Partie 4

2 0 0
                                    

Camélia l'invita ensuite à choisir ses habits, ce qui ravit Héléna à l'idée. Il s'agissait là de ses premières importantes décisions. Elle s'approcha de la large étendue de vêtements, et commença à les examiner un par un. Fascinée, elle se rendit compte à quel point ses goûts pouvaient être variés et sans aucun sens l'un de l'autre. Si une chemise à carreaux orange pouvait l'intéresser, ça n'était pas du tout le cas d'une autre aussi orange mais à rayures, alors que seule la disposition des traits variait. 

En une minute, Héléna avait fait le tour de la sélection, et en avait gardé une bonne moitié en tête. C'était trop, elle le savait. En même temps, elle avait gardé tous les habits à qui elle trouvait un élément seulement intéressant. L'excitation, visible sur son visage, l'empêchait de faire un soin raisonné.

- Prends ton temps, Héléna, sortit Camélia dans un rictus. Ce n'est pas un marathon !

- Je sais ! se défendit l'androïde. C'est juste que tous ces habits sont si... Élégants. D'où vient-il, celui-ci, il n'est pas dans mes données ni sur Mégaphile.

Elle montra un cardigan turquoise à la texture inconnue. Camélia réajusta ses lunettes, plissa les yeux.

- Ah ! C'est une matière euterpienne, le doaok, je crois. C'est soyeux ! Et la couleur t'irait à la perfection.

- C'est vrai ?! sortit Héléna.

- Sans aucun doute ! Mais trouve-toi le reste de ta tenue d'abord.

Héléna repassa en revue les vêtements avec un peu plus d'attention, se devant de faire des sacrifices nécessaires par moment ; au final, elle se retrouva avec un t-shirt blanc, très simple, et un pantalon jean flare bleu marine.

- Le pantalon est en L, dit Héléna, cela risque d'être trop large.

- Ne t'en fais pas, il y en a des neufs dans les tiroirs à côté. Tu ne vas pas porter ceux-ci, ils sont ici en tant que modèles.

Camélia fouilla dans trois tiroirs différents, et en sortit les trois habits taille M que Héléna tenait dans ses bras. Ils étaient dans un emballage plastique, et l'androïde n'attendit pas une seconde avant de les déballer et de les brandir fièrement face à elle tour à tour.

- Je vais te laisser t'habiller, ok ? dit Camélia. Je suis juste dans le couloir.

- Ça marche, dit Héléna. Si j'ai une complication je te fais signe.

Camélia brandit à nouveau son pouce, et sortit de la pièce, la porte se refermant brutalement après que son talon avait passé la porte. Héléna nota que son vocabulaire et ses manières commençaient à évoluer, qu'elle devenait de plus en plus décontractée, ce qui était une bonne chose.

Elle se déshabilla méthodiquement, gardant avec elle les habits utiles qu'elle n'avait pas eu l'opportunité de choisir tels que la culotte et les chaussures. Héléna se stoppa alors. Elle ne le remarquait que maintenant, mais un second miroir se trouvait au dos de la porte d'une armoire, et elle se voyait nue pour la première fois. Son buste était le même que celui qui avait constitué sa première vision au monde, lui heureusement pourvu de peau. Héléna passa sa main métallique le long de son corps. Aucun poil n'apparaissait. Soit par souci d'implantation - elle y croyait moyen car ses cheveux en étaient la preuve vivante - soit parce qu'ils n'étaient pas considérés dans la notion de "perfection". Ses seins ne tombaient pas, son nombril était parfaitement rond et creux et la forme de son corps lui rappelait les croquis de dessins féminins que l'on pouvait facilement trouver dans les bandes dessinées ou autres œuvres artistiques. 

La réalité la percuta alors de plein fouet. On ne l'avait designé que pour être la femme parfaite de l'imaginaire collectif. Elle était telle que l'on se représentait le mot "femme". Si cela pouvait paraître évident, ça ne l'était pas pour Héléna. La perfection ne signifiait pas l'absence de toute irrégularité sur un corps, au contraire. Ces irrégularités participaient à atteindre la perfection. En réalité, elle n'était qu'une pâle copie du modèle féminin par défaut. 

La naissance de HélénaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant