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Ses yeux bruns foncés, qui viraient au noir, étaient plongés dans les miens et je délectais une certaine inquiétude derrière ses prunelles.

« Ouais... » murmurai-je, détournant le regard avant de ne plus savoir garder mon indifférence.

Le poids de sa main sur mon épaule me réconfortait, tout en m’enfonçant un peu plus.

« Ça n’a pas l’air. » fit-il d’une voix neutre, reculant d’un pas afin de croiser les bras sur son torse.

« Ça va très bien pourtant. » répliquai-je d’une voix tranchante qui menaçait de se briser à chaque instant.

Ça aurait dû l'énerver, l'irriter, l'exaspérer, mais il n'en fut rien. Il se contenta de soupirer, de passer une main dans ses mèches blondes qui s'étaient légèrement foncées depuis le temps.

« Tu  mens très mal », finit-il par dire avec un soupçon d'amusement.

À la place de répondre, parce que j'en étais incapable, je pris une inspiration et fermai les yeux pour empêcher les souvenirs de refaire surface. Évidemment, les plus douloureux s'immiscèrent dans mon esprit. La dernière fois que je l'avais vu avant qu'il ne s'en aille. La façon dont ses lèvres s'étaient désespérément emparées des miennes avant qu'on ne se retrouve loin l'un de l'autre à nouveau.

« au faite... c'est quoi ton nom ?»
Honteuse, je me rappelai que je ne m'étais pas présentée.

" Karla."

Il hocha la tête et sembla répéter mon nom silencieusement quelques fois. Une fois fait, il me regarda à nouveau et fronça les sourcils.

"Tu... tu pleures ?"

« Quoi ?"

À  peine avais-je formulé ce mot que je remarquai que ma joue était humide. Stupides larmes. En deux ans, aucune larme n'avait coulé. Il suffit qu'il soit là, et je pleurais à nouveau. Pendant deux ans, j'avais espéré le retrouver. Mais maintenant qu'il était en face de moi, sans aucun souvenir, je n'en étais plus si sûre. J'avais l'impression que sa présence était plus douloureuse que son absence.

Il ne dit rien. Ça ne servait à rien de parler. À la place, il décroisa les bras et fit un pas vers moi, lentement, hésitant. Avant que j'aie pu deviner ce qu'il avait en tête, ses deux bras s'enroulèrent autour de moi pour me rapprocher.

« Qu'est-ce  que tu fais ? » chuchotai-je entre deux sanglots étouffés.

« Je n’en ai aucune idée », répondit-il dans un souffle.

Cependant, il ne recula pas. Ses bras se refermèrent encore plus fermement autour de moi et je ne résistais pas. Sa présence m’avait manqué certes, mais son absence ne m’avait pas détruite comme elle le faisait.

Malgré tout, je laissais libre cours à mes sanglots. Mon ancienne vie me manquait. Quand tout allait bien. Avant qu’on ait dû s’enfuir de la ville. Avant que ma mère ne succombe par ma faute. Seulement, il n’était pas encore là à ce moment. Il était arrivé plus tard, quand j’essayais de m’éloigner du fou qui avait tué ma mère.

Et juste quand on s’était rendu compte d’une possibilité d’attirance mutuelle, nos chemins s’étaient séparés. Dix ans. C’était la durée que j’avais passée sans nouvelle de lui. Sans me rendre compte qu’en fait il était dans la même ville que moi. À 16 ans, j’avais fini par le retrouver. Ce que j’avais ressenti à ce moment-là, c’était ancré en moi à jamais. Soulagement, incrédulité, anxiété, nostalgie… Il m’avait tenue contre lui lorsque toutes ces émotions avaient pris contrôle de moi. « Toujours », m’avait-il dit. La même chose qu’il m’avait dite dix ans auparavant lorsque nous regardions les oiseaux s’envoler dans la lumière du crépuscule.

2- Always ( Deux ans plus tard )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant