Tout t'expliquer

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Castle of Glass – Linkin Park

« Coucou Tante G ! Plus que deux heures avant que tu arrives ! »

C'est l'un des nombreux messages que Lise m'avait envoyés depuis hier soir. Je suis dans le train, traversant les campagnes. J'attends patiemment la douce voix de la dame m'indiquant que j'arrive dans la métropole la plus proche de mon village natal. Je reviens dans ma ville d'origine qui est remplie de souvenirs. Mes sentiments sont étranges : ça fait si longtemps que je devais revenir !

Je me suis promise de revenir après mes études de commerces. Après celles-ci, je m'étais promise de revenir si je ne trouvais pas de travail à Paris. Puis finalement, j'ai dû attendre un décès pour que je daigne revenir vivre définitivement chez moi. Enfin... Un décès et une rupture.

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Lorsque je l'ai aperçu avec elle, ils m'avaient regardée comme s'ils avaient pitié de moi. Mais n'était-ce pas la preuve de leur mépris sur mon visage ?

Il était censé devenir mon époux deux mois plus tard. Et elle, ma demoiselle d'honneur.

Il savait ce qu'il s'était passé quelques jours auparavant. Ils savaient.

Une autre de mes amies avait essayé de me mettre en garde, mais comme d'habitude, je n'en avais fait qu'à ma tête ; je comptais sur mon rêve de petite fille : me marier à vingt ans – j'avais déjà pris du retard – puis avoir des enfants cinq ans plus tard. Un rêve puéril.

Mais la vérité était en face de moi. Je remettais même en doute ces cinq ans de « bonheur », l'appartement où l'on cohabitait, la demande en mariage ; était-ce réellement pour moi ?

Et même l'enfant qu'on espérait avoir, ou que j'espérais avoir.

Tout n'était-il qu'illusions ?

Ma tête n'avait pas besoin de réfléchir, mon corps le faisait à sa place. Ma valise rouge bordeaux que m'avait offerte ma grande sœur m'irrita les yeux de sa couleur à l'identique de mes joues face à la colère de la réalité révélée.

J'ai posé mes vêtements, des décorations et autres objets qui m'appartenaient plus qu'à lui. J'avais aussi récupéré dans un autre sac, tous les cadeaux qu'il avait osé m'offrir en duplicata de ceux qu'il lui avait offert.

J'allais les revendre.

Et je ne me sentais aucunement coupable de cette affirmation. Il était né avec une cuillère en or dans la bouche, moi non. J'étais même certaine qu'il n'allait pas réfléchir à ce que j'avais pris ou non, quel objet était un cadeau ou non, quel article a été acheté par mes économies ou par ses parents.

Il est rentré à l'appartement lorsque je bouclais la fermeture Eclair de mon troisième sac de voyage.

Il n'osa rien me dire avant de me voir porter mes sacs jusqu'à notre entrée. Il ne m'avait même pas aidé à les porter, ce connard.

Il m'a sorti la phrase basique : « je peux tout t'expliquer »

Mais m'expliquer quoi ?

Que mon « amie » soit tombée indirectement et malencontreusement dans ses bras alors qu'il lui achetait une glace avant de l'embrasser ?

Ou alors qu'il ne faisait pas exprès de me laisser en plan à certains de nos rencards en même temps que cette même « amie » n'était pas disponible pour aller en boîte de nuit ?

Non, il n'y avait rien à expliquer. Tout était clair. Il couchait avec mon amie. Et elle, elle charmait mon fiancé.

                                                          « Crois en tes rêves », qu'il me disait...

Le Vol de la MortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant