Les feuilles orangées tombant sur les trottoirs, les voitures roulant dans les flaques d'eau, le vent soufflant sur les passants et la brume s'installant à la tombée de la nuit, nous voici finalement au coeur de ma saison préférée, l'Automne. Des journées humides et presque froides, pendant que certains s'abritent pour ne pas tomber malade d'autres sortent pour enfin profiter des jours de pluie. Bon nombre de connaissances m'ont longuement reproché cette mentalité, vouloir passer mes journées seule sans le moindre contact social. C'est pourtant tout ce dont j'ai besoin, l'être humain me fascinera toujours à ne pas vouloir comprendre ses semblables.
Je marche maintenant depuis une vingtaine de minutes, errant dans les rues de Los Angeles à la recherche d'un abri pour cette nuit. Ma mère ayant encore fait des siennes, je ne préfère pas rentrer chez moi avant quelques jours. Dieu sait de quoi elle est capable lorsqu'elle boit un peu trop. Et n'ayant pas d'amis pour me sauver, je ne peux m'y réfugier le temps d'une nuit.
Je trouve finalement un arrêt de bus protégé de la météo défavorable et m'y installe pour réfléchir. Le son de mon téléphone surgit, me sortant de mes pensées. Un nouveau message, et pas des moindres.
Tyler
"Ellie, il faut qu'on parle. C'est urgent ! Où es-tu ?"
J'ai peut-être un peu menti. J'ai un ami. Un seul mais un véritable que je n'échangerais pour rien au monde et il s'agit bien de Tyler. Je suis un peu surprise de son message. Lui qui est sans cesse souriant et farceur, une attitude de ce genre ne lui ressemble absolument pas. Étant maintenant trop loin de ma maison, je décide de l'appeler.
- Allo, Tyler ?
- Tu daignes enfin de me répondre, bordel ?!
- Calme toi mec, je suis dehors. Comprends bien que je n'entends pas toujours mon téléphone sonner.
- Tu devrais. Écoute, j'ai une mauvaise nouvelle...
- Eh bien, je t'en prie.
- Je préférais te la dire en face, viens chez moi dès que possible.
- Attends mais je suis pas chez-
Il a raccroché. L'enfoiré, il va me le payer. Je n'arriverais pas chez lui avant une bonne heure et je n'ai d'autres choix que de marcher sous une pluie torrentielle. La nuit s'annonce difficile, sans compter que demain, je fais ma rentrée. Deux mois après tout le monde, en Novembre. Ma dernière année d'école avant ma majorité, avant l'université et le monde du travail que je n'ai d'ailleurs aucunement envie de rejoindre.
...
Après une bonne heure de marche, j'arrive au petit parc situé devant la maison de mon meilleur ami. Il m'attend là, posé sur une balançoire, son téléphone en main pour l'occuper. Il relève la tête lorsqu'il m'entend arriver et vient me prendre dans ses bras. Bien que je ne sois pas tactile, son contact passera toujours quand il s'agit de Tyler.
- Te voilà enfin.
- J'espère sincèrement que ta nouvelle est importante, pour m'avoir fait marcher autant... Je suis trempée.
Il se gratte l'arrière de la tête, semblant un peu gêné de m'annoncer cette nouvelle que j'attends maintenant depuis son appel.
- Accouche, mec. Dis-je en voyant son hésitation.
C'est lorsque j'aperçois une larme perlé aux coins de ses yeux que je comprends l'importance de la chose.
Tyler ne pleure jamais.
Ne sachant toujours pas ce qui le met dans cet état, je lui tends mes bras alors qu'il vient directement se blottir contre moi. Il n'est pas très grand, il ne dépasse même pas le mètre quatre-vingt recommandé pour la moyenne de son âge. Malgré ça, il me dépasse largement. Je ne dépasse même pas le mètre soixante, pour mon plus grand malheur.
- Yo, Tyler dis moi...
- Je déménage.
J'écarquille premièrement les yeux, n'étant pas totalement sûre de ce que je viens d'entendre. En le voyant fondre en larmes de plus belle, je comprends rapidement que ce n'est pas du tout une blague de sa part.
- Quoi ? Demandais-je à nouveau.
- Je déménage, putain ! Mes parents veulent emménager à New York...
- New York ?! C'est loin, pourquoi veulent-ils aller là-bas ?
- Tu les connais, ils feront tout pour leur travail...
J'acquiesce silencieusement et encaisse le coup. Évidemment je connais ses parents, ils ont remplacés les miens absents une grande partie de mon enfance.
- Vous partez quand ?
- Demain matin, aux premières heures.
Cette fois ci, je ne parviens pas à retenir mes larmes. Moi qui suis habituellement si forte et sans coeur, je me sens faible. Faible de ne pouvoir rien faire. Je ne peux que subir le départ de mon meilleur ami qui part à l'aube à l'autre bout des États unis, le départ de mes deuxièmes parents qui m'ont plus élevé que mes biologiques. Je le vis comme une trahison.
- Désolé...
- Ne t'excuse pas Tyler, ce n'est pas de ta faute. On s'appellera toujours ?
- Évidemment, le caporal Tyler ne peut laisser ses moussaillons sans surveillance !
Je lâche une léger rire, amusée malgré la situation délicate par ses bêtises. Mon sourire s'efface rapidement lorsqu'il reçoit un appel de sa mère, l'obligeant à rentrer se préparer. Nous nous prenons dans les bras une dernière fois, extériorisant chacun notre chagrin par de nombreuses larmes dévalant le long de nos visages.
- On se revoit vite Ellie. Je le promets. Dit-il avant de partir en courant, évitant par moment de se retourner et se retrouver face à moi, détruite par son départ soudain.
...
- Mets ça, tu vas attraper froid.
Je me retourne brusquement, surprise de la voix apparue derrière moi. Une silhouette que je peine à distinguer dans le noir de la nuit s'installe à mes côtés sur le banc du parc. Cela doit faire deux heures que mon ami est rentré chez lui et je n'ai toujours pas trouver la force de bouger. La femme assise à côté de moi pose sa veste sur mes épaules et je la remercie d'un faible geste de la tête.
- Comment tu t'appelles ? Demande-t-elle en me voyant fixer le vide devant nous.
- Ellie. Répondais-je plus froidement que voulu.
- Eh bien, Ellie, je vais devoir y aller. Tu peux garder la veste. Fais attention à toi s'il te plaît. Dit-elle en partant.
Faire attention à moi ? Cela fait bien longtemps que je ne sais plus comment faire.
VOUS LISEZ
Pretty teacher
RomansaDeux mois après les autres, Ellie Wilson fait sa rentrée au mois de Novembre suite à une accumulation d'absence. Elle vient de perdre son meilleur ami qui déménage à l'autre bout des États Unis. Son coeur de glace et son attitude froide et cruelle...