𝐏𝐫𝐨𝐥𝐨𝐠𝐮𝐞

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23h34

Un soupir de soulagement m'échappe quand je constate qu'il reste presque une demi-heure avant minuit. Je ne me suis pas rendu compte que le temps était passé si vite. À tel point que j'aurais pu louper le rituel annuel que j'ai avec Dixie tous les ans.

Nous faisons toujours le décompte de la nouvelle année ensemble. C'est une tradition que nous avons établie il y a plusieurs années maintenant et je suis persuadée qu'elle pourrait me tordre le cou si je la manquais.

« — ...Alec. »

Alerté par l'entente de ce prénom, je quitte ma montre des yeux et regarde mon coéquipier qui agite sa main devant mon visage. Je n'ai même pas remarqué que j'avais déserté la conversation.

« — Pardon mec, tu disais ?, demandé-je en me redressant.

— Je te demandais quand allait rentrer Alec, me répète Carter, l'un des attaquants de l'équipe.

Il devrait rentrer demain dans la soirée, mais le connaissant il va vouloir rester chez Barrett et ne rentrer que lundi.

— Et je suppose que tu n'es pas d'accord ?, me questionne Matt, un défenseur.

— Je n'étais déjà même pas d'accord pour qu'il parte skier avec ses potes après la connerie qu'il a faite il y a quinze jours. Mais comme vous pouvez le constater, je montre les alentours avec mes bras, il m'a encore eu. »

Mes potes abordent soudainement un rictus de compassion. Je ne leur parle que très rarement des problèmes que j'ai avec Alec. Pourtant, cela leur suffit à comprendre que mon quotidien est très souvent mit à rude épreuve avec lui et que nos relations sont compliquées.

« — Il ne s'est toujours pas calmé ?, me demande mon ami.

C'est encore pire depuis quelques semaines. Il est tout le temps sur la défensive et dès qu'il a une occasion pour faire de la merde ou me faire gueuler, il l'a saisi. J'sais plus quoi faire avec lui, soupiré-je en prenant une gorgée de mon whisky.

— Il a seize ans, ça lui passera. J'étais pareil à son âge.

— Je ne pense pas qu'il va lâcher les armes d'aussi tôt.

— Tu peux dire merci à Peter, me lance Matt en tapotant mon épaule.

Je le remercie tous les jours pour ça, dis-je d'un ton las. »

Mes deux partenaires me lancent un regard compatissant — à nouveau — et comme simple réponse, je termine mon verre d'une traite. Je grimace en sentant le liquide ambré traverser ma gorge et quitte le salon pour rejoindre Dixie dehors.

Sur le chemin jusqu'au jardin, mes pensées divaguent jusqu'à Peter, mon meilleur ami. Cela fait maintenant huit ans qu'il est mort et son absence se fait toujours autant ressentir. Je me souviens encore de la voix frêle de l'infirmière qui m'a annoncé son décès. Et du discours que le notaire m'a sorti quand j'ai su que j'avais été nommé tuteur légal de ses enfants.

Tout semble encore frais, alors que cela date de huit ans.

« — Ah, Peter... »

Perdu dans mes pensées, je n'ai pas remarqué la femme avec laquelle je rentre violemment en collision. Le choc est tellement intense que son corps bascule vers l'arrière. Pris par l'adrénaline, je passe un bras autour de ses hanches et la retient pour éviter qu'elle ne rencontre le sol carrelé et sûrement gelé.

Un si joli visage ne doit pas s'abîmer.

« — Vous allez bien ? Veuillez m'excuser, je regardais pas où j'allais !, expliqué-je en fixant ses grands yeux bleus. »

𝐒𝐭𝐚𝐫𝐥𝐞𝐬𝐬 𝐍𝐢𝐠𝐡𝐭Où les histoires vivent. Découvrez maintenant