Sous les étoiles - 20 Décembre

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Demain, c'est Yule. J'ai décoré mon salon. Je ne l'avais jamais fait, mais ces petites lumières et décorations sont la meilleure idée que j'ai eu depuis longtemps. Cette ambiance me fait penser à Ornelia et son aura pétillante. Je place dans un cadre doré la seule photo que je possède. Elle n'est pas très grande, abîmée, mais c'est mon bien le plus précieux. Je la pose sur un de mes nouveaux meubles, et contemple les visages souriants de mes frères et sœurs. Les débuts de l'équipe 267. Cette photo a été prise à la caserne où nous nous entraînions avant la guerre. Nous étions encore loin d'imaginer le carnage que nous allions causer, ni même que seuls deux d'entre nous y survivraient. Au moment de cette photo, nous étions heureux.

D'une pensée à une autre, j'en arrive à un souvenir plus récent. Une de mes dernières discussions avec Anthony. La première fois qu'il m'a parlé de Carolina.

Anthony semble soucieux, et cela n'a rien à voir avec le stress post-traumatique que nous avons hérité de la guerre. Il a envie de me dire quelque chose, je le sens.

"Crache le morceau, on dirait que tu vas faire une syncope.

-Je... J'ai rencontré quelqu'un."

Je suis surprise. Depuis que je le connais, Anthony n'a jamais parlé une seule fois d'un "quelqu'un". Ma curiosité est piquée.

"Donne moi tout de suite un nom, je réponds en souriant.

-Elle s'appelle Carolina. Je vais l'épouser.

-Wow c'est rapide.

-Non, c'est... évident. Elle est... je ne saurai même pas dire. Il n'y a aucun mot qui existe pour définir ce qu'elle me fait ressentir, comment je la vois, ni à quel point je l'aime.

-Tu as trouvé ta moitié."

Anthony me regarde enfin, un sourire radieux sur son visage. Je ne l'ai jamais vu aussi ému.

"Elle est tellement plus que ça. Elle est toute ma vie. Ce qui est le plus fou, c'est qu'elle ressent la même chose.

-C'est normal, c'est ce qui arrive quand deux vampires se mettent ensemble.

-Elle est... humaine."

Je fronce les sourcils.

"Une humaine ? Mais tu es fou !

-Lucia, tu ne comprends pas. Mais j'espère qu'un jour tu comprendras. Parce que ce jour-là tu sauras pourquoi on peut mourir pour quelqu'un.

-Attends tu ne comptes quand même pas...

-Quand le moment viendra, je partirai avec elle. Une vie sans elle n'aurait plus de sens, et je sais que je ne me remettrai jamais de ce drame. Elle aussi le sait."

A l'époque je n'avais pas compris, j'étais même stupéfaite et en colère face à la stupidité de mon ami. Aujourd'hui, je comprends. Parce que sans Ornelia, même si le monde a retrouvé un peu de couleur, j'ai l'impression d'être vide. Je suis persuadée que seule l'infime possibilité de la croiser par hasard dans la rue un jour me maintiens en vie désormais.

Je sors faire un tour une fois ma décoration posée, afin d'acheter quelques lumières pour peaufiner mon intérieur. Après quelques achats, je crois reconnaître Ornelia au détour d'une rue. Cependant, ce n'est pas ma belle et précieuse fée que je croise au centre commercial, mais sa sœur, Charlotte. Qui a l'air très en colère.

Elle marche droit vers moi, sourcils froncés, et le doigt pointé dans ma direction. Elle ne ressemble plus à la douce fée que j'ai rencontrée.

"Toi !

-Bonsoir, Charlotte.

-Oh non il n'y a pas de "bonsoir Charlotte". Qu'est-ce que tu as fait à ma sœur ? Je te jure que si tu lui as fait du mal je vais te traîner par la peau du cul au soleil et te regarder cramer en sirotant un sex on the beach !"

J'ouvre la bouche pour parler, mais la referme. En colère, elle perd toute sa délicatesse.

"Je te préviens, vampire ou pas tu ne me fais pas peur ! Tu n'as pas intérêt à t'en prendre à elle !

-Cette histoire ne concerne qu'Ornelia et moi.

-Elle me concerne si ça touche ma soeur !"

Elle m'agace. Je n'aime pas qu'elle se mêle de mes affaires, même si je suis heureuse qu'Ornelia ait quelqu'un qui veille sur elle.

"Non, ça ne te regarde pas. Et pour ta gouverne, c'est justement pour ne pas lui faire du mal que j'ai prit certaines décisions. Sur ce, je te souhaite une bonne soirée."

Je pars sans me retourner, le moral un peu plus bas que pendant mes achats de fête. Je ne lui en veux pas, elle protège sa sœur. Par contre, faire face aux conséquences de mes choix sur Ornelia me serre la poitrine. D'accord je voulais la repousser, mais apprendre qu'elle en souffre me brise le cœur. J'aimerai tellement la prendre dans mes bras, m'excuser, et passer au-dessus de mon passé pour construire l'avenir avec elle.

Je soupire et quitte le centre commercial. Cette conversation a semé une minuscule graine dans mon esprit : et si j'étais capable de surmonter mes traumatismes pour elle ? 

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