SAUDADE

Chapitre XXIX - Les cachots de l'Arcane

Deux silhouettes glissaient silencieusement dans l'obscurité, faiblement éclairée par les chandeliers accrochés sur les murs humides. Leur lumière vacillante projetait leurs ombres furtives à mesure qu'ils descendaient, créant une atmosphère aussi envoûtante qu'inquiétante. Victoria menait la marche avec une détermination inébranlable. La curiosité brûlante de la jeune vampire se reflétait dans ses yeux rouge écarlate. Derrière elle, Joseph, son compagnon temporaire ou plutôt son otage, avançait à contrecoeur, ses pas empreints d'une hésitation palpable.

__ Nous devrions nous arrêter ici, murmura Joseph, sa voix résonnant dans un écho inquiet.

__ Tu continues avec moi, que tu le veuilles ou non, déclara-t-elle, fermement.

__ Aller plus loin est insensé ! Nous ignorons tout de ce qui nous attend une fois en bas !

Mais Victoria ne l'écoutait pas, emporté par l'excitation de la découverte et le frisson de l'inconnu. Un mélange dangereux qui l'attirait irrésistiblement depuis qu'elle avait rejoint les rangs de l'Arcane.

__ Ne laisse pas la peur te dicter tes actes, Joseph. Les plus grands secrets se cachent toujours dans les profondeurs. Nous devons aller jusqu'au bout.

__ Que de belles paroles, pour une personne qui nous condamne à l'errance éternelle !

Joseph faisait référence à l'un des pires châtiments que réservait le prince Bartholy et ses conseillers, aux vampires coupables de trahison. Cette pensée fit frissonner Victoria sans pour autant arrêter le feu du savoir qui l'animait. Alors qu'ils progressaient, le couloir s'arrêta sur une intersection, il y avait deux chemins à droite et à gauche d'eux. L'endroit ressemblait trait pour trait aux longs couloirs vertigineux de l'Arcane.

Victoria se questionna sur le meilleur choix possible, tandis que Joseph pestait, craignant de se faire prendre sur le fait, puisqu'il ne semblait y avoir aucune cachette possible quelque soit le couloir qu'ils prendraient. Victoria ferma les yeux pour retrouver plus de sérénité et se concentrer sur son ouïe surdéveloppée. Elle entendit les cliquetis des gouttes d'eau frappant les dalles, le craquèlement des pierres qui travaillaient entre elles et le son strident de l'entrechoquement des chaînes en fer ! Ses yeux s'ouvrirent en grand et elle disparut en une fraction de seconde dans un des couloirs. Joseph, effrayé à l'idée de la perdre de vue et d'être livré à lui-même dans cet endroit inconnu, sprinta pour la rattraper.

Ensemble, ils plongèrent un peu plus profondément dans ce lieu d'ombre et de mystère, où chaque pas les rapprochait des réponses qu'ils cherchaient et des dangers qu'ils redoutaient. Les couloirs devenaient moins étroits et plus éclairés que les précédents. Les murs dévoilaient des portes massives faisant penser à celles des hôpitaux psychiatriques pour les unités des résidents à haut risque de danger. Cet endroit réveilla des souvenirs endormis de la jeune vampire qui avait repris une cadence plus calme pour mieux observer les environs. Les grandes portes blindés ne laissaient rien entrevoir, dissimulant l'horreur qui se trouvait certainement à l'intérieur. Ou peut-être n'était-ce que de simple pièce vide, se rassura-t-elle. Des flashs de hurlements brouilla son esprit alors que son regard s'arrêta sur une cellule ouverte, ses crocs sortirent instinctivement à l'odeur de fer et à la vue des murs tachetés de sang frais. Un carnage c'était produit dans cette pièce tout récemment. Les responsables étaient certainement les conseillers qu'elle avait croisés plus tôt.

__ Je ne le sens pas, Victoria. On a rien à faire, ici, dit-il dans un murmure.

__ Avançons.

Ils continuèrent à se glisser à pas de loup dans le long couloir, entendant de mieux en mieux les bruits de chaîne en fer glissant dans un son strident, sur le sol en pierre. Ils arrivèrent devant une autre porte de prison où cette fois-ci, il était possible de voir à travers des barreaux. Le vampire enchaîné releva les yeux vers eux et son regard s'écarquilla lorsqu'il reconnut la jeune vampire. En une fraction de seconde, il était face à elle, les mains accrochées désespérément aux barreaux. Ses yeux rougeâtres lançaient des éclairs de haine et sa mâchoire était contractée. Victoria fut interpellé par l'absence de canines.