En cette matinée grise et maussade, Gabriel Attal contemple la pluie s'écouler lentement sur la fenêtre de son bureau donnant sur la cour de Matignon, repoussant le début de sa journée de travail. Les piles de courrier s'étaient amoncelées sur son bureau en bois d'ébène, dissimulant presque entièrement sa surface. Par dépit, il finit par saisir l'une des lettres enfouies dans un amas. L'enveloppe est étrange, aucun timbre n'y est attaché. Le premier ministre, intrigué, l'observe sous tous les angles pour trouver le nom de l'expéditeur, mais en vain. Il se munit de son canif, découpant soigneusement le rabat. Il dévoile avec précaution le papier qui avait été soigneusement plié en trois, révélant une lettre manuscrite.
Cher M. Attal,
Il y a de cela quelques jours, nous avons eu une altercation lors d'un débat télévisé qui n'a malheureusement pas abouti à grand-chose. Je suis convaincu que nous pourrions trouver un terrain d'entente, hors des caméras pour dévoiler sincèrement nos pensées, et ainsi établir un lien plus solide entre nos différentes idéologies. Je serais ravi de vous rencontrer à l'arrière du Café La Tribune, ce jeudi soir à la tombée de la nuit.
En espérant vous retrouver bientôt,
Jordan Bardella.
Le chef du gouvernement reste bouche bée face à la lecture, déconcerté par l'identité de l'auteur. Son esprit vacille un instant, tentant de saisir cette nouvelle inattendue. Les mots résonnent encore dans sa tête, tandis qu'il relit chaque phrase avec plus de concentration. Jordan Bardella l'invite bel et bien à discuter le jeudi soir, une proposition qui fait naître en lui un tourbillon d'interrogations. Il se demande s'il s'agit d'une stratégie finement tissée par le Rassemblement National, ou d'une rencontre amicale sincère. Le doute persiste toujours dans son esprit, mais il décide tout de même de vérifier son agenda afin de voir s'il est disponible pour l'heure du rendez-vous. C'est alors qu'il réalise que c'est déjà jeudi et que la rencontre est prévue le soir même, ne lui laissant que peu de temps pour faire un choix décisif. Alors qu'il est absorbé dans ses pensées, la sonnerie stridente du téléphone retentit, brisant le silence pesant de sa réflexion. Il s'agit là d'un appel émanant d'Emmanuel Macron lui-même, ce qui ne manque pas de captiver son attention instantanément. Il hésite un instant, le cœur encore battant du dilemme auquel il faisait face, avant de finalement prendre son courage à deux mains et de décrocher le téléphone.
- « Bonjour Gabi, j'espère que je ne te dérange pas mais il faudrait que tu passes me voir ce midi c'est important. », annonce Emmanuel d'une voix vive et enjouée.
Gabriel marque un temps de pause avant de donner sa réponse, se sentant encore troublé.
- « D'accord oui, je...je passerai. », frémit-il.
- « Tout va bien Gabi ? J'interromps quelque chose ? », interroge le président.
- « Ce...ce n'est rien Manu, juste qu'il se passe beaucoup de choses en ce moment j'ai du mal à tout suivre correctement.», invente Gabriel afin de ne pas inquiéter son mentor.
- « Je comprends. Dans tous les cas sois là à midi. »
L'appel se coupe brusquement sans que Gabriel puisse acquiescer. Il se retrouve seul, le téléphone toujours à la main. Il lâche un soupir d'exaspération, submergé par la nervosité et l'accablement. À peine sa journée commence-t-elle qu'il est déjà pris d'une angoisse palpable. Pendant qu'il cherche à s'occuper l'esprit autrement, les minutes s'écoulent lentement jusqu'à l'heure fatidique. Il se dirige vers l'Élysée, s'assurant discrètement de détruire la lettre de Bardella pour ne laisser aucune trace compromettante. Conduit par son chauffeur à bord de sa voiture noire de fonction, il fixe le paysage urbain défilant à travers la vitre teintée et s'efforce de purger son esprit, cherchant la sérénité. Malgré sa familiarité avec les invitations surprises d'Emmanuel, un sombre pressentiment l'étreint. Il essaie de rester rationnel, réalisant que son mauvais pressentiment est intimement lié à la lettre qu'il a lue quelques heures plus tôt et qu'il a encore les idées embrouillées. Il parvient finalement à retrouver son calme après ce trajet qui lui a semblé interminable. Quand la voiture s'arrête enfin devant l'Élysée, Gabriel sort plus serein que lorsqu'il est parti. Il avance d'un pas déterminé vers le bâtiment imposant, avant d'être escorté rapidement jusqu'au bureau d'Emmanuel Macron, où celui-ci l'attend déjà.
- « Installe toi Gabi, j'arrive tout de suite. », annonce le chef de l'État en partant furtivement de son bureau.
Gabriel s'installe sur son fauteuil habituel, et n'attend pas plus de deux minutes avant qu'Emmanuel n'arrive avec un sac plastique en main.
- « J'ai commandé de quoi manger pour nous, je commence à être gavé par le caviar tous les midis ici. », dit ce dernier d'un ton ricanant.
- « Ne t'en fais pas, je n'ai pas très faim aujourd'hui et je ne compte pas m'éterniser ici. », lui réponds Gabriel l'estomac noué.
- « Gabi, fais moi plaisir et partage ce repas avec moi. », insiste le dirigeant.
Le récent premier ministre cède à cette demande et commence à déjeuner. Seuls dans le bureau, ils entament une conversation concernant la popularité actuelle des partis en prévisions des élection européennes ayant lieu la semaine suivante.
- « Je veux que tu comprennes une chose Gabi, ne fais surtout pas confiance aux autres. Ils feront tout pour t'amadouer afin d'avoir ne serait-ce qu'un brin de pouvoir. En particulier le RN, leur côte ne fait que s'accroître et j'ai bien peur qu'ils ne cherchent à nous atteindre. », affirme le président Macron.
Gabriel réfléchit profondément aux paroles de son interlocuteur. Il constate que cela fait beaucoup écho à la lettre qu'il a lue ce matin. Cependant, seul lui est au courant de l'invitation de Monsieur Bardella, à moins que le chef du pays n'ait été informé d'une manière quelconque ? Malgré tout, cet avertissement ne dissuade pas le jeune politicien. Au contraire, il devient de plus en plus intrigué par l'invitation qu'il a reçue. Sa détermination à rencontrer l'homme à la tête du Rassemblement National ne fait que croître, animée par le désir d'élucider ce qui se trame en coulisses. Au fond de lui, il espère pouvoir percer les mystères de son ennemi politique et, par la même occasion, impressionner Emmanuel en lui fournissant des informations stratégiques. Après son déjeuner avec ce dernier, Gabriel retourne à ses responsabilités quotidiennes, mais une seule pensée occupe son esprit : mettre un pied au Café La Tribune. C'est là qu'il espère obtenir des réponses, et percer à jour le jeu de l'étoile montante Jordan Bardella.
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Sous le ciel de Matignon
FanficPlongé au cœur des arcanes du pouvoir politique français, Gabriel Attal se trouve confronté à une situation des plus étranges : une invitation mystérieuse de Jordan Bardella. Entre suspicion et intrigue, il doit décider s'il suivra son instinct poli...