All the King's Horses // Minchan //

5

Sa conscience fut comme une décharge dans tout son corps et Minho rouvrit les yeux. Sa vision floue mit quelques instants à se stabiliser mais ces secondes furent suffisantes pour prendre conscience d'une chose : quelque chose n'allait pas. En face de lui, un plafond de pierre sombre. Il était allongé. Le front plissé, il concentra sa magie dans ses doigts pour faire apparaître une flamme. Rien ne se passa. Un son indistinct mais perdu lui échappa et il amorça un mouvement pour s'asseoir. Le cliquetis des chaînes lui fit enfin remarquer les gants de fer qui enserraient ses mains. Du fer. Une sueur froide coula le long de son échine, il leva les yeux et vit qu'il était dans une cellule. Il était prisonnier. Ils l'avaient retrouvé ? Comme un animal en cage, Minho se leva et tira sur les chaînes, qui reliaient ses mitaines de fer au mur, mais elles étaient évidemment trop solides pour lui. Des larmes brûlèrent ses yeux, à la fois de frustration mais aussi de douleur, ses mouvements avaient rouvert la plaie de son épaule causée par la flèche et sommairement pansée.

« - Inutile de t'acharner. »

Cette voix inconnue le fit se retourner vers la porte de sa cellule, les mains levées comme il avait l'habitude de faire pour invoquer sa magie. Mais il ne le pouvait pas et, lentement, ses mains retombèrent alors qu'il étudiait l'homme de l'autre côté des barreaux. Plutôt petit, mais incroyablement musclé, un plastron avec un blason qui lui était inconnu dessus, une épée étincelante à la ceinture, et des yeux farouches.

« - Pourquoi avoir enlevé Felix ? À qui devais-tu le vendre ? Combien t'a-t-on offert ? »

Ces questions successives prirent le mage par surprise. Il fronça les sourcils en chancelant mais il resta debout, refusant de paraître faible :

« - Je ne devais le vendre à personne, pourquoi-

- Alors pourquoi l'avoir enlevé ? le coupa le soldat, énervé. »

Minho sentit l'agacement naître en lui et ses prunelles scintillèrent :

« - Je ne l'ai pas enlevé, martela-t-il. J'avais certainement autre chose à faire que de m'encombrer d'un enfant. »

S'il s'agissait de n'importe quel autre petit garçon, il l'aurait qualifié de morveux. Mais là c'était Felix, avec son sourire rayonnant, ses gloussements, sa magie blanche et ses taches de rousseur. Sa gorge se noua, Minho se laissa tomber sur la misérable paillasse qui faisait office de couche :

« - Est-ce qu'il va bien ? »

Cette fois, ce fut le soldat qui fut pris par surprise, il répéta :

« - Est-ce qu'il va bien ?

- Oui, siffla le mage, impatient, il n'est pas blessé ? »

Il avait tout fait pour le protéger, mais... Ses sourcils se froncèrent soudain alors qu'il se souvenait :

« - Son père... Il croisa le regard du soldat. Comment nous avez-vous retrouvés ? »

Il s'apprêtait à répondre quand un homme sortit de l'ombre d'un pilier de pierre. Ses cheveux étaient d'un étonnant blond qui tirait sur l'orangé. Des yeux noirs, un nez large, une bouche pleine... Le mage le reconnut aussitôt :

« - Vous ! Vous êtes son père.

- À qui devais-tu livrer Felix ? »

Le visage de son père était neutre. Bien trop neutre, et Minho n'avait pas besoin de sa magie pour deviner que ce n'était qu'une façade. Il garda le menton haut malgré le sang qu'il sentait couler dans son dos :

« - Je ne l'ai pas enlevé ! Je l'ai trouvé avec des bandits dans la forêt, je ne pouvais pas le laisser là. Je voulais même l'abandonner dans une ville, aux autorités locales mais- il se tut et détourna un instant les yeux. Je n'ai pas pu.

- À cause de sa valeur ? »

Il retint à grande peine un mouvement de recul. Comment le garde pouvait être au courant de la magie du jeune garçon ? Ses yeux plissés étudièrent les deux hommes et il finit par secouer la tête :

« - Non. C'est... C'est lui qui s'est accroché à moi. »

C'était clair sur leur figure qu'ils ne le croyaient pas. Le père de Felix eut un reniflement moqueur et un geste de la main :

« - Viens Changbin. Peut-être qu'il sera plus disposé à parler après quelques jours de cachot. »

Après un dernier regard, ils quittèrent les lieux. La façade brave du mage disparut tout aussi vite et il s'affaissa contre le mur, le souffle court. Pourquoi étaient-ils si persuadés qu'il avait enlevé Felix ? L'enfant n'avait visiblement aucune conscience de sa magie, alors comment les deux hommes pouvaient-ils le savoir ? Lui cachaient-ils cette information ? Que voulaient-ils alors de lui ?