L'entraînement

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Adelio me toise du regard, tout en continuant de manger son petit déjeuner. Contrairement à hier soir, il n'y a pas grand monde dans la réception de l'auberge. Ils doivent être tellement ivres qui n'ont pas été capable de se réveiller ce matin. J'aurai préféré manger des fruits en guise de premier repas de ma journée, mais je me contenterai du restant de viande de la veille avec un pain. Ma cuisse ne me fait quasiment plus mal, ce mélange verdâtre qu'elle m'a appliqué à marcher comme de la magie. La femme de la réception est toujours là, nous jetant régulièrement des coups d'œil. Elle doit se douter que nous ne sommes pas habitués à ces endroits, et doit probablement se demander d'où nous pouvons provenir. Dormir sur un lit cette nuit m'a fait un bien fou, j'ai dormi sans me réveiller une seule fois. Adelio lui aussi devait être exténué. Avait-il dormi les jours où il me recherchait en dehors de Sedith ? A chaque fois que le regarde manger son assiette, je me rappelle qu'un jour, il me tuera. Je tente d'apprécier ce moment de calme, où il ne cherche pas à m'assassiner, je regrette même que nous en sommes arrivés là. Peut-être aurions-nous pu être amis si notre rencontre n'était pas basée sur un meurtre ? Je chasse cette dernière pensée de mon esprit. Personne ne voudrait être ami avec quelqu'un d'aussi froid et détaché des autres. Il est arrogant et mauvais, ce qui le fait être aussi détesté. Il me tuera, une fois qu'il rentrera à Sedith, ou s'il reçoit une lettre officielle du roi. Mais personne ne pourrait nous retrouver, perdus entre les royaumes. Adelio ne m'a pas parlé depuis que nous nous sommes levés. Sa mission est simplement de garantir ma protection, rien de plus. Je ne termine pas mon assiette, et laisse un bout de pain de côté. Soudain, un vacarme retentit dans la salle. Un groupe d'hommes rentre dans la l'auberge en balançant la porte qui vient taper violemment le mur. La femme de l'auberge sursaute au même moment. Je me retourne pour mieux les voir, et me fige. Je reconnais la bannière du serpent sur leur armure.

—Vous n'auriez pas vu une jeune femme, cheveux longs, noirs, yeux verts, accompagnée d'un homme ?

Il fait ma description exacte. Je reconnais sa voix. La femme se tourne vers nous en fronçant les sourcils, chose que les hommes imitent. Adelio baisse le regard et je n'ose plus me retourner.

— Non, répond t-elle, cette description ne me dit rien du tout.

— Vous êtes sûr ? Continue t—il en posant son épée sur le bar.

Adelio me fait signe de me lever discrètement et m'indique la porte. Il faut qu'on sorte d'ici rapidement. J'attrape de la main une cape laissée à l'abandonnant sur une chaise de l'un des hommes ivres de la veille. Je la place sur ma tête et marche doucement vers la sortie, les yeux rivés au sol.

— Pourtant, on m'a indiqué qu'ils seraient ici, continue-t-il de la menacer.

— Je vous dis que je n'ai vu personne ayant cette description dans mon établissement.

Elle ne se laisse pas faire. Je crains même pour elle, elle qui ne semblait pas m'apprécier pourtant. Adelio passe la porte en premier sans se faire remarquer. Il ne reste plus que moi. J'arrive à mon but lorsque je me fais interpellée.

—Excusez—moi, demande-t-il.

Je me fige à nouveau en fixant le sol. C'est fichu. Il s'approche de moi et je peux sentir odeur nauséabonde d'un cadavre se rapprocher.

— Vous n'auriez pas vu une jeune femme, cheveux noirs avec des yeux verts dans le coin ?

— Non répond ai-je en passant le pas de la porte.

Au même moment, le courant d'air de la porte fait tomber ma cape. Je croise le regard de Malikh, un sourire de dessine sur ses lèvres. Son œil est fermé, une balafre lui traverse le coin de sa lèvre jusqu'à son sourcil, traversant l'œil au passage. La balafre que je lui aie faite.

Screaming HeartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant