérité est flagrante, la manière dont sa voix s'était mise à trembler dès qu'il avait commencé son récit et comment ses yeux se sont voilés de tristesse lorsque les mots avaient quittés ses lèvres, voulaient tout dire. Je le lâche enfin au bout de deux minutes et je vois à sa tête qu'il est surpris de ce contact soudain, ce qui m'arrache un sourire, s'il est pudique par rapport à ses émotions, je le suis sur le contact physique, on se complète bien au fond. Nous nous installons à table et discutons de mon départ le lendemain dans la matinée.
- Merci pour ce repas papa, je vais dans ma chambre si ça ne te dérange pas.
Il me fait un signe de tête qui signifie que je peux y aller. Je cours lui faire un bisou et je m'empresse de retrouver la seule pièce dans laquelle je me sens réellement bien. Ma chambre est disposée de manière traditionnelle, mon lit en bois est au centre de la pièce entouré de deux tables de chevets beiges, une bibliothèque prend tout l'espace et des dizaines de livres traînent un peu partout, il y a des bougies sur presque tous les meubles et des affiches de mes auteurs-compositeurs favoris sont accrochées sur un grand mûr, il y a une fontaine d'encens à la cannelle qui me relaxe instantanément, j'adore l'ambiance que dégage ce lieu. Je peux enfin respirer correctement quand je ferme la porte et rentre dans mon monde. Je m'assoie sur mon grand lit et prends deux minutes pour souffler et enfin réfléchir à ce qu'il va m'arriver dans les prochaines 24 heures. Je ne le montre pas à mon père pour éviter qu'il m'empêche de partir de cette maison mais je suis effrayée à l'idée de le quitter, je n'aurais plus aucun repère et je connaîtrais personne, je vais devoir refaire ma vie et m'installer dans une petite chambre seule, je ne sais pas ce qu'il m'attend et je déteste ça. Mais je suis aussi excitée, j'ai hâte de vivre les aventures que la vie me réserve et je suis impatiente de commencer ma vie d'adulte loin des lieux de mon enfance aux énergies étranges.

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Always Lies
RomanceNoa vit seule avec son père, elle s'est toujours questionnée sur l'absence de sa mère, malheureusement sa vie est un secret. Son père ne répond jamais à ses questions, et l'a laisse dans l'ignorance totale. Lorsqu'elle part en direction d'Edimbourg...