Chapitre 2

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Fourth of July - Sufjan Stevens

Aaron

Je marche en direction du petit placard à médicaments quand, soudain, j’entends des pleurs. Je fronce les sourcils, mais décide d’avancer vers le bruit. Il n’y a pas beaucoup de lumière, mais je distingue une jeune femme recroquevillée sur elle-même, qui a beaucoup de mal à respirer. Elle inspire fort et tente de reprendre son souffle. Tous ces sens semblent décuplés, signe qu’elle fait une crise d’angoisse. Ne pouvant pas la laisser dans cet état, je me rapproche doucement afin de ne pas l'effrayer et m'agenouille devant elle. 
– Bonjour, je m'appelle Aaron, je travaille ici, commencé-je tendrement.
Elle lève ses yeux vers moi et j’arrête de respirer à mon tour, une demi-seconde. Je passe outre ce sentiment et demande :
– Je peux m'asseoir ?
Je désigne la place de libre, sur le sol, à côté d’elle. Elle hoche rapidement la tête. Cette fille me regarde intriguée, mais j’ai décidé de l’aider, alors je le ferai.
– Comment vous appelez-vous ?, demandé-je en repliant un genou et posant mon coude sur celui-ci. Mon bras effleure sa peau, ce qui la fait frissonner.
– Je m'appelle Rose.
Elle parle avec difficulté, mais elle va déjà mieux que tout à l’heure.
–  C'est un très beau prénom.
Un petit sourire, sans joie, se dessine sur ses lèvres. Elle essuie ses larmes d’un revers de la manche et regarde le plafond. Elle amène son pouce vers sa bouche pour le ronger, mais je l’en empêche en prenant sa main, l’air de rien. Je continue la conversation pour la distraire.
–  Très bien, Rose, citez-moi trois choses que vous pouvez toucher autour de vous, s'il vous plaît.
–  Hum, je peux toucher votre pull, ma montre et le chariot sur votre gauche, articule-t-elle.
– C’est super, continuez comme ça. Alors, maintenant deux choses que vous pouvez sentir.
– Votre parfum et cette odeur bizarre de désinfectant.
Je souris, fier et étonné de sa facilité à parler et enchaîne avec une troisième question.
– Et pour finir, une chose que vous pouvez goûter ou entendre, comme vous voulez.
– J'ai des tics tacs dans mon sac, c'est à la fraise.
Nous restons assis dans le calme pendant quelques instants, mais ce moment est vite coupé par Rose qui commence à paniquer de nouveau. Je serre alors un peu plus sa main et me place juste devant elle.
– Rose, regardez-moi, ce n’est pas grave, ça arrive, d’accord ? Ça nous arrive à tous, mais je vais avoir besoin de votre aide là. Il va falloir que vous imaginiez des pissenlits devant vous. Le but est qu’ils s’envolent tous. Vous pouvez faire ça ?
Elle me regarde incrédule. Je ris intérieurement de son ton perplexe.
– Quoi ? Vous doutez de ma méthode, c’est ça ?
Elle pouffe doucement en fermant les yeux. On finit par respirer, synchronisés, et deux minutes plus tard, tout revient à la normale. Je lâche sa main et elle se lève. Action qui me permet de réaliser que je la dépasse d’une tête. Elle passe ensuite son sac derrière son épaule et met son autre main dans la poche arrière de son jean.
–  Merci beaucoup, Aaron.
On se sourit mutuellement avec sincérité et je conclus la discussion en répondant :
– C'est normal, ne vous inquiétez pas. Vous avez fait du très bon travail, Rose, je suis fier de vous.
Ça semble la toucher plus que prévu, car elle me regarde émue.
– C’est gentil, merci.
Le silence qui suit sa phrase devient presque gênant et elle détourne ses beaux yeux marron. J’abrège nos souffrances en lui disant au revoir.
– Oui, bien sûr, au revoir, Aaron, j’espère vous revoir, annonce-t-elle timidement.
J'acquiesce et fait demi-tour. J’étais juste supposé aller récupérer des produits de soins, mais je ne regrette pas de m’être arrêté. Je souris suite à cette pensée et j’arrive finalement devant le lieu recherché. Je rentre dans la pièce, prends mes compresses et tout le reste. Une question trotte dans ma tête. Pourquoi cette femme, pourquoi Rose était dans cet état ?


À la prochaine...

Le chemin de nos peursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant