Prologue

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Il neigeait. Sur la petite île de roches, un bâtiment blanc s'élevait de toute sa hauteur et dominait le vaste océan. Cela faisait plusieurs années maintenant que la guerre était terminée, pourtant on en ressentait encore la douleur et les cicatrices ne s'étaient toujours pas refermées. Le peu de survivants qu'il restait se battaient entre eux en espérant finir le dernier et tomber après les autres dans cet hiver qui n'en finissait plus.

Le vent hurlait en poussant de gros flocons contre les épaisses vitres du Laboratoire. Derrière cette même fenêtre, un grand homme brun a l'air sévère observait cette danse incessante de la nature. Il serait bien resté collé ici des heures à contempler la beauté sauvage de ces rivages perdus si seulement il n'avait pas autant de travail.

Une femme à haute stature entra dans la pièce, tenant un bloc-notes serré entre ses bras. Elle dit à l'homme d'une voix crispée :

-Il ne nous reste plus beaucoup de temps. Elle ne va pas tarder à s'éveiller.

L'homme ne se retourna pas et resta aussi immobile qu'une statue. Tandis que l'hiver se déchaînait dehors, à l'intérieur il faisait bon.

-Elle... elle est notre seul espoir, n'est-ce pas, docteur ?

Un moment empli de réflexion s'installa alors et l'homme se retourna enfin.

-Oui. Sans elle, la guerre ne prendra jamais véritablement fin.

Les deux scientifiques se mirent en mouvement et allèrent au centre du bâtiment. Les salles qu'ils dépassaient étaient aussi blanches que la neige de l'extérieur et on pouvait voir à travers les portes-fenêtres, toutes sortes d'expériences menées sur des humains vivants, ligotés et malheureux. Un binôme, composé d'un scientifique et d'un homme très maigre habillé d'une robe noire qui contrastait avec la blancheur de celle de son compagnon, passa devant les deux docteurs.

-Allez, avance, aboya le scientifique a l'adresse de son cobaye. Tu n'écoutes rien ! Il faut vraiment te traîner...

-Dans quelle salle vous rendez vous, collègue ? Demanda l'homme brun.

-314. Si seulement cette bourrique acceptait d'avancer ! Mais AVANCE, nº45-89, avance !

L'homme nº45-89 tressaillit à l'entente de son numéro et accepta d'avancer plus docilement, quoiqu'il se mit à trembler faiblement.

Les deux docteurs poursuivirent leur chemin jusqu'à une large porte de fer blanc. La femme sortit une carte de la poche de sa blouse et la scanna, ce qui eut pour effet d'ouvrir la porte.

La salle était véritablement immense. Tous les murs étaient blancs et un amphithéâtre circulaire faisait le tour de la salle. Sur les bancs, des centaines de scientifiques étaient assis et contemplaient la chose qui se trouvait au centre de la pièce, c'est à dire une sorte de grand et large tube accroché au sol et au plafond, rempli d'un liquide blanc dans lequel flottait une forme indistincte.

Les deux docteurs s'approchèrent du tube géant et des quelques biologistes qui tournaient autour en chuchotant.

-Une date a été fixée ? Demanda la doctoresse au chef des biologistes.

-Oui. C'est prévu pour après demain si tout se passe bien. On est en train de lui injecter les réflexes. Étant donné qu'elle a déjà l'intelligence, la beauté, la grâce, la sagesse, le savoir et tout le tralala, il ne manque que tout ce qui vient du côté mouvement. Hé, toi là bas, arrête de traîner et mets toi au boulot ! Il faut qu'on se bouge si on veut pouvoir l'animer dans deux jours ! Cria t'il à un jeune homme qui semblait sur le point de tomber de fatigue.

Le biologiste en chef brancha un nouveau câble relié au tube sur lequel était écrit le mot « mouvements » sur un fil avec écrit « corps ».

Il jeta de nouveau un regard au jeune homme fatigué et fut saisi d'un frisson d'effroi.
Dans sa confusion et sa fatigue, le jeune chercheur avait branché le câble « puissance » sur un fil « DANGER ».

Tout se passa alors au ralenti. Le biologiste se jeta sur le jeune homme, mais ce dernier enfonça le câble et un liquide rouge se mélangea avec le liquide blanc dans le tube. La forme flottante bougea. Tous les scientifiques, immobiles, les yeux braqués sur la forme, avaient l'air terrorisés.

Le liquide rouge fit craqueler la paroi du tube en verre. Les scientifiques avaient sauté sur le bouton « arrêt d'urgence », mais rien ne se passait. La forme bougea de nouveau, de plus en plus rapidement.
La fissure sur le verre continua sans cesse de grandir encore et encore.

Soudain, le verre explosa. Tous les hommes furent aspergés de liquide rose gluant. Une expression de surprise mêlée d'horreur se forma peu à peu sur leurs visages lorsqu'ils virent ce qui sortit du tube brisé.

Une femme entièrement nue se tenait là. Ses cheveux étaient noirs comme l'ébène, un noir pas naturel. Elle dit d'une voix éteinte et lointaine :

-Enclenchement du programme. Nombre de personnes supérieur à vingt : conclusion : il s'agit d'une armée : conclusion : je me dois de les détruire le plus efficacement possible.

Elle attrapa un câble et claqua des doigts. La friction provoquées par ce mouvement produit une étincelle. Elle alluma ainsi le liquide qui continuait d'affluer sur les scientifiques.

Elle jeta un regard flamboyant à l'assemblée. Le liquide chimique pris feu petit à petit et provoqua une grosse explosion.

Tout le bâtiment fut détruit.

Après l'explosion, le fouettement du vent se fit entendre, plus insistant. Un silence de mort s'installa, brisé seulement par le mugissement du vent et l'écho des vagues qui se brisaient sur la roche.

D'entre les gravats surgit alors la femme. Pas une seule égratignure. Elle regarda autour d'elle et remarqua une blouse de biologiste, peut-être celle du chef ou du jeune. Le propriétaire de cette blouse était en tout cas inconnu, méconnaissable, tant son corps était ravagé par l'explosion. Elle attrapa la blouse et s'en drapa, sûrement pour se protéger du froid mordant. La femme marcha en traversant les gravats et en observant autour d'elle. Elle se tourna alors vers un des corps, qui se révéla être celui d'un cobaye humain. Elle lut sur la plaque d'immatriculation de la personne : 41:55

La femme fouilla dans sa mémoire et trouva l'alphabet. Elle trouva les chiffres et les lettres. Elle dessina alors sur un rocher le numéro d'immatriculation avec la poussière.

41:55
Aliss.

Ce sera son nom, désormais.

Elle enjamba le corps du cobaye et quitta l'île de rocs, sans se retourner.

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Jiji

A.L.I.S.SOù les histoires vivent. Découvrez maintenant