Chapitre 1

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Le bruit de mes pas résonne à travers le palais. Mes chevaliers marchent derrière moi, parfaitement organisés, nos pas synchronisés, la tête droite, les bras le long du corps et la mâchoire crispée.

Je tourne légèrement la tête et vérifie mon apparence dans les miroirs ornant les murs du château. Ma robe verte resserrée autour de ma taille tombe jusqu'au sol et cache mes bottes qui remontent jusqu'à mes genoux. Je porte une cape en tissu fin noir par dessus mes épaules, et une dague est cachée dans une de mes bottes. Des mèches vertes contrastent avec mes cheveux noir corbeau qui me tombent au milieu du dos, et ma peau foncée rappelle le marron de mes yeux.

Suivie de mes soldats, j'entre avec assurance dans la salle de banquet du roi. Mon regard dur fait trembler les aristocrates sur lesquels je le pose. Je ricane en mon intérieur. C'est marrant de voir que je leur inspire de la crainte. Je m'avance vers le trône en soutenant les yeux verts du roi. Ses cornes rouge foncé, caractéristiques de la famille royale, s'élèvent sur sa tête et son sourire malicieux, toujours présent, montre le côté immature de sa personnalité et découvre une dentition parfaite. Bien qu'il soit un fin stratège et qu'il soit intelligent et rusé, il ne résiste jamais à la tentation. Il est jeune, mais il a au moins trois ans de plus que moi, et j'ai accompli plus de choses qu'il ne fera jamais, assis sur son trône à longueur de temps.

Je pose un genou à terre et courbe l'échine, avant de déclarer haut et fort :

- Que le soleil du royaume brille à tout jamais, et que les cornes de Sa Majesté Achlys continuent à jamais de pousser !

Les cornes des rois sont synonymes de prospérité et de paix, et si le roi les perd, il est immédiatement destitué et remplacé par l'héritier le plus proche.

Une jambe croisée sur l'autre et la tête se reposant sur son bras accoudé au trône, il me fixe de façon insistante. Ses cheveux noirs ébouriffés retombent sur ses yeux et jure avec sa peau extrêmement claire. Il se lève, s'approche de moi et pose la main sur mon épaule. Je relève la tête et le regarde droit dans les yeux. Il me sourit, et je réponds avec un froncement de sourcils.

- Relève toi, Guerrière Eowyn, déclare-t-il solennellement.

Je me dresse de toute ma hauteur, mais il me dépasse d'une demi-tête. Son visage s'approche du mien, mais je reste impassible. Son sourire plaqué sur son visage s'élargit, et il se recule avant de clamer :

- Dame Eowyn et ses chevaliers, ici présents, nous ont permis d'obtenir la paix et du territoire aux frontières de l'empire Lagoon. Nous n'aurons plus de guerre contre eux pendant au moins un siècle. Espérons que d'autres guerriers aussi puissants que notre générale apparaissent d'ici-là.

Des murmures se font entendre dans la salle, mais Achlys les fait taire d'un mouvement de la main.

- Pour célébrer cette victoire, ce banquet a été organisé. J'espère que vous pourrez vous remettre de la guerre avec cette nourriture et ces boissons. Maintenant, buvons, mangeons, et dansons !

La guerre, qui a duré plus de dix ans, est enfin terminée. Je n'arrive toujours pas à le réaliser. J'ai passé les dix dernières années de ma vie sur un champ de bataille, à côtoyer la mort toutes les journées et toutes les nuits, à dormir près de cadavres, et à manger du pain rassis tous les jours. Enfin, les jours où je mangeais.

J'étais entrée sur le champ de bataille à quinze ans. Non pas parce que je voulais, mais parce que, comme il n'y avait pas assez de soldats et que j'étais particulièrement douée, on m'y avait envoyée du jour au lendemain. Au fur et à mesure des batailles, on m'augmentait de grade, et j'avais fini par devenir générale.

La Guerrière d'EvergreenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant