Chapitre 1

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Voilà plus de 10 ans que ce cadre est accroché au mur dans le couloir et que maman ne le retire pas. Nous sommes quatre sur cette photo : maman, Sarah, Vanessa et moi.
Vanessa était la meilleure amie de maman de notre naissance jusqu'à nos onze, douze ans à Sarah et moi. Elle venait tous les étés avec nous en Italie chez mamie pendant un mois entier.

Le reste de l'année, nous la voyions très peu, voire pas du tout. Elle prenait de nos nouvelles parfois et nous envoyait des cartes postales de là où elle voyageait. Parfois même, nous recevions des photos d'elle avec de beaux garçons comme dans les magazines, mais jamais le même. Van n'a besoin de personne et n'a envie de personne ou seulement pour une très courte durée et parfois même pas une journée entière.

Un soir d'été, il devait être vingt et une heures, Sarah et moi étions allées nous promener dans le village de nos grands-parents que nous connaissions par cœur.

- Vite Sarah, on devrait déjà être rentrées depuis plus de quinze minutes !

Plus on se rapprochait de la maison, plus on entendait du bruit, des voix. Nous étions trop loin pour entendre de qui il s'agissait et nous n'en avions pas grand-chose à faire puisque tout ce qui nous importait c'était ce qu'on allait dire à maman pour ne pas nous faire gronder à cause de notre retard. Même si nous savions pertinemment que Van allait trouver quelque chose à lui dire pour nous défendre, mais pas ce soir-là.
Plus ce soir-là, ni les autres soirs, puisque nous ne savions pas encore qu'il n'y aurait plus de « ce soir ».

En nous approchant au point d'être juste derrière la porte au bout de la petite allée du jardin de mamie, on pouvait maintenant entendre très distinctement qui haussait la voix à en réveiller les morts du village.
C'était maman et Vanessa. On ne pouvait pas entendre ce qu'elles se disaient, mais ce qui était sûr c'est qu'elles se disputaient et on ne savait pas depuis combien de temps.

Quand nous sommes entrées dans la maison, mamie nous a serrées dans ses bras au point de presque nous étouffer et nous a parlé fort, plus fort que d'habitude. Non pas qu'elle nous criait dessus, mais elle parlait quand même étrangement fort.

- Les filles, allez prendre vos douches, brossez-vous les dents et on ira regarder les étoiles dans le jardin.

- Les étoiles ! Les étoiles ! Criait Sarah.

- Oui, ma chérie, mais d'abord la douche, veux-tu ?

Ma sœur a toujours aimé l'astrologie, enfin plus que moi, et encore aujourd'hui.

J'ai compris bien plus tard que ce soir-là elle avait parlé fort pour que nous n'entendions pas la dispute de maman et Van. Enfin, le sujet de cette dispute, et encore aujourd'hui, je ne connais pas la raison de celle-ci.

Donc ce soir d'été, ma sœur et moi partons à la douche avec la promesse de voir des étoiles dans le ciel jusqu'à tard dans la nuit.
Des fois, il arrivait même que mamie s'endorme et se mette à ronfler à côté de nous. Alors, elle allait se coucher en nous demandant évidemment de ne pas veiller trop tard, même si elle savait pertinemment que nous allions nous réveiller à l'aube dans le jardin à cause de l'humidité du matin. Elle nous le disait pour sa bonne conscience et pour ne pas qu'on puisse dire à maman qu'elle ne nous l'avait pas dit.

Mais ce soir-là, cette promesse n'allait pas être tenue. Sarah était dans la douche, quant à moi qui étais en train de me brosser les dents, on entendit des bruits de pas lourds dans les escaliers grinçants de la vieille maison. La porte s'ouvrit en fracas à tel point que j'ai sursauté de panique, panique qui m'était transmise par maman qui nous parlait de façon si stoïque que c'était pire que si elle nous criait dessus.

- Les filles, vous ramassez vos affaires, on s'en va. Sarah, dépêche-toi de sortir de la douche, dans dix minutes, on est parties.

La phrase au complet n'invitait à aucune question, alors nous sommes restées silencieuses. Même après que maman soit sortie, le silence régnait en maître dans la petite salle de bain de l'étage.

VANESSAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant