Chapitre I

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Chapitre I :

Il fait encore sombre. Le soleil se lève et sa chaleur vient petit à petit effleurer mon visage. Ah Paris, quelle ville magnifique lorsqu'elle dort encore. Il n'y a pas encore un chat dehors, seulement des calèches vides qui attendent qu'on leur attachent quelques chevaux que quelqu'un dirigera pour transporter des gens d'un endroit à l'autre. Je suis là, posé tranquillement, une plume à d'une main et un morceau de parchemin jauni de l'autre. J'écris, j'écris ce que je vois, comment je vois la ville de Paris et les gens qui la font vivre chaque jour. Ma vision des choses. Une grande et magnifique ville qui, la journée est noire de monde, les gens sont payés à exercer leurs métiers pour une misère, qui, la nuit est un pôle où bien des artistes se produisent. Comédiens, danseurs, chanteurs... Mais peu peuvent vivre de cette passion. Leur destin dépend sa majesté et sa cours qui sont difficiles à satisfaire. Pouvoir vivre de ces métier est vraiment rare, mais cela ne me fait pas peur. Ma passion pour la comédie est plus forte que tout. Je suis actuellement sur le toit de l'atelier de mon père, le meilleur tapissier de la ville d'après le roi lui-même, Jean Poquelin. Mon père souhaite que je prenne la relève de son entreprise, mais mon cœur n'y est pas. Non ce n'est pas que je déteste ce métier, mais plutôt qu'il n'éveille pas ma passion. Je n'ose pas en parler à mon père car cela le décevrait énormément, et si je devais ne pas suivre son chemin, tout ce qu'il aurait accompli serait perdu à sa mort. Mais je ne peux pas me résoudre à me priver ainsi toute ma vie. Je veux être comédien, auteur, metteur en scène. Je me suis même trouvé un nom d'artiste : Molière. Je trouve que ça sonne mieux que « Jean-Baptiste Poquelin ». Alors je m'isole tous les matins à l'aube pour écrire des histoires qui, je l'espère rendront fier mon père même si je m'écarte de ce qu'il veut que je devienne. Car oui, un jour, on jouera les pièces de monsieur Molière. Je n'ai pas encore trente ans, je suis encore jeune. Je veux choisir mon destin et ne rien regretter de ma vie.

???: JEAN-BAPTISTE ?! Mais où es tu passé ?! JEAN-BAPTISTE !!!

Jean-Baptiste : Oui ! J'arrive père !

Ah ! Il est l'heure ! Je n'ai absolument pas vu le temps passer, comme tous les jours. Je ré ouvre la fenêtre par laquelle j'ai pu accéder au toit, et rentre à l'intérieur. J'enfile vite mon tablier d'artisan et descends les escaliers menant à l'atelier.

Jean-Baptiste : Bonjour !

Jean : Ah te voilà enfin ! Bonjour fils, tiens, il y a du travail là-bas

Jean-Baptiste : J'y vais de suite

Jean : Bien, au travail !

Comme d'habitude, je me rend en face d'un grand établi et commence à travailler. C'est le début d'une longue et ennuyante journée.

Nous travaillons dur jusqu'à midi. La libération ! Le midi, j'ai le droit de manger où je veux, de faire ce que je veux, du moment que je sois revenu à l'atelier avant l'heure habituelle de reprise. Alors, dès que sonne la cloche de midi, je retire enfin mon tablier, je saisis ma besace contenant mon repas, et sors de l'atelier. Je marche rapidement jusqu'à mon endroit favori, la fontaine du centre ville. Ici tout le monde passe. Je suis au cœur de la vie de Paris. Je m'assois donc sur le rebord de cette fontaine, j'ouvre ma besace et en sors un morceau de pain frai de ce matin que j'avais un peu plus tôt tartiné de beurre. Tout en mangeant, j'observe les passants ainsi que leurs comportements, mais surtout... Je viens ici car, tous les midis, des comédiens viennent jouer des pièces de leurs compositions sur un estrade en bois. Aujourd'hui, c'est au tour de Madeleine Béjart, la plus belle des comédiennes, de montrer ses talents. Elle est brune, des yeux en amandes sont d'un noir intense. Ses cheveux sont attachés en chignon, quelques mèches devant en sont détachés et volent au vent. Elle joue si bien, l'émotion qu'elle procure me laisse sans voix. Si j'étais amené à monter ma troupe un jour, je souhaiterais qu'elle ait les rôles principaux de mes pièces. Je sens soudain quelque chose de poser sur mon épaule. Le tourne aussitôt la tête en sursautant, c'est la main d'un homme à peine plus jeune que moi. Il est accompagné par contre d'un homme plus âgé. Ils s'assoient à mes côtés.

???: Alors, c'est toi le fils du dit « meilleur tapissier de la ville » ?

Jean-Baptiste : Euh, oui c'est bien moi, Jean-Baptiste Poquelin...

???: Eh bien, on dit que votre travail est d'une qualité inimitable ! Pardonnez-moi, je m'appelle Louis Béjart. Et lui, c'est Joseph, mon frère

Jean-Baptiste : Oh enchanté ! Je vous ai vu la semaine dernière, jouer sur l'estrade ! Mais, vous êtes vous de la même famille que Madeleine ?

Joseph : Bien vu l'artiste ! Quelle déduction...Nous sommes ses frères

Jean-Baptiste : C'était pour être sûr...

Louis : Ahah, en tout cas on a remarqué que tu ne ratais aucune représentation. Tu as l'air vraiment passionné

Jean-Baptiste : Oui, j'adore le théâtre, j'écris des pièces aussi... Mais en cachettes car mon père, s'il l'apprenait, les mettrait au feu...

Joseph : Je comprend... On a eu ça aussi tous les trois... Mais aujourd'hui on ne gagne pas beaucoup, mais on vit de passion

Jean-Baptiste : C'est vraiment difficile

Louis : Ça te dérangerait de nous montrer un de tes écrits ?

Jean-Baptiste : Ce n'est pas que je veux pas, mais je ne les emporte pas dehors, j'ai toujours peur de me faire prendre et que mon père sache que j'écrive...Il serait tellement déçu d'apprendre que je ne veux pas prendre la suite de l'atelier

Louis : Quel vieux grincheux... Tu sais, dans la vie, il faut oser se montrer tel que l'on est vraiment, si non on ne vit pas vraiment... A quoi bon gâcher sa vie à obéir ?

Jean-Baptiste : Je sais... OH ! Je n'ai pas vu l'heure ! Il faut que je retourne à l'atelier de suite ! Je suis désolé mais je vais devoir vous quitter ! Passez une bonne journée !

Je met mon dernier bout de pain dans ma bouche et me lève d'un coup. Il faut que je me dépêche je suis déjà bien en retard. Je suis triste de devoir retourner en enfer alors que j'étais au bonheur.

Joseph : Ramène nous un de tes écrits... Demain, à la même heure, au même endroit, nous t'attendrons

Un sourire de joie s'affiche sur mon visage. Je leur fais un signe de la main et repars en courant à l'atelier. Peut-être que cette famille Béjart est ma planche de salut ! Peut-être avec eux, ai-je enfin ma chance ! Demain me le dira. Je sais que je vais passer une fin de journée de dure labeur mais au moins, je sais que demain, c'est la première fois qu'on m'attend pour une de mes pièces. Je vais passer toute la nuit à écrire pour leurs proposer le meilleur de moi-même !


Rêver j'en ai l'habitudeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant