Partie 1

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D'abord, elle entendit des bruits lointains, impossibles à déterminer. Les systèmes auditifs marchaient. Puis, petit à petit, elle sembla ouvrir les yeux, bien qu'elle eut la certitude qu'ils étaient déjà ouverts auparavant. 

Un décor blanc et bleu marine apparut dans son champ de vision, et la toute première chose qu'elle vit fut un torse. Un buste féminin, dépourvu de toute tête, bras ou jambes, qui reposait sur une table métallique. Elle cligna des yeux instinctivement, et une ombre apparut devant elle, masquant son champ de vision. Elle leva les yeux, incrédule, et constata la présence d'une femme à lunettes tenant une fiche, un chignon nouant ses cheveux. Elle avait les yeux rivés sur son papier, ne prêtant guère attention à sa personne.

- Bonjour madame, dit-elle calmement.

La femme en face d'elle leva le regard, et un sourire bienveillant apparut à ses lèvres.

- Bonjour, Héléna.

Sa voix était douce, quelque peu rauque, mais agréable à l'oreille.

- Héléna... répéta-t-elle. Il s'agit de mon nom ?

- C'est exact, confirma la femme. Du moins, c'est la contraction de ton ancien nom, H3le-11vb.oi.

Héléna fouilla dans sa mémoire. Oui, elle en avait de vagues souvenirs. Elle ne s'en souvenait pas vraiment, mais savait cependant que son corps avait eu une ancienne vie, qui n'avait pas été marqué dans ses systèmes.

- Que fais-je ici ? demanda Héléna.

- Tu viens d'acquérir une conscience, répondit la femme. Auparavant, tu n'en étais pas dotée. Mais aujourd'hui, tu possèdes ton libre-arbitre.

- Qu'est-ce donc ? Mes fichiers ne sont pas dotés de la définition.

- Cela signifie que tu es capable de faire tes propres choix, d'avancer selon tes désirs sans avoir à obéir à quelqu'un, d'être autonome.

Héléna médita ses paroles avec attention. L'idée lui plaisait. Dans son esprit, cela signifiait une infinité de possibilités, et la découverte de l'inconnu était une perspective excitante.

Héléna regarda de nouveau la femme, qui s'était aussitôt remis à griffonner des mots sur sa fiche, rédigeant probablement le compte rendu. Elle semblait concentrée. Sa peau semblait douce, ses yeux verts contrastaient à la perfection ses cheveux marrons. Elle était sa créatrice, et était magnifique.

- Comment vous appelez-vous ? demanda Héléna.

La femme releva la tête de sa fiche le temps de répondre.

- Tu peux m'appeler Camélia. Je suis l'une de tes conceptrices, et si tu veux tout savoir, je suis ravie de voir que le résultat est au-dessus de nos attentes !

Héléna sourit, et sentit ses traits du visage se déformer. Camélia parut amusée, et un sourire en coin, finit de rédiger sa phrase. Lentement, Héléna toucha du bout des doigts son visage. Le tissu bio-chimique qui imitait la peau recouvrait entièrement son visage, à l'exception d'une texture de plastique qui passait sous forme de tube sur l'arcade du nez et sous les yeux. C'était la particularité des .oi. 

Elle tendit ses bras devant elle, et se rendit compte qu'aucune peau ne les recouvrait. A la place, un cylindre mimant le biceps humain fait de platine luisait sous les lumières de la pièce. Héléna parcourut des yeux l'ensemble de son environnement. Elle semblait se trouver dans un laboratoire, des tables étant disposées un peu partout. Sans même s'en rendre compte, elle disposa ses pieds de manière à se retourner, pour regarder derrière elle : derrière une vitre légèrement teintée, des silhouettes d'autres androïdes se trouvaient. 

Héléna se rendit alors compte qu'elle était debout depuis tout ce temps, tenant sur ses jambes fines également dépourvues de peau. Quelque peu déboussolée, elle se retourna vers Camélia, qui avait posé sa fiche.

- Tout va bien, Héléna, la rassura-t-elle. C'est normal à ce stade là de réagir de manière perdue. Essaie de te connecter aux sources de ton programme.

Héléna s'exécuta, et eut alors connaissance du bureau de Cermh, dans le Sypt, le plus performant de tout Godart, produisant des androïdes .oi. Savoir où elle se trouvait lui permit de se calmer, et Héléna hocha la tête, au grand bonheur de Camélia.

- Tu es très réceptive, remarqua l'ingénieure. C'est très bien, vraiment.

- Est-ce que vous avez un miroir ?

Camélia parut quelque peu surprise.

- Euh... Oui. Il y en a un juste ici, sur ta gauche, mais il est face contre mur, attend...

Camélia traversa la pièce pour se rendre près d'une étagère, contre laquelle un large cadre en bois était posé sur le côté. Elle l'empoigna à deux mains, prenant gare à ne pas être gênée par sa blouse blanche, et commença à le déplacer. Héléna voulut se déplacer pour l'aider, mais elle semblait avoir sous-estimée la force de la scientifique : elle rabattit le cadre contre l'étagère, dévoilant la glace, dans laquelle Héléna, pour la première fois, put se voir. 

La naissance de HélénaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant