Draker

CHAPITRE 3 : Modrak

CHAPITRE 3 

MODRAK

GRACE

(Quelques heures avant, dans l'après-midi)

     Pendant que les autres s'étaient rendus à leur troisième activité de la journée, Grace, lui, attendait l'heure de son rendez-vous hebdomadaire en griffonnant dans son journal. A chaque fois qu'il avait du temps libre, il s'enfermait dans sa chambre et passait des heures à écrire. Il ne le faisait pas par plaisir mais par nécessité. Il devait écrire pour ne pas oublier. 

     Il tenait secrètement un journal dans lequel il racontait ses journées, ici, à Modrak. Mais certaines pages qu'il datait toujours la veille pour le lendemain demeuraient sans aucune annotation et il n'avait aucune explication à cela. 

     Alors qu'il relisait les dernières pages de son carnet, un signal lumineux, situé au-dessus de son bureau, l'alerta de son rendez-vous. Aussitôt, il se leva de son lit, replaça précautionneusement le journal à sa place, derrière la première rangée de livres de sa bibliothèque et quitta son box. 

    Grace avait ce privilège que les autres n'avaient pas : l'accès au sixième étage où se situait le laboratoire. Modrak occupait les cinq étages inférieurs d'une immense structure cylindrique. Un pilier central abritait l'ascenseur et desservait les différents niveaux grâces à des passerelles. Les appartements, agencés en box, tous similaires occupaient trois étages. Le rez-de-chaussée qui donnait sur les jardins, la piscine et l'espace de jeux pour les enfants comprenait des espaces communs qui se poursuivaient sur le premier et deuxième étage. Il y avait entre autre une salle de sport équipée de matériel de musculation et des tapis de courses, un SPA, une bibliothèque dans laquelle on pouvait trouver une sélection de documentaires ainsi que des ouvrages d'activités telles que la peinture, la sculpture, la poterie, le dessin, la musique, le sport, la couture, la cuisine, la danse, le jardinage... Tous les jours, ces activités étaient proposées et chacun devait choisir et s'inscrire la veille à l'activité qui lui plaisait. A la fin de la journée, une veillée était organisée autour d'un gigantesque buffet. Chacun pouvait exposer l'œuvre qu'il avait réalisée le jour même ou présenter une prestation artistique ou sportive. La communauté vivait à l'intérieur de Modrak dans l'amour, la paix et l'harmonie et ce depuis des années. 

     A chaque fois qu'il se rendait au laboratoire, Grace devait scanner son numéro inscrit sur son poignet afin d'autoriser l'accès. Une fois son identité reconnue, deux immenses portes métalliques s'ouvraient et se refermaient derrière lui avec un bruit sourd. Il se retrouvait enfermé au milieu d'un petit sas plongé dans une semi obscurité puis après un moment, les portes du fond coulissaient lentement et Grace s'installa dans la salle d'attente.

     L'horloge placée juste au-dessus de sa tête indiquait maintenant quinze-heures- vingt-neuf et Grace fixait l'aiguille rouge qui venait tout juste de faire un tour complet du cadran. Au même moment, il entendit des pas. Quelqu'un s'approchait. Il tourna la tête et fixa la femme inconnue qui se tenait devant le seuil de la porte. Il accrocha son regard puis il lui sourit. Le garçon venait de reconnaître Nathalie, sa tutrice attitrée qu'il voyait pour sa séance hebdomadaire. 

     — On y va Grace ! C'est l'heure !

    Grace se leva de son siège et suivit Nathalie. En chemin, ils croisèrent plusieurs personnes, toutes vêtues d'une longue blouse blanche et de masques chirurgicaux. Il y avait beaucoup de monde qui déambulait dans les couloirs, des nouveaux visages qu'il n'avait encore jamais vu mais aussi des regards familiers qu'il avait déjà croisé. Il leur sourit et les salua par politesse. 

    Arrivés dans la salle, Nathalie fit signe au jeune homme de prendre place sur le siège en face de son bureau et sorti un dossier intitulé « E.P 221 ». Elle saisit ses lunettes au-dessus de sa tête et les plaça sur son nez, puis elle attrapa un stylo et commença à relire ses notes et à griffonner. Elle leva la tête et lui sourit.